Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif

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© Industrie Canada, 2002

Coordonnateur de la rédaction

Peter Broder

Réviseure

Norah McClintock

Collaborateurs

Wayne Amundson
Jane Burke-Robertson
Terrance Carter
Jacqueline Connor
Paul Martel
David Stevens

Version française

Traducteur

Jean Pierre Toupin

Réviseur

Nicolas Lavoie


Avertissement

Ce document ne vise pas à remplacer un conseil professionnel.

Si un avis juridique ou l'aide d'un autre spécialiste est requis sur une question ou un cas particulier, les services d'un professionnel compétent devraient être sollicités. Le contenu du présent document ne devrait pas être considéré comme reflétant la politique officielle on non officielle de tout organisme gouvernemental.

Conception de la page couverture et mise en page : Wioletta Wesolowski

Le générique masculin est employé dans cette publication uniquement afin d'alléger le texte.

Industrie Canada—Guide à l'intention des administrateurs des sociétés sans but lucratif
ISBN: lu4-12/2002F0-662-87519-2

An English version of this publication is also available :
(ISBN: lu4-12/2002E0-662-32550-8)

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Table des matières

Préface

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Idéalement, le conseil d'administration de toute société sans but lucratif devrait être composé de personnes qui font intervenir un large éventail de compétences et de connaissances spécialisées dans leur travail de gestion. Ainsi, c'est peut-être à propos si, lors de l'élaboration de ce document, nous avons pu profiter d'une gamme exceptionnelle de talent et d'expérience.

Le Guide à l'intention des administrateurs des sociétés sans but lucratif a été commandité par le Centre canadien de philanthropie, dans le cadre du travail de consultation d'Industrie Canada sur la réforme de la Loi sur les corporations canadiennes. Le projet a bénéficié de la contribution de nombreux employés d'Industrie Canada travaillant sous la direction de Lee Gill, dans un premier temps, puis de Gilles Gauthier. Eva Fried, Nicolas Lavoie et Veronica Wessels ont apporté leur soutien et donné une rétroaction, contribuant à ce que le texte soit aussi complet, accessible et exact que possible.

Le nom des collaborateurs figure au début de chaque chapitre. Cependant, ces mentions ne font peut-être pas justice à l'effort de collaboration qui a présidé à la réalisation de plusieurs chapitres. Collectivement, notre but était de produire le texte le plus convivial et détaillé que possible. Ce faisant, certaines sections qui avaient d'abord été élaborées pour figurer dans un chapitre se sont inévitablement retrouvées ailleurs dans l'ouvrage. Le fait que les personnes ayant oeuvré au projet aient accepté sans hésitation que l'on procède ainsi, sans exiger une reconnaissance individuelle de ces modifications, témoigne de leur professionnalisme et de leur engagement envers le projet.

La version définitive du texte qui se trouve devant vous n'aurait pu voir le jour sans la participation de Norah McClintock et David Stevens. L'oeil attentif de Norah a permis que le texte ne s'enlise jamais dans le jargon juridique, tandis que la perspicacité de David a fait en sorte que notre désir d'employer un langage simple ne compromette jamais l'intégrité juridique du document. De même, Paul Martel a enrichi le texte de renseignements essentiels sur le traitement des sociétés sans but lucratif et de leurs administrateurs en vertu du droit civil du Québec. Wioletta Wesolowski a signé la conception graphique impeccable de l'ouvrage.

Enfin, je voudrais souligner le dévouement de Peter Broder, mon collègue du Centre canadien de philanthropie, et coordonnateur de la rédaction de cet ouvrage, ainsi que le travail de Michael Anderson et Robert MacKenzie, respectivement de la Canadian Association of Society Executives et directeur de la Section du droit des organismes de bienfaisance et à but non lucratif, de l'Association du Barreau canadien, pour leur contribution et leur appui dans l'obtention du parrainage de cette publication auprès de leur organisation respective.

- Gordon Floyd

Vice-président, Affaires publiques
Centre canadien de philanthropie
Juin 2002

Introduction

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Introduction

Le but du présent ouvrage

Les administrateurs des sociétés sans but lucratif représentent, à l'instar des organisations qu'ils servent, un groupe diversifié. Les deux caractéristiques qu'ils ont probablement le plus souvent en commun sont qu'ils manquent de temps et qu'ils sont bien intentionnés. Cet ouvrage a été élaboré en gardant à l'esprit ces deux facteurs. Nous avons tenté de rédiger un texte qui aidera les administrateurs à faire du bon travail, tout en se protégeant contre les réclamations pouvant résulter de leurs actes ou de leurs décisions. Nous avons aussi tenté de le faire dans un style convivial qui ne nécessite pas une étude approfondie mais qui fait ressortir les aspects essentiels de ce que le lecteur devrait savoir.

Des questions et des listes de vérification sont incluses dans chaque chapitre pour aider le lecteur à assimiler les questions abordées dans le texte.

S'il atteint son objectif, cet ouvrage :
  • fournira aux administrateurs des sociétés sans but lucratif des orientations qui, à la fois, les informeront sur leurs droits et obligations fondamentaux en vertu de la loi et mettront à leur disposition quelques outils simples pour les aider à exercer ces droits et à s'acquitter de ces obligations;
  • permettra aux administrateurs éventuels d'acquérir une bonne compréhension de leurs responsabilités futures s'ils acceptent de siéger au conseil d'administration d'une société sans but lucratif, de même que des conseils sur les questions à poser afin de prendre une décision informée quant à l'opportunité d'accepter ou non cette responsabilité;
  • fournira au personnel et aux bénévoles travaillant auprès d'un conseil d'administration un aperçu du rôle des administrateurs d'une société sans but lucratif, ainsi qu'un outil facile d'accès qu'ils pourront partager avec les membres de leur conseil d'administration et leurs collègues pour assurer une interprétation commune de qui fait quoi, comment et pourquoi.
Tout au long de cet ouvrage, nous avons visé à :
  • employer une formulation aussi simple et non technique que possible;
  • structurer l'information d'une façon accessible, en sections brèves et facilement assimilables;
  • maintenir la concision du texte;
  • faire tout ce qui précède sans compromettre l'intégrité de l'information présentée.

Cet ouvrage porte principalement sur les entités sans but lucratif constituées en société. Cela comprend, sans toutefois s'y limiter, des entités telles que les associations commerciales et communautaires, les clubs sportifs, les organismes de services de santé et de services sociaux, les organisations environnementales, les groupes artistiques, les congrégations religieuses, les organismes de développement international et les groupes de défense des droits de la personne et des libertés civiles. Sont toutefois exclus, les innombrables groupes informels, associations, fiducies, coopératives et autres entités qui sont constitués hors du cadre des lois fédérales ou provinciales sur les sociétés sans but lucratif.

Nonobstant les activités de la société qu'ils servent, les administrateurs des organismes constitués en société ont en commun l'obligation de superviser la gestion de leur société. De plus, ils sont soumis à d'autres obligations qui dépendent de la portée et de la nature des activités de leur société, ainsi que des obligations d'origine législative ou de common law liées à ces activités.

Termes employés dans cet ouvrage

Définitions

Différents termes peuvent avoir des significations différentes pour différentes personnes. Par souci de clarté, le présent guide utilise les termes et définitions suivants :

  • « Société sans but lucratif » signifie les entités constituées en société en vertu de la législation fédérale ou provinciale sur les sociétés sans but lucratif. Dans certains cas, mais pas toujours, ces sociétés sont des organismes de bienfaisance. L'alinéa 149(1)(l) de la Loi de l'impôt sur le revenu fédérale donne une définition des « organismes sans but lucratif », mais celle-ci exclut les organismes de bienfaisance [enregistrés] qui sont définis dans un autre article. Afin d'éviter toute confusion, nous n'utilisons pas, en règle générale, l'expression « organisme sans but lucratif ». L'expression « sans but lucratif » devrait être interprétée comme s'appliquant à l'aspect corporatif (sociétal), plutôt que fiscal, de l'organisation.
  • Nous traitons principalement des sociétés créées en vertu des lois sur les sociétés sans but lucratif adoptées par les gouvernements fédéral et provinciaux. De nombreuses autres organisations ayant un caractère sans but lucratif ont été créées en vertu de lois spéciales, de lois d'intérêt privé ou d'autres textes de loi. Bien que certains des principes et des conseils présentés dans cet ouvrage puissent s'appliquer à ces organisations, leur gouvernance est aussi réglementée par les lois en vertu desquelles elles ont été créées. Les sociétés constituées en vertu de ces textes de loi sortent du cadre du présent texte.
  • « Organisme de bienfaisance » signifie soit des entités qui ont été reconnues aux fins d'enregistrement comme oeuvre de bienfaisance en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, soit des entités dont les objets inciteraient les tribunaux à les traiter comme une oeuvre de bienfaisance aux fins de la loi. Bien que l'enregistrement d'une entité par l'Agence des douanes et du revenu du Canada déterminera si cette dernière a le droit d'émettre des reçus aux fins de l'impôt pour des dons, il est tout de même possible que les entités soient des « organismes de bienfaisance » pour d'autres fins, même si elles ne sont pas enregistrées. Si les tribunaux déterminent qu'à la lumière de leurs objets et activités, certaines entités sont des organismes de bienfaisance, leurs activités peuvent alors être assujetties aux lois provinciales réglementant les organismes de bienfaisance et aux règles de common law traitant de ces organismes.
  • « Lettres patentes » signifie le(s) document(s) établissant les objets ou buts, déposé(s) auprès du gouvernement de la sphère de compétence où est établie la société.
  • « Organisation » est un terme non juridique; de façon générale, il est employé pour désigner une association de personnes constituée aux fins de poursuivre un (des) but(s) commun(s). Une organisation peut être structurée légalement sous la forme d'une société, d'une fiducie, d'une coopérative ou d'une autre entité légale, ou encore être une association non constituée en personne morale. Étant donné que cet ouvrage est destiné aux administrateurs de sociétés, à moins d'indication contraire, l'emploi du terme organisation dans le texte devrait être interprété comme désignant les organisations non constituées en société.
  • « Règlements administratifs » signifie les règles fondamentales de gouvernance d'une société. Dans certaines sphères de compétence, mais non toutes, le dépôt de ces règlements auprès du gouvernement est obligatoire.
  • « Conseil d'administration » ou « conseil » signifie l'organe directeur de la société. Certaines institutions ou organisations peuvent utiliser des termes ou des titres différents pour identifier les personnes qui supervisent la gestion de la société. Cependant, « conseil d'administration » est l'expression la plus largement reconnue et acceptée.
  • « Administrateur » signifie un membre d'un conseil d'administration. Le terme « administrateur » devrait être interprété comme signifiant tout membre du conseil dûment élu ou nommé. La plupart des lois sur les sociétés envisagent la possibilité que les administrateurs soient nommés d'office ou à titre honoraire. Certaines sociétés incorporent à leurs structures de gouvernance des dispositions restreignant les pouvoirs ou les attributions, par exemple le droit de voter, de certaines personnes affiliées à leur conseil d'administration. Étant donné que ces personnes demeurent éventuellement assujetties à la responsabilité, aucune distinction n'est faite entre elles et les autres « administrateurs » dans le texte.
  • « Président(e) » signifie la personne qui préside le conseil d'administration ou un comité.
  • « Directeur général » signifie la personne qui dirige les activités quotidiennes d'une société.
  • « Membre » signifie une personne détenant des droits de vote dans une société.
  • « Intéressés » signifie les membres d'une société et les autres groupes concernés par celle-ci. Cela peut englober (sans s'y limiter) les donateurs, le personnel, les bénévoles, les diplômés et les clients. Encore une fois, selon les pratiques de votre société, vous pourriez être familiarisé avec d'autres termes désignant certaines de ces fonctions.

Notions juridiques
Les lecteurs trouveront utile de se familiariser avec certaines notions juridiques que l'on retrouve tout au long du présent ouvrage.

  • « Lois » ou « législation » est le terme généralement employé pour désigner les lois et règlements, fédéraux ou provinciaux, qui régissent la conduite de la société.
  • « Common law » est l'expression désignant les conclusions des tribunaux qui régissent la conduite au-delà des exigences d'origine législative. Puisque la common law est constituée par les décisions collectives des juges, elle change et évolue sans cesse.
  • « Jurisprudence » est le terme employé pour désigner les conclusions des tribunaux sur des points de droit particuliers ou, de façon plus générale (et contrairement au droit d'origine législative), à l'ensemble des conclusions judiciaires.
  • « Responsabilité solidaire et conjointe » est l'expression décrivant deux façons distinctes dont peut s'appliquer la responsabilité (dont celle de payer des dommages-intérêts). Cela signifie que les administrateurs sont responsables, conjointement avec un ou plusieurs autres administrateurs, de même qu'individuellement, de verser des dommages-intérêts. Lorsque ce genre de responsabilité s'applique, une partie qui remporte un procès peut poursuivre un, certains ou l'ensemble des administrateurs pour faire exécuter le jugement.

À moins d'indication contraire, lorsque nous mentionnons une règle dans cet ouvrage, nous faisons référence à la législation fédérale sur les sociétés sans but lucratif, en l'occurrence la Loi sur les corporations canadiennes, et/ou les règles de common law qui s'appliquent aux sociétés constituées en vertu de cette loi. Chaque province possède son propre texte de loi sur les sociétés sans but lucratif et même si, de façon générale, ces lois sont très similaires, elles comportent d'importantes différences. Il est donc souvent impossible d'énoncer de façon catégorique une règle qui s'applique dans toutes les sphères de compétence.

Notre approche

Exigences légales
Une partie de cet ouvrage porte sur ce que les administrateurs doivent faire, tandis qu'une grande partie a trait à ce que les administrateurs devraient faire; de plus, nous traitons à l'occasion de ce que les administrateurs peuvent faire. La jurisprudence concernant les sociétés sans but lucratif est relativement peu commune. Ainsi, même si de nombreux jugements ont été rendus sur des questions de conflits d'intérêts mettant en cause des administrateurs de sociétés à but lucratif, peu de jugements ont été rendus sur cette question dans le contexte des sociétés sans but lucratif. Cela signifie qu'il y a une importante zone grise où la ligne de démarcation entre ce qu'un administrateur doit faire et ce qu'il est autorisé à faire n'est pas claire. Ainsi, nous ne pouvons énoncer, de façon définitive, la norme juridique qui s'applique lorsqu'un administrateur d'un organisme de bienfaisance sans but lucratif est partie à une transaction touchant aux avoirs de la société. Lorsque la loi a été clarifiée — soit dans un texte de loi soit par les jugements des tribunaux — nous nous sommes efforcés de l'indiquer.

Bonnes pratiques en matière de gouvernance
Un récent rapport de l'Institut sur la gouvernance affirme qu'une bonne gouvernance comporte l'atteinte des résultats recherchés d'une façon compatible avec les valeurs démocratiques et la justice sociale. Le rapport énonce les éléments d'une bonne gouvernance :

… La vision (envisager l'avenir), l'orientation (définir des objectifs et préciser un « cheminement » général), les ressources (obtenir les ressources nécessaires pour atteindre les objectifs ou suivre la voie tracée), la surveillance (s'assurer périodiquement que le véhicule organisationnel est bien entretenu, progresse vers sa destination) et ce, à l'intérieur des limites de la loi, l'obligation de rendre compte (s'assurer que les ressources sont employées de façon efficiente, et faire rapport aux intéressés sur les progrès et les écarts observés)1.

Ce processus va manifestement bien au-delà du respect des exigences légales. Comment une société met en oeuvre ces divers éléments dépend de son mandat et de ses caractéristiques. Cependant, on peut dire qu'une société ne pourra avoir de bonnes pratiques en l'absence d'un engagement, d'une prise de décision compétente et d'une évaluation périodique.

Dans une procédure judiciaire, le respect d'une bonne pratique en matière de gouvernance n'offre pas nécessairement une défense complète. Cependant, lorsqu'une société ou un administrateur peut démontrer qu'il a suivi une pratique établie, conforme à une saine gouvernance, ou qu'il a choisi d'agir dans le but d'en arriver à une bonne gouvernance, cela constitue souvent un argument très persuasif en faveur de la société ou de l'administrateur.

Intendance
Les sociétés sans but lucratif peuvent jouir d'un traitement fiscal spécial, tandis que les organismes de bienfaisance enregistrés bénéficient d'un traitement fiscal encore plus généreux. Cela signifie que le public considère souvent qu'il a droit de regard sur la façon dont ces sociétés fonctionnent. Les préoccupations peuvent englober la concurrence déloyale que livre une société sans but lucratif à une entité à but lucratif, ou une mauvaise utilisation des dons reçus par un organisme de bienfaisance. Le cadre juridique et réglementaire pertinent traite, jusqu'à un certain point, de ces questions. Cependant, le conseil et les administrateurs doivent aussi être conscients que ces aspects donnent à leur société une image publique qu'elle n'aurait pas autrement.

De nombreuses sociétés sans but lucratif — et, en particulier, les organismes de bienfaisance — bénéficient d'une grande crédibilité auprès du public2. À vrai dire, cette crédibilité est l'un des points forts du secteur. L'engagement d'une société à faire preuve de transparence est essentiel au maintien et au renforcement de la confiance du public à l'égard du secteur.

C'est lors de la défaillance d'une société que l'impact des décisions prises par le conseil d'administration sur la confiance du public ressort le plus nettement — nous pouvons tous citer des cas fortement médiatisés qui ont eu un retentissement négatif ces dernières années. Une plus grande ouverture n'aurait pas réglé les problèmes sousjacents dans plusieurs de ces cas, mais l'absence de divulgation a presque invariablement amplifié les dommages causés à la société.

Peu d'organismes sans but lucratif peuvent survivre à long terme s'ils n'ont pas le soutien d'au moins un segment du public. Outre les exigences légales, il y a une raison très pratique pour que les administrateurs de sociétés sans but lucratif agissent prudemment et avec toute la diligence nécessaire, et pour que les sociétés prennent l'engagement de faire preuve de la plus grande transparence possible dans leurs activités. La plupart du temps, le dynamisme à long terme d'une société dépendra de l'efficacité avec laquelle elle a su préserver la confiance du public.

Conclusion
Il n'est jamais risqué pour un administrateur de chercher à se conformer à l'esprit de la loi lorsque la lettre de la loi n'est pas assez claire, en agissant conformément aux bonnes pratiques de gouvernance ou en étant conscient de la façon dont une action ou une décision particulière serait perçue par le public. En réalité, cela est nécessaire pour que les sociétés sans but lucratif répondent aux exigences croissantes qui leur sont imposées sur les plans de l'intégrité, de la transparence et de l'obligation de rendre compte.

Chapitre 1: Sociétés et administrateurs, Quoi, qui, pourquoi et comment

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Wayne Amundson*
Président, Association Xpertise Inc

Introduction

Qu'est-ce qu'une société sans but lucratif?
Les sociétés sans but lucratif (aussi appelées " sociétés sans capital-actions ") diffèrent des sociétés à but lucratif (aussi appelées " sociétés par actions ") de trois façons fondamentales :

  • La société sans but lucratif est constituée de membres, tandis que la société à but lucratif est détenue par des actionnairesnote 1.
  • Les membres d'une société sans but lucratif ne peuvent toucher de gains financiers (ou pécuniaires)note 2, au cours de l'existence de la sociéténote 3, tandis qu'une société à but lucratif peut distribuer ses bénéfices aux actionnaires sous forme de dividendes.
  • Les pouvoirs d'une société sans but lucratif sont limités à ce qui est écrit dans ses objets (mission), tandis qu'une société à but lucratif n'est habituellement pas assujettie à cette contraintenote 4.

De plus, le processus de constitution en société est habituellement différent pour les sociétés sans but lucratif, bien que la situation varie d'une sphère de compétence à l'autre. La constitution en société d'une entité à but lucratif se résume à présenter des formulaires et à verser les montants requis. En Saskatchewan, un processus semblable existe pour les sociétés à but lucratif. La constitution en société d'une entité sans but lucratif au palier fédéral, et dans la plupart des autres sphères de compétence, nécessite cependant l'examen et l'approbation du gouvernement. À titre d'exemple, les entités sans but lucratif qui veulent se constituer au palier fédéral en vertu de la Loi surles corporations canadiennes doivent présenter une demande au ministre fédéral de l'Industrie pour qu'il émette des lettres patentes à la sociéténote 5. Le projet de règlements administratifs de la société doit accompagner la demande.

Dans diverses sphères de compétence, il est nécessaire d'obtenir d'autres approbations ou de se conformer à d'autres conditions pour faire constituer en société certaines formes d'organisations sans but lucratif ou lorsque certains termes particuliers entrent dans la dénomination sociale de la société.

Exemple
Une société sans but lucratif qui est un organisme d'accréditation ou qui définit les normes d'une industrie peut nécessiter des approbations supplémentaires.

Exemple
Une société sans but lucratif qui souhaite utiliser le terme " canadien " doit recevoir l'approbation du gouvernement fédéral, tandis qu'une société qui souhaite se présenter comme un " institut " ou une " académie " doit habituellement obtenir l'approbation du ministère de l'Éducation de la province concernée.

Une entité sans but lucratif peut se constituer en vertu de la loi fédérale ou provinciale, selon la portée de sa mission déclarée et des activités qu'elle se propose de mener. Chaque sphère de compétence possède son propre texte de loi pour la constitution en société des organisations sans but lucratif et possède son propre processus d'approbation.

Avantages de la constitution en société
La constitution en société comporte de nombreux avantages. En voici certains :

  • Une société sans but lucratif a un statut juridique distinct de celui de ses membres. Les membres peuvent aller et venir, mais la société demeure jusqu'à ce qu'elle soit dissoute ou liquidée.
  • La société sans but lucratif peut passer des contrats, acheter et vendre des biens, etc.
  • Les membres individuels d'une société sont généralement protégés contre la responsabilité (voir les chapitres 2 et 3 pour plus de détails).
  • La structure formelle d'une société facilite les activités courantes et la prise de décision.
  • La constitution en société peut contribuer à renforcer la crédibilité auprès du gouvernement, des bailleurs de fonds et du public.

La société sans but lucratif a un pouvoir plus étendu, émanant des documents qui la régissent, pour régler les questions relatives au statut des membres (par exemple le retrait pour cause de cotisations impayées ou décès, et l'expulsion pour des motifs disciplinaires).

Désavantages de la constitution en société
La constitution en société peut comporter certains inconvénients. Celui qui revient le plus fréquemment est la paperasse et la réglementation qui s'applique. En voici d'autres :

  • La plupart des autorités exigent le dépôt annuel d'un document précisant l'emplacement du siège social et renfermant des renseignements sur les administrateurs.
  • Certaines entités sans but lucratif (à l'exclusion des organismes de bienfaisance enregistrés et des organismes sans but lucratif de plus petite taille) doivent déposer annuellement une déclaration de renseignements auprès de l'Agence des douanes et du revenu du Canada.
  • Les entités sans but lucratif non constituées en société (sauf les organismes de bienfaisance enregistrés) doivent déposer annuellement une déclaration d'impôt sur le revenu des sociétés.
  • Les sociétés fédérales constituées en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes doivent obtenir l'approbation du ministre avant de pouvoir modifier certains règlements administratifsnote 6.

Autres inconvénients

  • Certaines contraintes s'appliquent à la nature des activités que peut mener le groupe ou l'entité.
  • Le temps et les ressources qui doivent être consacrés au maintien de la structure de la société pourraient servir à la poursuite des objets ou des activités de l'organisation.

Le conseil d'administration d'une société sans but lucratif
La société sans but lucratif est régie par un conseil d'administration. La taille du conseil est définie dans les règlements administratifs de la société (selon les paramètres établis par chaque sphère de compétence). Bien que le conseil ait une autorité et un pouvoir étendus, les administrateurs, agissant individuellement, n'ont presque aucun pouvoir. Les lettres patentes ou les statuts constitutifs ainsi que les règlements administratifs définissent certains des éléments de la structure de gouvernance de la société.

Dans cette structure sociétale de base, toutefois, le conseil est habituellement responsable de la nomination (directement ou indirectement) des comités du conseil, des dirigeants, des employésnote 7 et des représentants de la société pour le déroulement de ses activités quotidiennes. Dans certains cas, il peut revenir aux membres de la société d'élire certains dirigeants, par exemple le président. Un administrateur pourra exercer tout pouvoir associé à une fonction ou à un poste auquel il a été élu ou nommé.

Exemple
Un administrateur choisi comme président d'un comité permanent détiendra les droits et les privilèges liés à ce poste.

Exemple
Un administrateur servant à titre de membre d'un comité spécial dont le mandat est de prendre une action particulière au nom de la société aura le droit de participer aux délibérations sur cette question et de prendre part au vote.

Les administrateurs des sociétés à but lucratif et sans but lucratif partagent la responsabilité juridique d'agir au mieux des intérêts de la société. Cependant, les parties intéressées à une société sans but lucratif ne partagent pas l'intérêt pécuniaire qui lie les participants à une société à but lucratif. Le fait que des bénévoles siègent au conseil d'administration et que, souvent, ce soit des bénévoles qui assurent le déroulement des activités de la société, signifie que la dynamique de la régie d'une société sans but lucratif diffère sensiblement de celle d'une entité à but lucratif. Dans certaines sphères de compétence, on a envisagé d'adopter des textes de loi qui donneraient aux administrateurs des sociétés sans but lucratif le pouvoir de tenir compte des intérêts de la collectivité ou des intéressés au moment de prendre des décisions; cependant, cette formule a généralement été rejetée.

Dans les sociétés à but lucratif, il est pris pour acquis que ceux qui détiennent un intérêt dans la société peuvent se satisfaire d'une rémunération économique (et le seront généralement), soit par une distribution périodique des revenus soit par le rachat de leur participation ou de leurs actions. Aucun mécanisme aussi simple n'existe dans le cas des sociétés sans but lucratif. Ces dernières poursuivent des fins qui sont moins concrètes et, par conséquent, difficiles à quantifier. Cela rend encore plus difficile la mesure de la performance d'une telle société et de ses administrateurs. Par conséquent, les administrateurs des sociétés sans but lucratif devraient toujours tenter de garder à l'esprit les intérêts et les opinions des membres de leur société et des autres parties intéressées.

Négliger de le faire pourrait mener à l'un des résultats suivants, ou même aux deux : l'engagement des membres à l'égard de la société s'effritera et/ou des factions opposées poursuivant des stratégies différentes se formeront au sein de la société. Lorsque cela se produit, le bon fonctionnement de l'organisation est entravé ou, dans des circonstances extrêmes, l'existence même de la société est menacée.

Genres de sociétés sans but lucratif

La plupart des provinces et la plupart des sphères de compétence aux États-Unis ont défini dIfférentes catégories d'entités sans but lucratif aux fins de leur constitution en société. Cependant, il n'existe aucune classification semblable des entités sans but lucratif dans la Loi sur les corporations canadiennes.

Certaines provinces utilisent un système à deux catégories. Même si le critère de partage peut être similaire dans ces provinces, la terminologie et l'approche employées varient. En Saskatchewan, la Not-for-profit Corporations Act, 1995 renferme un régime de classification à deux volets : les organisations caritatives et les organisations mutualistes. Dans ce régime, toutes les organisations non éligibles au statut d'organisme de bienfaisance sont classées dans la catégorie des organisations mutualistes. L'admissibilité au statut d'organisme de bienfaisance est déterminée soit par l'enregistrement auprès de l'Agence des douanes et du revenu du Canada soit par la conformité à d'autres critères précisés dans la Loi.

En Ontario, même si aucune distinction n'est faite dans la législation sur les sociétés, les sociétés sans but lucratif peuvent être soit des organismes de bienfaisance soit des organismes sans vocation de bienfaisance en vertu de la Loisur la comptabilité des oeuvres de bienfaisancenote 8. Les sociétés de bienfaisance sont soumises à l'autorité du Bureau du Curateur public général de l'Ontario. La Loi sur la comptabilité des oeuvres debienfaisance s'applique à " toute personne morale constituée à des fins religieuses, éducationnelles, publiques ou de bienfaisance note 9.

Au Québec, aucune distinction n'est faite entre les divers types de sociétés sans but lucratif constituées en vertu de la partie III de Loi sur les compagnies et il n'y a aucune loi équivalente à la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance de l'Ontario pour faire une distinction entre les sociétés à vocation caritative et les autres sociétés. Cependant, les sociétés qui souhaitent recueillir des dons auprès du public doivent incorporer certaines restrictions à leurs lettres patentes.

Le système de classification le plus couramment employé aux États-Unis comporte trois catégories : les organisations mutualistes (qui servent principalement les intérêts de leurs membres), les organisations de bien public (qui englobent les organisations caritatives qui ne sont pas des organisations religieuses) et les organisations religieuses.

Aux fins de la gouvernance, il est plus utile de faire la distinction entre deux grandes catégories d'organisations.

  • Les sociétés sans but lucratif de bien public ont des activités qui visent principalement à profiter au public. Leurs sources de revenu peuvent englober des dons publics et des dons provenant de sociétés, des subventions gouvernementales, des fonds obtenus par contrat ainsi que des programmes ou des activités à but lucratif. Une société sans but lucratif de bien public peut être, mais ne sera pas nécessairement, enregistrée en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Ces organisations sont parfois désignées " organismes caritatifs ", qu'elles soient ou non enregistrées auprès de l'Agence des douanes et du revenu du Canada et peu importe qu'elles se conforment à l'exigence de common law selon laquelle elles doivent être exclusivement à vocation caritative (c'est-à-dire qu'elles ne doivent pas avoir d'activités à vocation non caritative).
  • Les sociétés sans but lucratif mutualistes ontdes activités qui visent principalement à profiter à leurs membres. Ces sociétés sont habituellement soutenues par leurs membres, qui versent des droits, ainsi que par des programmes ou des activités à but lucratif, mais elles peuvent aussi avoir d'autres sources de revenu, par exemple des fonds obtenus dans le cadre de projets gouvernementaux. Entre autres exemples de sociétés mutualistes, il y a les associations commerciales, les sociétés professionnelles, les clubs de golf, les clubs sociaux, etc.

Les administrateurs des organisations de bien public doivent généralement tenir compte des intérêts d'un éventail plus large d'intervenants dans leur décision, en comparaison des administrateurs des organisations mutualistes.

Toutes les sociétés sans but lucratif comptent des membres. Dans de nombreuses sociétés sans but lucratif mutualistes, les critères d'adhésion peuvent être définis en fonction d'un intérêt commun manifeste, souvent lié à la prestation d'un service. Dans les sociétés de bien public, l'intérêt commun peut être plus vague ou énoncé de façon très générale. Il s'ensuit que, dans les organisations de bien public, on débat souvent de la question de l'admissibilité des membres et de l'opportunité d'avoir différentes catégories de membres. Dans certaines organisations de bien public, l'adhésion est réservée à un nombre relativement restreint de personnes — par exemple, les administrateurs actuellement en poste. Lorsque le nombre possible de membres est restreint, l'admissibilité de non-membres aux postes d'administrateur peut constituer un enjeu important pour les sociétés de bien public et peut avoir une incidence profonde sur la capacité de l'organisation de se renouveler.

Catégories spéciales d'administrateurs

Les lettres patentes (ou statuts constitutifs) ou les règlements administratifs d'une société sans but lucratif peuvent prévoir certaines catégories spéciales d'administrateurs. Les plus fréquentes sont les administrateurs " publics " ou ceux nommés " d'office " ou à titre " honoraire ".

Administrateurs nommés d'office
Les administrateurs nommés d'office sont définis dans les textes de procédure les plus élémentaires, par exemple le Robert's Rules of Ordernote 10. Ce sont des personnes admissibles à siéger à titre d'administrateur en raison de la fonction qu'elles occupent, par exemple la présidence de l'organisation ou d'un autre groupe ou organisation — habituellement affilié ou relié au premier. Ces personnes peuvent aussi être admissibles parce qu'elles sont titulaires d'une charge publique.

Une personne qui est membre d'office d'un conseil d'administration possède habituellement les mêmes droits que les autres administrateurs, mais elle peut ou non avoir le droit de voter. Cela devrait être précisé dans les documents qui régissent la société. Il n'est pas inhabituel que les règlements administratifs d'une société sans but lucratif stipulent que le directeur général siège à titre de membre d'office du conseil d'administration, habituellement sans droit de vote. Cela permet de faire en sorte que le directeur général participe aux décisions du conseil. Puisqu'il n'a pas le droit de voter, cela évite toute situation où le directeur général est mandaté pour exécuter une décision contre laquelle il aurait voté au conseil.

Lorsqu'un administrateur peut être considéré comme agissant à titre de fiduciaire, par exemple dans un organisme de bienfaisance enregistré ou dans une société de bien public, un directeur général siégeant d'office au conseil d'administration pourrait faire l'objet d'une contestation. Il en est ainsi parce qu'en vertu de la législation sur les fiducies (et du droit législatif en Ontario), cette personne pourrait être obligée de servir sans rémunération. Un directeur général qui touche un salaire pourrait être considéré comme étant rémunéré au moment où il occupe la fonction de membre d'office du conseil d'administration. La loi n'est pas claire sur ce point, de sorte que, notamment en Ontario, les sociétés de bien public devraient éviter de désigner le directeur général (ou tout employé rémunéré) à titre de membre d'office du conseil d'administration. D'autres moyens d'assurer la participation du directeur général aux réunions du conseil devraient être exploréesnote 11.

Qu'ils aient ou non le droit de voter, les membres d'office d'un conseil d'administration ont les mêmes devoirs et responsabilités en loi que les autres administrateursnote 12. Lorsqu'un administrateur d'office n'a pas le droit de voter, il assume la responsabilité sans avoir la possibilité de s'opposer à une décision du conseil ou de consigner sa dissension. Dans ces circonstances et lorsque cela est possible, des dispositions devraient être prévues pour accorder à un tel administrateur une indemnisation et/ou une protection sous forme d'assurance. (Voir le chapitre 6 qui traite en détail de la question de l'indemnisation et de l'assurance.) De même, il est à noter qu'un administrateur nommé d'office a le droit d'assister aux délibérations du conseil d'administration se déroulant à huis clos. Cependant, une exception est faite lorsqu'un conflit d'intérêts surgit.

Exemple
Une société sans but lucratif souhaite assurer la représentation d'une organisation connexe à son conseil d'administration, de sorte que dans les statuts qui la régissent, elle prévoit accorder au président de cette organisation le statut de membre d'office de son conseil d'administration. Cette personne siégera à titre de membre à part entière du conseil d'administration et sera tenue d'agir au mieux des intérêts de la société sans but lucratif. Il/elle sera pleinement responsable de toute décision prise par le conseil, à moins qu'il/elle n'ait consigné sa dissension ou se soit retiré de la décision pour motif de conflit d'intérêts.

Exemple
Une société sans but lucratif nomme son directeur général à titre de membre d'office du conseil d'administration. Les règlements administratifs prévoient que cette personne pourra participer aux délibérations du conseil, mais n'aura pas le droit de voter. Il/elle sera pleinement responsable de toute décision du conseil et le conseil ne pourra l'exclure des délibérations qu'il tient à huis clos sauf en situation de conflit d'intérêts.

De façon générale, les règlements administratifs devraient aussi préciser qu'un administrateur nommé d'office servira aussi longtemps et uniquement aussi longtemps qu'il occupe la charge en question.

Administrateurs ou dirigeants honoraires
Lorsqu'une société sans but lucratif adopte la pratique de nommer des administrateurs ou des dirigeants à titre honoraire, les statuts qui la régissent devraient faire mention de ces fonctions, y compris leur mode de nomination. Comme dans le cas des administrateurs nommés d'office, les statuts qui régissent la société sans but lucratif devraient préciser si les administrateurs nommés à titre honoraire ont le droit de voter. S'ils n'ont pas droit de voter, les administrateurs honoraires peuvent assister aux réunions et participer aux délibérations, mais ils ne peuvent présenter de motions ou prendre part au vote.

Bien qu'une telle pratique soit courante, la nomination d'administrateurs ou de dirigeants à titre honoraire doit être envisagée avec prudence. Cela ne vise pas à contester la nécessité de reconnaître de longs ou distingués états de service, ou encore la valeur intrinsèque d'associer à l'organisation une personnalité bien en vue afin d'utiliser son nom à des fins de promotion ou de collecte de fonds. Cependant, en présumant que ces personnes sont des administrateurs ou des dirigeants honoraires, il y a risque qu'elles soient tenues responsables de décisions prises par le conseil d'administration auxquelles elles n'ont pas pleinement participé. Comme dans le cas des administrateurs nommés d'office, le fait que ces personnes n'ait pas le droit de voter n'empêche pas qu'elles peuvent être tenues responsables, et peut aussi signifier qu'elles ne pourront être exclues des délibérations à huis clos.

La jurisprudence traitant de ces questions est limitée, de sorte que l'on ne peut dire avec certitude quand, ou si, une personne servant en cette qualité serait tenue responsable. Une autre solution serait d'employer un autre titre ou de désigner ces personnes d'une autre façon pour qu'il soit évident à des tiers qu'elles ne participent pas (ou plus) activement à l'organisation à titre de décideur. On pourrait, par exemple, leur donner le titre de conseiller ou de patron honoraire.

Administrateurs publics
Certaines sociétés sans but lucratif sont tenues de nommer un ou plusieurs membres de leur conseil d'administration pour représenter le public. Cette pratique est fréquente dans les sociétés professionnelles qui ont un rôle de protection de l'intérêt public et qui servent simultanément les intérêts de leurs membres. Ces administrateurs ne sont pas membres de l'organisation. Cependant, ils ont les mêmes droits et responsabilités que les autres administrateurs, sauf qu'ils ne sont pas tenus de respecter les obligations imposées aux membres, par exemple le versement de droits.

Mandat de l'organisation

Connaissance du mandat
Pour s'acquitter efficacement de leur fonction, les administrateurs et les administrateurs éventuels doivent connaître et comprendre pourquoi l'organisation existe et qui elle dessert. Il est tout aussi important que le conseil d'administration réexamine périodiquement son mandat afin de s'assurer qu'il est toujours pertinent et de vérifier l'engagement de l'organisation envers celui-ci.

Même si une organisation bien gérée peut faire beaucoup pour aider un nouvel administrateur à se familiariser avec l'organisation et son mandat, il est inévitable que la plus grande partie de la responsabilité de se renseigner de façon satisfaisante lui incombe. Les nouveaux administrateurs devraient reconnaître qu'ils pourraient ne pas recevoir beaucoup d'orientation au-delà de la possibilité de consulter les documents qui régissent la société sans but lucratif — et que ces documents peuvent ou non donner une bonne idée des activités actuelles de la société. Ils devraient déterminer comment les lacunes dans leurs connaissances pourraient le mieux être comblées. Investir du temps hors des réunions du conseil d'administration pour parler avec le personnel, d'autres membres du conseil ou d'anciens membres pourrait à la fois accroître l'efficacité du nouveau membre et lui permettre de mieux utiliser son temps aux réunions du conseil. (Pour plus de détails sur la formation et l'orientation des administrateurs, consultez le chapitre 8.)

L'outil d'auto-évaluation de la Fondation Drucker identifie cinq questions clés qui peuvent aider les administrateurs des sociétés sans but lucratif à prendre la mesure de leur organisation :

Quelle est notre mission?
Quelle est notre clientèle?
À quoi le client attache-t-il de l'importance?
Quels sont nos résultats?
Quelle est notre plan?

Les trois premières questions ont trait à la nécessité pour le conseil d'administration de comprendre et de réexaminer son mandat. La quatrième question a trait à l'efficacité avec laquelle l'organisation met en oeuvre son mandat. La cinquième question a trait à l'attention accordée par le conseil à l'élaboration d'un plan qui permettrait à l'organisation de mieux s'acquitter de son mandat.

Il est aussi important que les administrateurs et les administrateurs éventuels comprennent le mandat de la société afin de pouvoir déterminer si leurs motifs pour servir au sein du conseil sont compatibles avec celui-ci.

En outre, l'objet de l'organisation, tel qu'articulé dans sa mission et sa vision, déterminera pourquoi la société a le statut d'organisme sans but lucratif, pourquoi ses membres adhèrent à l'organisation et pourquoi le public et d'autres bailleurs de fonds appuient financièrement l'organisation.

Documents de gouvernance de la société
Dans The Guide to Better Meetings for Directors of Non-Profit Organizations, Eli Mina décrit trois ensembles de documents qui constituent le cadre dans lequel opèrent les entités sans but lucratif :

  • Les lois en vigueur sur le territoire : la loi en vertu de laquelle est constituée l'organisation…
  • Les règlements administratifs (ou les statuts constitutifs et les règlements administratifs)…
  • Les procédures ou les règles qui régissent la tenue des réunions…note 13

La loi en vertu de laquelle la société a été constituée a préséance. Lorsqu'elle ne traite pas d'une question ou qu'elle offre différentes options, ce sont les règlements administratifs qui s'appliquent. Lorsque tant la loi que les règlements administratifs sont silencieux sur un aspect, c'est le manuel des règles qui s'applique si celui-ci est mentionné dans les règlements administratifs de la société. Le Robert's Rules of Order fait habituellement autorité lorsque les règlements administratifs ne font pas mention d'un autre document. Au Québec, c'est le manuel de Procédure des assemblées délibérantes de Victor Morin qui est la référence généralement employée.

Deux autres documents de régie existent souvent dans les sociétés sans but lucratif. Dans certaines organisations, les règlements administratifs ou la pratique de l'organisation peuvent prévoir des " codes " ou des " règlements " qui énoncent les pratiques qui s'appliquent aux membres. Le processus de modification de ces documents variera d'une organisation à l'autre et peut prévoir la consultation et la participation des membres, du conseil et/ou du personnel aux décisions. En outre, dans de nombreuses organisations, certaines décisions du conseil sont compilées dans un manuel de " gouvernance " ou des " politiques ". Ce dernier énonce les pratiques appropriées sans nécessairement faire référence à des questions précises. Dans les deux cas, le manuel vient après les règlements administratifs dans l'ordre de préséance.

Il n'est pas rare que des organisations agissent de façon contraire aux statuts qui les gouvernent — avec des conséquences possibles sur le plan de la responsabilité. Un examen de la loi et des règlements administratifs (aussi appelé vérification de la conformité) peut se révéler très utile pour s'assurer que l'organisation s'acquitte de ses responsabilités et se conforme aux exigences applicables. Une question fondamentale pour de nombreuses sociétés sans but lucratif est la conservation de la mémoire institutionnelle. Un taux de roulement élevé parmi les membres du conseil d'administration et le personnel peut signifier qu'une organisation revient sur une question qui a déjà fait l'objet d'une décision, ou qu'elle agit de façon non cohérente sur une certaine période. Le fait de revenir sur une question entraîne habituellement un gaspillage d'énergie, et le manque de cohérence sur une certaine période risque d'aliéner des clients ou d'autres parties intéressées. Toute initiative qui peut être prise pour simplifier ou faciliter le suivi des pratiques de gouvernance ou des décisions est utile.

Obligation de rendre compte

Tous les administrateurs des sociétés sans but lucratif peuvent être tenus de rendre des comptes à quelqu'un ou à une autre entité, souvent même à de multiples parties. Cette reddition de comptes peut prendre de nombreuses formes : assemblée générale annuelle au cours de laquelle les membres peuvent voter pour remplacer les administrateurs en qui ils ont perdu confiance ou pour apporter des modifications à des documents de gouvernance qui touchent le conseil d'administration; peines administratives ou judiciaires imposées pour non-conformité à la réglementation; obligation de faire rapport à des bailleurs de fonds; actions en justice intentées par des intervenants mécontents. Si les administrateurs sont souvent préoccupés par leurs responsabilités juridiques, ils doivent aussi être conscients de leurs obligations envers les parties intéressées qui pourraient ne pas avoir de recours légaux ou qui pourraient ne pas se pourvoir des recours qu'elles ont. Très rarement, les devoirs légaux seront en contradiction avec les intérêts de ces parties et, dans ces cas peu fréquents, la responsabilité juridique doit avoir préséance. Dans d'autres cas, les administrateurs les plus habiles reconnaîtront et prendront en considération les besoins des parties intéressées dans la mesure du possible, garantissant ainsi le dynamisme à long terme de leur organisation.

La responsabilité redditionnelle des administrateurs des sociétés sans but lucratif de bien public est semblable à celle qui incombe aux administrateurs des sociétés mutualistes. Habituellement, les administrateurs des sociétés de bien public devront tenir compte des intérêts d'une plus vaste clientèle que leurs homologues des sociétés mutualistes. L'organigramme des parties intéressées peut constituer un instrument utile pour aider les administrateurs à s'acquitter de leur obligation de rendre compte lorsque l'organisation dessert de multiples clientèles.

De même, il faudrait noter que les sociétés de bien public sont fréquemment soumises à des exigences réglementaires plus rigoureuses, soit par l'Agence des douanes et du revenu du Canada soit en vertu de la législation provinciale. Dans certains cas, ces exigences réglementaires remplacent, de fait, le rôle des bénéficiaires pour ce qui est d'assurer que les organisations de bien public agissent de façon appropriée; cependant, dans d'autres cas, les bénéficiaires ont aussi des recours devant les tribunaux pour faire valoir leurs intérêts.

Note au sujet de la compétence
La constitution d'une entité en société, fédérale ou provinciale, ne confère pas automatiquement à l'autorité concernée la compétence sur les activités de la société (au-delà de ce qui touche la conformité aux exigences de la loi constitutive). Au contraire, le droit de regard sur les activités échoit au palier de gouvernement qui a compétence sur les activités en question (par exemple un établissement d'enseignement constitué en société au niveau fédéral relève de la compétence provinciale pour ce qui est de ses opérations; les activités d'une autorité aéroportua irerelèvent de la compétence fédérale peu importe l'endroit où elle est constituée en société).

Compétence du gouvernement fédéral
Outre les lois régissant la constitution en société et la réglementation qui s'applique aux sociétés, la compétence du gouvernement fédéral sur le secteur sans but lucratif intervient le plus souvent dans le cadre de la Loi de l'impôt sur le revenu. Cette autorité est exercée au niveau de la détermination de l'admissibilité au statut d'organisme sans but lucratif et au statut d'organisme de bienfaisance enregistré. Le fondement de cette intervention est le pouvoir fédéral en matière de taxation directe et indirecte. (Le chapitre 7 traite plus en détail du statut fiscal des entités sans but lucratif.)

Selon les objets et les activités d'une organisation, le gouvernement fédéral pourrait aussi avoir une compétence réglementaire — ainsi, les autorités portuaires sont assujetties à la réglementation du ministère fédéral des Transports.

En outre, le gouvernement fédéral partage la compétence avec les provinces en ce qui a trait aux taxes de vente et de consommation. Par conséquent, il a son mot à dire sur la façon dont cet aspect du régime fiscal s'applique aux entités sans but lucratif. Dans certains cas, les sociétés sans but lucratif sont admissibles à un taux de TPS préférentiel.

La réglementation fédérale dans des domaines tels que le commerce et la vie privée lui confère aussi une compétence sur certains aspects des activités des sociétés sans but lucratif. Enfin, le pouvoir de dépenser peut donner à l'autorité fédérale compétence sur certaines entreprises sans but lucratif.

Compétence des gouvernements provinciaux
Outre les lois qui régissent la constitution en société et qui réglementent les sociétés, les gouvernements provinciaux ont une compétence très étendue sur le secteur sans but lucratif. Voici certains exemples :

  • Supervision des organismes de bienfaisance. Le Bureau du Curateur public général de l'Ontario supervise la plupart des organismes de bien public — c'est-à-dire les sociétés constituées à des fins religieuses, publiques ou de bienfaisance — qui opèrent en Ontario, peu importe l'endroit où ces sociétés ont été constituées et qu'elles soient ou non enregistrées auprès de l'Agence des douanes et du revenu du Canada.
  • Collecte de fonds. Le gouvernement de l'Alberta a adopté des mesures législatives pour exercer une surveillance et un contrôle sur les activités de collecte de fonds. Le Manitoba a aussi une loi traitant de l'enregistrement des organismes de collecte de fonds.
  • Jeux et loteries. Qu'il s'agisse des bingos, des casinos ou des tirages organisés par des organismes caritatifs, ou des fonds perçus par les gouvernements provinciaux au titre des jeux et loteries, ces activités représentent un très important secteur de compétence provinciale touchant aux entités sans but lucratif.
  • Professions. L'éducation relève de la responsabilité des provinces. Des questions telles que l'admissibilité des droits de scolarité à une déduction fiscale, l'autoréglementation des professions et le droit d'accorder une désignation ou une accréditation protégée sont autant de questions gérées au niveau provincial.
  • Impôts fonciers. Diverses provinces (agissant directement ou par le truchement de leurs municipalités) exemptent certaines entités sans but lucratif des impôts fonciers ou leur accordent des taux d'évaluation inférieurs, selon la nature de l'organisation.
  • Fiscalité. Au Québec, la législation provinciale prévoit un régime fiscal distinct — qui suit à peu près en parallèle le régime fédéral — prévoyant l'exemption des organismes sans but lucratif et l'enregistrement des organismes de bienfaisance. Ce régime établit aussi un système distinct de taxes de vente et à la consommation.
  • Langue. Au Québec, la Charte de la langue française et la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales exigent et réglementent l'utilisation de la langue française dans les dénominations des sociétés sans but lucratif ainsi que leurs contrats, signalisation, affiches, dépliants, brochures, etc.
  • Enregistrement. Toutes les sociétés sans but lucratif ayant des activités au Québec doivent s'enregistrer et, subséquemment, produire une déclaration annuelle conformément à la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles,des sociétés et des personnes morales. La Loi prévoit des amendes pour les sociétés et leurs administrateurs qui ne se conforment pas à ces exigences.
  • Financement. Les soins de santé, par exemple, sont un domaine de compétence provinciale. Les gouvernements provinciaux accordent du financement pour la prestation des soins de santé, l'éducation, etc.
  • Réglementation. Les gouvernements provinciaux ont compétence sur de nombreuses activités courantes des entités sans but lucratif en vertu de leur pouvoir constitutionnel sur la propriété et les droits civils.
  • Accès à l'information et vie privée. Certains gouvernements provinciaux ont mis en place des lois sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée.

Juridiction des tribunaux
Outre l'application de la loi, il y a au moins trois domaines dignes de mention où divers tribunaux ont juridiction sur les sociétés sans but lucratif :

  • ils ont le pouvoir intrinsèque de superviser l'activité des organisations pour s'assurer que leurs procédures sont conformes aux exigences relatives à une procédure équitable;
  • ils peuvent déterminer si les objets et les activités d'une organisation ont un caractère caritatif et, par conséquent, si celle-ci est admissible au statut d'organisme de bienfaisance enregistré en vertu de la loi fédérale ou du Québec;
  • lorsqu'une organisation est un organisme de bienfaisance, le tribunal a le pouvoir intrinsèque de superviser le traitement des avoirs de l'organisation à titre de biens en fiducie.

Responsabilité conflictuelle ou partagée
Les administrateurs devraient toujours être conscients qu'ils peuvent devoir rendre des comptes à différentes parties. Dans une large mesure, il devrait être possible de concilier la responsabilité envers ces diverses clientèles. Lorsque cela s'avère impossible, les administrateurs devraient demander conseil à un avocat et prendre une décision en étant parfaitement informés de ses conséquences possibles.

Exemple
Si l'organisation est au bord de l'insolvabilité et qu'elle se voit offrir du financement pour un projet qui déborde manifestement la portée de ses objets ou de sa mission, les administrateurs doivent obtenir un avis juridique pour s'assurer que les travaux proposés entrent dans leur mandat ou pour déterminer comment ils pourraient être intégrés à leur mandat, s'ils décidaient de les entreprendre.

Éléments d'une bonne gouvernance

Pratiques recommandées pour les conseils d'administration de sociétés sans but lucratif
La Table ronde sur la transparence et la bonne gestion dans le secteur bénévolenote 14, présidée par Ed Broadbent, a énoncé huit tâches qui incombent aux conseils d'administration des organismes de bienfaisance et des entités sans but lucratif de bien publicnote 15 pour favoriser une meilleure gouvernance :

  • s'assurer de la poursuite de la mission et guider la planification stratégique;
  • faire preuve de transparence, notamment dans les communications avec les membres, les parties intéressées et le public, et fournir de l'information sur demande;
  • mettre en place des structures appropriées;
  • s'assurer que le conseil d'administration comprend son rôle et évite les conflits d'intérêts;
  • maintenir la responsabilité budgétaire;
  • s'assurer qu'une équipe de gestion efficace est en place et superviser ses activités;
  • mettre en place des systèmes d'évaluation et de contrôle;
  • planifier la relève et assurer la diversité du conseil.

On pourrait élaborer longuement sur les tâches énumérées dans cette liste. La liste vise avant tout à servir de point de départ pour illustrer les questions que les administrateurs doivent prendre en considération. Chaque organisation devrait examiner ses propres circonstances et déterminer les points particuliers sur lesquels elle devrait mettre l'accent et les éléments supplémentaires qui, le cas échéant, devraient être ajoutés à la liste à la lumière de ses objets.

Exemples de questions que les administrateurs actuels ou éventuels peuvent poser à l'organisation

  1. L'organisation est-elle constituée en société et, le cas échéant, dans quelle sphère de compétence et en vertu de quel texte de loi?
  2. La société est-elle principalement constituée pour le bénéfice mutuel de ses membres ou sert-elle principalement le bien public?
  3. Quelle est la mission de l'organisation et quand celle-ci a-t-elle été examinée la dernière fois?
  4. Qui sont les membres de la société?
  5. Qui la société sert-elle — les membres ou une autre clientèle?
  6. En qualité d'administrateurs, à qui devons-nous rendre des comptes?

Exemples de questions que les administrateurs actuels ou éventuels peuvent se poser à eux-mêmes

  1. Suis-je engagé à réaliser la mission de l'organisation?
  2. Puis-je fournir le temps nécessaire pour jouer efficacement mon rôle de membre du conseil?
  3. Suis-je en accord avec l'approche et la manière dont l'organisation procède dans ses efforts de collecte de fonds?
  4. Puis-je apporter un soutien financier conforme aux attentes de l'organisation concernant les membres du conseil et à la mesure de mes moyens et de mes priorités?
  5. Puis-je placer le mandat et les intérêts de l'organisation au-dessus de mes intérêts professionnels et personnels au moment de prendre des décisions à titre de membre du conseil?

Liste de vérification — sociétés et administrateurs

Liste de vérification — Sociétés et administrateurs
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Examen des lettres patentes (statuts constitutifs)  

Ensemble du conseil (peut-être avec l'aide d'un conseiller et/ou d'un avocat)  

Annuellement, ou aussi fréquemment qu'il est indiqué, compte tenu de la durée du mandat et du taux de roulement des membres du conseil  

Y a-t-il un écart entre l'énoncé de la mission de l'organisation et l'objet défini dans ses lettres patentes ou ses statuts constitutifs? L'organisation s'est-elle conformée aux exigences relatives au dépôt des déclarations qui la concernent?  

2. Examen de la conformité des règlements administratifs  

L'un ou l'autre de l'ensemble du conseil, du comité exécutif, du comité des règlements (peut-être avec l'aide d'un conseiller et/ou d'un avocat)  

Annuellement, ou aussi fréquemment qu'il est indiqué, compte tenu de la durée du mandat et du taux de roulement des membres du conseil  

Les règlements administratifs sont-ils conformes aux lois actuelles sur les sociétés et sur la fiscalité qui s'appliquent aux sociétés sans but lucratif? L'organisation a-t-elle changé ou envisage-t-elle de changer ou envisage-t-elle des réformes qui nécessiteraient une modification de ses règlements administratifs? Les règlements administratifs énoncent-ils l'objet de l'organisation et, le cas échéant, sont-ils conformes à l'objet ou à la mission de l'organisation décrit ailleurs?  

3. Examen des règlements administratifs sous l'angle des meilleures pratiques  

Ensemble du conseil et/ou directeur général (peut-être avec l'aide d'un conseiller et/ou d'un avocat)  

Annuellement  

Les règlements administratifs sont-ils conformes aux meilleures pratiques de l'heure? Une modification ou une mise à jour des règlements est-elle nécessaire? Certains règlements administratifs sont-ils inutiles compte tenu de la taille et de la situation actuelles de la société? Y a-t-il des lacunes logiques dans les règlements administratifs qu'il faudrait combler?  

4. Examen des règlements administratifs sous l'angle du mode de scrutin  

Directeur général et/ou comité des nominations  

Annuellement, avant d'engager le processus de nomination et de scrutin  

Quelles sont les grandes étapes à franchir dans le processus de nomination et de scrutin (par exemple les délais à respecter)? Le nombre d'administrateurs est-il conforme aux règlements administratifs? Le processus de nomination et de scrutin est-il conforme à ces règlements?  

5. Examen de l'énoncé de mission  

Ensemble du conseil et directeur général  

Annuellement  

On devrait répondre aux questions énumérées à la section du présent chapitre traitant du Mandat de l'organisation (voir p. 8) pour s'assurer que l'énoncé de mission demeure pertinent.  

6. Examen de la méthode de gouvernance de l'organisation  

Ensemble du conseil avec la participation des membres  

Aux deux ans; plus fréquemment si le taux de roulement au sein du conseil est élevé  

Le conseil a-t-il une taille appropriée? Fait-il bien son travail (voir les pratiques recommandées par le groupe Broadbent plus tôt dans ce chapitre)? L'organisation dispose-t-elle d'une bonne gouvernance et comment pourrait-on l'améliorer?  


* B. Admin., CMA, CAE. Association Xpertise Inc. (www.axi.ca) est établie à Calgary.

Chapitre 2: Devoirs des administrateurs

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Jane Burke-Robertson*
Avocate et procureure

Introduction

Le rôle des administrateurs
Le conseil d'administration d'une société sans but lucratif est responsable de la gestion de la société. En termes généraux, cela signifie que le conseil est responsable de la supervision des cadres supérieurs, en assurant la planification stratégique et en élaborant et en appliquant la politique de la société. Les membres du conseil doivent être informés des activités et des affaires financières de la société (ou à tout le moins le devenir). Lorsque la société est un organisme de bienfaisance, le conseil a un devoir de diligence plus rigoureux en ce qui a trait à la protection des avoirs destinés à des fins caritatives.

En s'acquittant de son mandat de gérer les affaires de la société, le conseil doit respecter les objets de la société, tels qu'énoncés dans les lettres patentes ou dans les statuts constitutifs et les règlements de la société. Le conseil doit aussi se conformer aux dispositions pertinentes de la loi sur les sociétés en vertu de laquelle la société a été constituée ainsi que des règles de common law (le droit établi par les tribunaux) qui régissent, dans certaines provinces, les devoirs des administrateurs.

Les devoirs des administrateurs
Les administrateurs sont tenus d'exercer leur pouvoir avec compétence et diligence, au mieux des intérêts de la société. Ils ont ce que l'on appelle une " obligation fiduciaire " envers la société. Ce devoir est de nature " fiduciaire " parce que l'obligation d'agir au mieux des intérêts de la société est, essentiellement, une obligation de loyauté, d'honnêteté et de bonne foi. Les lois modernes sur les sociétés qui régissent les sociétés commerciales renferment une formulation concise de l'obligation fiduciaire imposée aux administrateurs. La plupart des lois sur les sociétés qui régissent les sociétés sans but lucratif n'en ont pas. La formulation de l'obligation fiduciaire des administrateurs a été élaborée en common law par les tribunaux canadiens et britanniques ou a été articulée dans le Code civil.

On peut répartir en deux grandes catégories les obligations fiduciaires des administrateurs :

a) le devoir de diligence et
b) le devoir de loyauté.

Le devoir de diligence impose aux administrateurs l'obligation de faire preuve de compétence ou d'aptitude — l'obligation d'agir avec un certain niveau de compétence — ainsi que l'obligation de faire preuve de diligence. L'obligation de faire preuve de compétence et de diligence doit respecter une certaine " norme de diligence ".

Quel niveau ou genre de compétence un administrateur doit-il démontrer? Quel niveau ou genre de diligence?

Pour les sociétés sans but lucratif, les réponses à ces questions se trouvent dans l'une ou plusieurs des sources suivantes :

  • la législation en vertu de laquelle la société est constituée;
  • les jugements des tribunaux qui ont tenté de définir la norme de diligence attendue des administrateurs;
  • les lois sur les entités non constituées en personne morale qui imposent d'autres devoirs spécifiques aux administrateurs;
  • la législation sur les fiducies, pour les administrateurs d'une société sans but lucratif constituée à des fins de bienfaisance;
  • au Québec, les devoirs des administrateurs énoncés dans le Code civil du Québec.

Il est généralement accepté qu'une norme de diligence plus rigoureuse est attendue des administrateurs d'une société sans but lucratif qui a une mission caritative.

Le devoir de loyauté oblige un administrateur à agir honnêtement et de bonne foi, au mieux des intérêts de la société. Le devoir de loyauté est un devoir personnel et ne peut être délégué (la " règle de non-délégation "). Entre autres conséquences, cela signifie qu'un administrateur ne peut tirer un bénéfice de sa charge (la " règle de l'absence de bénéfice ") et doit éviter de se trouver dans une situation où son devoir envers la société entre en conflit avec ses intérêts (la " règle d'absence de conflit ").

La responsabilité civile des administrateurs
En loi, une société est une entité juridique distincte. Elle possède une personnalité juridique distincte de celle des administrateurs, des membres et des autres parties intéressées. À ce titre, la société peut posséder des biens, conclure des contrats, avoir une responsabilité subsidiaire pour les fautes civiles (" délits ") causées par ses employés et intenter des actions et faire l'objet de poursuites devant les tribunaux. Ainsi, elle est dotée d'une " capacité juridique civile ". Les administrateurs et les membres ne sont généralement pas personnellement responsables des contrats et des délits de la sociéténote 1. Lorsqu'un administrateur signe dûment un contrat au nom de la société, seule la société est liée, non l'administrateur. En règle générale, lorsqu'un employé d'une société commet un délit, seule la société (à titre d'employeur) et l'employé sont responsables, non les administrateurs.

Les administrateurs sont toutefois responsables des manquements à leur obligation fiduciaire envers la société. Ils peuvent aussi être tenus personnellement responsables de manquements à un nombre croissant de dispositions législatives qui leur imposent une responsabilité à titre d'administrateurs (voir le chapitre 3). Les administrateurs sont aussi responsables des délits qu'ils commettent eux-mêmes, même s'ils sont commis dans l'exercice de leurs responsabilités à titre d'administrateur. De façon générale, si un administrateur commet un délit, le fait qu'il ait agi en qualité d'administrateur au moment où le délit a été commis ne constitue pas une excuse.

Le devoir de loyauté

(A) Le devoir de compétence ou d'aptitude
En s'acquittant de leurs obligations, les administrateurs des sociétés sans but lucratif doivent exercer un degré approprié de compétence. En common law, une norme " subjective " s'applique aux administrateurs des sociétés sans but lucratif ctituées en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes ou d'une loi provinciale sur la constitution en société, à moins que ces lois ne précisent une norme différente. Dans certaines provinces, ce qui a été décrit comme une norme de compétence "objective " est défini en loi. Cette norme est examinée ci-dessous. La norme subjective oblige un administrateur :

…à exercer un degré de compétence et de diligence qui équivaudrait à la diligence raisonnable que l'on pourrait attendre d'une personne ordinaire dans ces circonstances, mais il n'a pas à démontrer en s'acquittant de ses obligations un degré de compétence plus élevé que celui que l'on attendrait d'une personne possédant ses connaissances et son expériencenote 2.

Cette norme est subjective dans la mesure où elle fait référence aux capacités de l'administrateur. Puisque la norme est subjective, elle peut être appliquée différemment aux membres du conseil d'administration d'une société. Ainsi, un avocat ou une personne ayant l'expérience des affaires sera assujettie à une norme de diligence plus rigoureuse qu'une autre personne qui possède une formation ou une expérience moins poussée.

Par contre, en vertu d'une norme objective de diligence, tous les membres du conseil — peu importe leurs antécédents ou leur expérience — sont jugés selon les mêmes critères. La norme objective la plus couramment employée est celle de la conduite que l'on pourrait attendre d'une personne raisonnablement prudente. Une norme objective plus rigoureuse, qui n'a jamais été appliquée par un tribunal, est la conduite que l'on pourrait attendre d'un administrateur raisonnable.

Même si la norme subjective de diligence s'applique, cela ne signifie pas que l'administrateur qui possède une compétence ou une expérience plus limitée échappera à toute responsabilité. L'approche traditionnelle est qu'un tel administrateur est tenu d'agir conformément à la ligne de conduite que l'on attend d'une personne raisonnablement prudente. Cela signifie qu'un administrateur qui n'a pas les compétences requises pour se conformer à cette norme est dans l'obligation d'acquérir ces compétences ou certaines d'entre elles. Un administrateur doit ainsi se renseigner, s'il ne l'est pas déjà.

L'absence de jurisprudence dans ce domaine signifie qu'il est impossible de déterminer avec certitude les distinctions qui seraient faites par les tribunaux entre les normes de diligence subjective et objective. Puisque les tribunaux ont généralement respecté les décisions d'affaires, et devant la difficulté de lier une décision au niveau particulier de compétence d'un administrateur ou d'un groupe d'administrateurs, l'écart entre les deux normes pourrait être plus apparent que réel.

Malgré tout, lorsque la norme objective s'applique, il peut être plus difficile d'attirer des candidats hautement qualifiés, expérimentés ou possédant une formation professionnelle pour siéger au conseil d'administration d'une société sans but lucratif.

Cependant, la common law a imposé certaines limites raisonnables à ce que l'on peut attendre des administrateurs :

  • un administrateur n'est pas responsable des simples erreurs de jugement dans la conduite des affaires (par Exemple la décision réfléchie de poursuivre une stratégie commerciale particulière après avoir fait une évaluation honnête et de bonne foi);
  • les administrateurs ont raison de confier certaines questions commerciales aux dirigeants de la société;
  • les administrateurs ont raison, en l'absence de motifs de soupçon, de faire confiance aux dirigeants de la société pour qu'ils s'acquittent honnêtement de leurs devoirsnote 3.

En pratique, les règles suivantes s'appliquent :

  • Les administrateurs devraient prendre les décisions qui concernent la société en tenant pleinement compte de tous les éléments pertinents et en demandant conseil à des professionnels au besoin.
  • Les administrateurs devraient superviser tous les aspects des opérations de la société.
  • Les administrateurs peuvent déléguer certaines fonctions à des cadres supérieurs clés, mais ils doivent conserver un rôle de supervision.

Le conseil d'administration est responsable de l'examen périodique du rendement des cadres supérieurs à qui il a confié l'exécution au jour le jour du mandat de la société.

(B) Le devoir de diligence

Synopsis
Le devoir de diligence oblige un administrateur à assister aux réunions et à être aussi pleinement informé que possible sur tous les aspects de la société, y compris toute question qui la concerne.

Les administrateurs ont un devoir de diligence dans la gestion des affaires de la société qui les oblige, dans la mesure du possible, à assister régulièrement aux réunions du conseil et à acquérir une connaissance approfondie de tous les aspects de la société. Tel qu'indiqué précédemment, la Loi sur les corporations canadiennes n'oblige pas les administrateurs à posséder un niveau particulier de compétence. Ils sont uniquement tenus d'agir en fonction des connaissances et du niveau de compétence qu'ils possèdent.

Le devoir de diligence a trait à l'obligation faite aux administrateurs de se renseigner sur le mandat de la société et tous les aspects de son fonctionnement. Il ne suffit donc pas d'assister aux réunions du conseil d'administration. Le devoir de diligence requiert un effort actif et concerté de la part des administrateurs pour qu'ils se renseignent et soient prêts à prendre des décisions informées au sujet de la société.

Conséquences pratiques
Le devoir de diligence comporte un certain nombre de conséquences pratiques. Les administrateurs devraient :

  • s'assurer que le conseil d'administration se réunit périodiquement;
  • assister aux réunions du conseil d'administration dans tous les cas où ils peuvent raisonnablement le faire;
  • être pleinement informés de toute décision que doit prendre le conseil. Aussi, et ce suffisamment longtemps avant la tenue de la réunion du conseil, s'assurer qu'on leur remet tous les documents pertinents, y compris les conventions et les données financières, les avis juridiques et les autres renseignements nécessaires pour prendre une décision informée, en toute connaissance de cause, à la réunion du conseil;
  • exercer un jugement indépendant au moment de voter sur toute question touchant à la société, et non de voter simplement avec la majorité sans raison bien valable;
  • s'assurer que les procès-verbaux des réunions de la société traduisent avec exactitude tous les commentaires et les votes opposés aux décisions prises;
  • examiner attentivement tous les rapports afférents aux affaires financières de la société, y compris les états financiers provisoires et de fin d'exercice;
  • avec l'aide des cadres supérieurs, examiner attentivement le budget annuel et le plan stratégique et participer à leur formulation;
  • bien comprendre les objets déclarés de la société, tels qu'énoncés dans ses lettres patentes, et s'y conformer;
  • bien comprendre et s'acquitter de leurs obligations en vertu des règlements administratifs de la société, y compris l'exigence de convoquer une assemblée générale annuelle et de fournir de l'information aux membres à cette assemblée;
  • exiger de la direction qu'elle leur remette toute information sur les opérations et les programmes;
  • surveiller et superviser le chef de la direction et évaluer périodiquement son rendement;
  • connaître toutes les politiques internes touchant à l'organisation et s'assurer que certaines politiques essentielles sont adoptées (par Exemple une politique de placements et une politique sur les conflits d'intérêts);
  • connaître les lois qui touchent à la société et obtenir les avis juridiques et comptables requis.

Présence aux réunions du conseil
Bien que les administrateurs ne soient pas légalement tenus d'assister aux réunions du conseil, une absence répétée constituera vraisemblablement un manquement au devoir de diligence d'un administrateur.

Dans la plupart des provinces et en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes, les administrateurs ne peuvent voter ou participer aux réunions du conseil par procuration. Cela constitue la reconnaissance en loi de l'importance d'une participation entière des administrateurs aux réunions du conseil d'administration. L'examen des questions qui se posent et la participation aux délibérations sont des aspects essentiels du rôle de l'administrateur; il ne peut s'acquitter de sa responsabilité simplement par procuration.

Sélection
Les allégations d'abus sexuel, physique et/ou psychologique de la part du personnel ou de bénévoles de sociétés sans but lucratif sont de plus en plus fréquentes. Devant ce constat, et notamment lorsque la société traite avec une population cliente vulnérable, les administrateurs doivent se demander si leur devoir de diligence les oblige à s'assurer que l'organisation se soucie de cette question d'une façon ou d'une autre. Cela pourrait vouloir dire d'appliquer un protocole de sélection (voir le chapitre 6 pour plus de détails sur la sélection).

Jusqu'à maintenant, aucun tribunal n'a conclu qu'un administrateur ne s'était pas acquitté de son devoir de diligence parce des mesures de sélection ou autres n'avaient pas été prises par le conseil d'administration afin de réduire le risque de tels abus. Cependant, compte tenu de l'importance que prend cette question et des jugements où des sociétés sans but lucratif se sont vues imposer une responsabilité significative dans des affaires récentes, il se peut que, dans l'avenir, les tribunaux tiennent les administrateurs responsables si leur société n'a pas pris des mesures afin de réduire le risque de comportement abusif.

(C) Sociétés à vocation caritative
Administrateurs de sociétés sans but lucratif à vocation caritative

Synopsis
Lorsqu'une société sans but lucratif est aussi un organisme caritatif (une " société de bienfaisance "), onpourrait exiger des membres du conseil d'administration qu'ils répondent à des attentes plus rigoureuses qui vont au-delà de la norme de diligence qui s'applique généralement aux administrateurs de ces conseils. Ceci notamment lorsque les activités de la société se déroulent partiellement ou entièrement en Ontario.

La loi n'est pas claire sur la mesure dans laquelle les administrateurs de sociétés de bienfaisance sont considérés comme des fiduciaires. De façon générale, cependant, les administrateurs des sciétés de bienfaisance devraient respecter la norme de diligence que l'on attend d'une personne responsable d'un bien faisant l'objet d'une fiducie — une " norme fiduciaire ".

Parmi les exigences qui accompagnent une telle norme, les administrateurs devraient démontrer un degré de compétence et de prudence comparable à celui dont ferait preuve un homme ou une femme d'affaires raisonnable dans la conduite de ses propres affairesnote 4. La " norme fiduciaire " est généralement considérée comme plus exigeante en loi et elle va bien au-delà de ce que l'on attend ordinairement d'un administrateur d'une société sans but lucratif ou à but lucratif.

Les administrateurs devraient être conscients du fait qu'une société n'a pas à être enregistrée à titre d'organisme de bienfaisance auprès de l'Agence des douanes et du revenu du Canada pour être considérée comme une oeuvre de bienfaisance en common law. En Ontario, la position adoptée par le Bureau du Curateur public général est que tous les fonds confiés à une société sans but lucratif de bien public, au sens de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance, sont des sommes données à des fins de bienfaisance. À ce titre, les personnes responsables de la gestion de ces sommes doivent se comporter comme si elles en étaient fiduciaires. Au Québec, il n'existe pas une telle norme plus rigoureuse pour les administrateurs.

Devoirs spécifiques liés aux fonds en fiducie à des fins spéciales
Les administrateurs de sociétés à vocation caritative ont des responsabilités particulières liées aux fiducies à des fins spéciales, par Exemple les fonds en fiducie à usage restreint et les fonds en fiducie à des fins spéciales. Lorsque la société détient des sommes ou des avoirs en vertu de telles fiducies, sa capacité de les utiliser est rigoureusement limitée.

Voici certaines situations où des administrateurs peuvent être trouvés coupables d'avoir manqué à leur obligation fiduciaire :

  • La société à vocation caritative couvre des dépenses d'exploitation ou d'administration de la société à même des fonds versés par un donateur pour être affectés à un programme de bfaisance particulier.
  • La société à vocation caritative utilise les fonds recueillis lors d'une collecte de fonds publique pour des fins de bienfaisance différentes de celles communiquées au public, sans avoir obtenu l'autorisation du tribunal.
  • La société à vocation caritative place des fonds dans une fondation perpétuelle alors que le donateur voulait que ces fonds soient dépensés en totalité dans le cadre d'un programme actuel de la société.
  • La société à vocation caritative fait un prélèvement sur le capital d'un fonds de dotation que le donateur voulait que ces fonds soient détenus à perpétuité.
  • La société à vocation caritative emprunte de l'argent d'un fonds en fiducie à des fins de bienfaisance assorti de restrictions par le donateur, même lorsqu'elle a l'intention de rembourser cet argent avec les intérêts courus.

Exemple
Une fiducie à des fins spéciales est établie pour financer une conférence éducative. Si un donateur est incité à penser, par la société, que son don sera employé pour financer la conférence, une fiducie spéciale à des fins de bienfaisance est créée et l'argent versé doit être utilisé à cette fin. Cela s'applique aussi lorsqu'une fondation est établie à une fin particulière ou qu'elle est assujettie à l'exigence que les sommes versées soient détenues pour une période de temps donnée.

Lorsqu'une société à vocation caritative détient des fonds en fiducie à usage restreint ou des fonds d'une fondation, la société et ses administrateurs peuvent être considérés ou traités comme fiduciaires de ces avoirs. Leur devoir premier est de s'assurer que les restrictions qui se rattachent à cette fiducie de bienfaisance à des fins spéciales soient respectées. En d'autres mots, ils doivent s'assurer que le don est utilisé aux fins pour lesquelles il a été versé et à aucune autre fin.

Si une société à vocation caritative ne se conforme pas aux modalités d'une fiducie à des fins spéciales, tous les administrateurs de la société se retrouveront en violation de leur obligation de fiduciaire. À titre personnel, individuellement et collectivement, ils seront alors responsables avec la société du montant complet de la perte subie par le fonds en fiducie en conséquence du non-respect des conditions dela fiducienote 5.

Les conditions imposées par des donateurs à leurs dons n'auront pas toujours pour résultat que le don deviendra une fiducie à des fins spéciales ou une autre forme de don assorti de restrictions. Chaque situation doit être analysée afin de déterminer si la restriction est suffisante pour constituer une fiducie à des fins spéciales. En cas d'incertitude quant à la possibilité qu'une fiducie à des fins spéciales ou qu'un don assorti de restrictions ait été créé, il y aurait lieu d'obtenir un avis juridique approprié.

Conséquences pratiques
Le devoir de diligence plus rigoureux imposé aux administrateurs des organismes de bienfaisance comporte un certain nombre de conséquences pratiques. Les administrateurs de ces organismes devraient jouer un rôle actif dans la gestion des avoirs de leur société afin de s'acquitter de ce devoir de diligence plus exigeant. Cela signifie que les administrateurs devraient, à tout le moins :

  • superviser activement les activités de la société et s'assurer que tous les programmes soient atorisés par les objets de bienfaisance de la société;
  • superviser le programme de collecte de fonds de la société afin de se familiariser avec les méthodes de levée de fonds utilisées par le personnel ou par des collecteurs de fonds professionnels, lesquelles pourraient entraîner la création d'un fonds en fiducie à des fins spéciales;
  • connaître les modalités de tout fonds en fiducie à des fins spéciales et s'y conformer;
  • solliciter une ordonnance du tribunal pour modifier les conditions d'une fiducie créée à des fins spéciales lorsque les conditions de cette fiducie ne peuvent plus être respectées par la société à vocation caritative;
  • s'assurer que tous les dons de bienfaisance, en particulier les fiducies à des fins spéciales, qui ne doivent pas être affectés à des fins immédiates, soient investis de façon appropriée;
  • investir les biens provenant de dons conformément aux lettres patentes de la société à vocation caritative et si les lettres patentes ne traitent pas de ce point, investir conformément à la loi provinciale sur les fiducies (par Exemple la Loi sur les fiduciairesnote 6 en Ontario);
  • s'acquitter de leur devoir de protéger et de conserver les biens en fiducie confiés à leur administration;
  • tenir des livres de comptes appropriés sur les affaires de la société, y compris les fonds en fiducie à des fins de bienfaisance assortis de restrictions par leurs donateursnote 7;
  • ne jamais se placer en conflit d'intérêts dans l'accomplissement des devoirs qui incombent aux administrateurs de la société.

Le devoir de loyauté

Synopsis
Les administrateurs doivent agir honnêtement et debonne foi dans ce qu'ils croient raisonnablement être les meilleurs intérêts de la société.

Tel qu'indiqué précédemment, l'administrateur d'une société sans but lucratif se trouve dans la position d'un fiduciaire. En conséquence, il est présumé agir dans l'intérêt de la société et doit subordonner ses intérêts personnels à ceux de la société. Au Québec, les administrateurs doivent, en loi, " agir avec honnêteté et loyauté dans l'intérêt de la personne morale note 8, ce qui est la codification en droit civil des devoirs de fiduciaire de la common law.

Ce devoir de loyauté suppose la bonne foi et une confiance spéciale, peu importe que la société soit une entreprise commerciale ou une société sans but lucratif. Il impose des normes rigoureuses d'honnêteté et de bonne foi dans l'exercice des attributions et pouvoirs d'un administrateur. Cela signifie qu'un administrateur doit toujours exercer ses pouvoirs au mieux des intérêts de la société. L'administrateur ne peut déléguer son devoir, sauf dans certaines circonstances et sous supervision adéquate; l'administrateur ne doit pas profiter de son poste et doit toujours dévoiler toute la vérité dans ses opérations avec la société; enfin, il doit éviter tout conflit d'intérêts.

En aucun cas un administrateur ne pourra s'acquitter de ses obligations relatives au devoir de diligence s'il agit de mauvaise foi. La malhonnêteté intentionnelle, les représentations partielles ou trompeuses et les actes fondés sur un motif illégitime peuvent tous être qualifiés de mauvaise foi. L'obligation de " bonne foi " est au coeur de la relation fiduciaire et elle oblige l'administrateur à agir avec une intention nette et dans le but de servir au mieux les intérêts de la société.

Les administrateurs ne peuvent abuser de leurs pouvoirs en les exerçant à une fin illégitime — pour se obtenir un avantage, pour procurer un avantage à quelqu'un d'autre ou pour exercer une discrimination indue à l'endroit d'une personne — si leur acte n'est pas justifié par les meilleurs intérêts de la société.

À titre d'Exemple, ils ne peuvent utiliser leur pouvoir pour admettre uniquement des membres qui leur sont sympathiques ou refuser d'admettre ou expulser des membres pour le motif qu'ils ne le sont pas.

Non seulement de tels actes répréhensibles pourraient être rejetés par un tribunal, mais ils risqueraient d'entraîner la responsabilité personnelle des administrateurs envers la société et les personnes ayant subi un préjudice.

Conséquences pratiques
Le devoir d'honnêteté et de bonne foi a diverses conséquences pratiques. Les administrateurs doivent :

  • dévoiler toute la vérité sur leurs opérations avec la société et s'employer activement à éviter tout acte répréhensible ou malhonnête;
  • adhérer pleinement à la mission de la société et en promouvoir la cause;
  • démissionner de leur poste s'ils ont quelque préjugé ou croyance personnelle non compatible avec la mission de la société et qui pourrait entrer en conflit avec les devoirs qu'ils ont envers la société;
  • placer les intérêts de la société avant leur intérêt personnel dans toute transaction avec la société, et s'employer activement à éviter tout conflit d'intérêts potentiel;
  • remplir toutes les obligations de la société en matière de rapports, avec honnêteté et de bonne foi, et représenter fidèlement la situation financière et autre de la société;
  • maintenir des livres de comptes, des registres et des procès-verbaux adéquats et exacts pour la société;
  • s'assurer que toutes les décisions de la société soient mises en oeuvre conformément à la résolution applicable du conseil;
  • présenter fidèlement les programmes et les objectifs de la société au public et à toute autgouvernementale qui en fait la demande;
  • ne pas divulguer d'information acquise dans l'exercice de leur fonction d'administrateur qui pourrait nuire aux intérêts de la société et qui n'est pas déjà connue du public;
  • respecter les conditions et les restrictions de tout fonds en fiducie à des fins spéciales maintenu par la société, honnêtement et de bonne foi.

Non-délégation

Synopsis  
Un administrateur ne doit pas déléguer la responsabilité générale qu'il a de diriger la société. Dans certaines circonstances, il est autorisé à déléguer certaines tâches particulières liées à la gestion de la société, pourvu qu'il y ait une supervision appropriée de la partie à qui la tâche a été déléguée.

Les administrateurs ont le droit de déléguer certaines de leurs responsabilités à des comités, des dirigeants ou des membres de la société. Au Québec, les administrateurs des sociétés constituées en vertu de la Loi sur les compagnies ne peuvent déléguer leur pouvoir à un comité autre que le comité exécutif formé exclusivement d'administrateurs et créé en vertu d'un règlement administratif adopté par les deux tiers des membres présents à une assemblée spéciale. Dans d'autres sphères de compétence, la délégation des pouvoirs ne fait pas l'objet d'une telle règle, mais une délégation générale — manifestement lorsqu'un administrateur a l'intention de confier l'ensemble de ses responsabilités à une autre personne — n'est jamais permise. Une telle action usurperait le rôle des membres de la société dans l'élection des administrateurs.

Le fait qu'un administrateur ait délégué une tâche particulière ne le soustrait pas à sa responsabilité et il devrait toujours superviser l'exécution de cette tâche. Les administrateurs devraient se rappeler qu'ils sont redevables, en bout de ligne, de la gestion générale de l'organisation.

La délégation des responsabilités principales, par Exemple accorder au comité exécutif le pouvoir d'engager la société, devrait être envisagée dans le cadre d'un règlement administratif. Si une telle délégation n'est pas mentionnée dans les règlements administratifs ou dans une résolution explicite de l'ensemble du conseil d'administration précisant les conditions de la délégation, les actions ou les décisions prises par l'organe à qui la délégation a été faite pourraient faire l'objet d'une contestation. De façon générale, plus la portée de la délégation est grande, plus a de poids l'argument selon lequel il est nécessaire de l'inscrire dans les règlements administratifs.

La ligne de démarcation entre les questions de gouvernance et les questions opérationnelles est souvent imprécise. En règle générale, il est préférable de limiter la délégation des fonctions essentielles aux comités du conseil autorisés par voie de règlement administratif. Les autres questions peuvent être déléguées par résolution du conseil d'administration.

Les paramètres de toute délégation, qu'ils soient ou non précisés dans les règlements administratifs, une résolution ou même les deux, devraient indiquer la portée et la durée de la délégation, les exigences relatives aux rapports à soumettre à l'ensemble du conseil d'administration et la relation entre le conseil et l'organe à qui la question a été déléguée. (Voir le chapitre 5 qui renferme plus de détails sur la relation entre le conseil et les divers genres de comités.)

Non-délégation par les administrateurs des organismes de bienfaisance
Lorsque les administrateurs de sociétés à vocation caritative peuvent être considérés comme des fiduciaires, leur capacité de déléguer des décisions en ce qui a trait au traitement des avoirs destinés à des fins de bienfaisance pourrait être encore plus limitée. En common law, les fiduciaires ne peuvent déléguer de telles décisions. Dans certaines sphères de compétence, la délégation par des fiduciaires de certains aspects de leur responsabilité est permise, sous réserve des restrictions énoncées dans la loi ou la réglementation provinciale sur les fiducies.

La règle d'absence de bénéfice et la règle d'absence de conflit

Synopsis
Les administrateurs doivent agir avec loyauté en tout temps. Le devoir de loyauté oblige les administrateurs à éviter rigoureusement tout conflit d'intérêts. Les administrateurs ne peuvent profiter d'une façon quelconque de leur relation avec la société. S'ils le font, ils doivent rendre compte à la société de l'avantage reçu. Les administrateurs ne peuvent se placer en situation où leur devoir d'administrateur entre en conflit avec leurs intérêts ou leurs obligations envers d'autres.  

Un administrateur doit faire preuve d'une loyauté entière envers la société qu'il sert. Les administrateurs ne devraient pas se placer dans une situation qui pourrait entraîner un conflit entre leur devoir d'agir au mieux des intérêts de la société et leur intérêt personnelnote 9. En termes généraux, cela veut dire qu'un administrateur ne devrait pas avoir d'intérêt personnel dans un projet de contrat avec la société. Un administrateur ne devrait pas non plus profiter personnellement des occasions qui se présentent en raison de ses liens avec la société.

Si un conflit d'intérêts peut surgir dans de nombreuses circonstances, il y a généralement deux façons pour un administrateur de se retrouver en conflit d'intérêts :

  • un conflit personnel entre le devoir qu'a l'administrateur d'agir au mieux des intérêts de la société et son intérêt propre, par Exemple lorsqu'un administrateur peut tirer un gain financier d'un projet de contrat entre lui-même (ou son entreprise) et la société;
  • un conflit avec les obligations envers quelqu'un d'autre, lorsque les devoirs d'un administrateur à l'égard de la société qu'il sert entrent en conflit avec ses devoirs envers une autre personne ou société. Cela peut survenir lorsqu'une personne est administrateur de deux sociétés, ou lorsque l'administrateur d'une société sert une autre société dans une autre fonction et que les deux sociétés sont engagées dans une ou plusieurs transactions.

Conflits d'intérêts personnels
Les administrateurs ne devraient pas se placer dans une situation qui engendrerait un conflit entre leur devoir d'agir au mieux des intérêts de la société et leur intérêt personnelnote 10.

Les tribunaux ont montré très peu de souplesse sur ce point en insistant pour que les administrateurs évitent non seulement de se retrouver en conflit d'intérêts réel, mais qu'ils évitent aussi toute apparence de conflit d'intérêts. Le principe de common law en ce qui a trait aux conflits impliquant des administrateurs est simple — les administrateurs ne peuvent avoir d'intérêt dans un contrat ou une transaction que s'apprête à conclure la société.

Exemple
Un administrateur qui postule un emploi ou qui est recruté au sein du personnel ou qui tente d'obtenir du travail à contrat pour une société dont il est administrateur est en conflit d'intérêts personnel.

Cette restriction peut s'étendre aux cas où des parents ou amis d'un administrateur pourraient recevoir un avantage. Cela peut inclure aussi des occasions engendrées par la société dont l'administrateur est informé avant les autres et dont il tire avantage au détriment de la société.

Exemple
Un administrateur qui met sur pied sa propre société pour exploiter le marché potentiel reconnu dans des études réalisées par la société dont il est un administrateur se trouve en conflit d'intérêts personnel.

L'intérêt personnel peut englober une situation où l'administrateur est en mesure de tirer un gain personnel, directement ou indirectement par l'intermédiaire d'une entreprise ou d'une société participant à la transaction.

Dans certains cas — mais non dans le cas des sociétés à vocation caritative ou lorsque les administrateurs peuvent être considérés comme des fiduciaires — un avantage par ailleurs indu profitant à un administrateur peut être permis. La loi en vertu de laquelle la société a été constituée peut prévoir la " ratification " de contrats dans lesquels l'administrateur détient un intérêt. Ces dispositions obligent habituellement l'administrateur à déclarer son intérêt et à s'abstenir de voter. Le contrat peut ensuite aller de l'avant et l'administrateur peut conserver l'avantage qu'il a reçu.

Si les statuts constitutifs de la société sans but lucratif ne prévoient pas de modalités pour " ratifier " un contrat et qu'un administrateur détient un intérêt dans un contrat conclu avec la société, celle-ci peut recouvrer auprès de l'administrateur les bénéfices qu'il a touchés par suite du contrat. Lorsque la société est un organisme de bienfaisance ou lorsque les administrateurs peuvent être considérés comme des fiduciaires, la législation sur les fiducies interdit la " ratification " de ce genre de transaction.

En Ontario, les administrateurs de sociétés à vocation caritative ne peuvent, en common law, toucher quelque avantage que ce soit, directement ou indirectement, découlant de leur fonction d'administrateur ou autrement. Cela signifie que l'administrateur d'une telle société ayant des activités en Ontario ne peut habituellement profiter de la ratification de contrats dans lesquels il détient un intérêt si cela lui procure directement ou indirectement un avantage.

Lorsqu'un administrateur est en conflit d'intérêts et qu'il néglige d'agir de façon appropriée (c'est-à-dire en déclarant le conflit d'intérêts et en suivant la procédure prévue dans la législation sur la constitution en société), il doit rembourser à la société tout avantage découlant de la transaction.

Conflit avec les devoirs envers une autre personne ou organisation
Un conflit d'intérêts peut survenir lorsque les devoirs d'un administrateur envers la société qu'il sert entrent en conflit avec les obligations qu'il a envers une autre personne ou organisation.

Lorsqu'une personne siège au conseil d'administration de deux sociétés ou est administrateur d'une société et fait partie du personnel ou sert autrement une autre organisation qui fait des affaires avec la première, les devoirs de cette personne envers les deux entités peuvent engendrer un conflit d'intérêts. Cela peut survenir si les intérêts des deux entités ne sont pas en harmonie et si l'administrateur ne peut s'acquitter de ses obligations envers l'une sans agir au détriment des intérêts de l'autre.

Exemple
Un administrateur d'une société qui est aussi un employé d'une organisation qui verse des fonds à la société peut se retrouver en conflit d'intérêts lorsqu'il tente d'influencer l'utilisation des fonds d'une façon qui pourrait ne pas servir au mieux les intérêts de la société.

Un conflit d'intérêts peut aussi surgir en raison des obligations conflictuelles d'une personne envers deux sociétés dont elle est administrateur, ou lorsque cette personne est administrateur d'une société et à l'emploi ou autrement au service d'une autre organisation (par opposition avec un conflit suscité par une transaction ou un contrat particulier).

Lorsqu'un conflit d'intérêts organisationnel devient apparent à une réunion du conseil d'administration, l'administrateur devrait dévoiler ce conflit. Il devrait alors quitter la pièce où se déroule les délibérations et s'abstenir de voter sur toute question qui influe sur l'autre société dont il est administrateur ou employé. Si le conflit ne peut être résolu, l'administrateur peut être obligé de démissionner de l'une ou des deux sociétés.

Exemple
Il peut survenir qu'une organisation affiliée est représentée au conseil d'administration d'une société. À mesure que les mandats des deux organisations évoluent, l'une des organisations peut vouloir cesser de fournir un soutien ou des services complémentaires pour devenir le fournisseur exclusif de services. La question de la fusion des deux organisations ou de l'intégration de l'une d'elles à l'autre peut alors se poser. Une fois cette option envisagée, il peut être impossible pour la personne de continuer à occuper les deux fonctions.

Tant la société que les administrateurs devraient disposer d'une politique claire qui s'appliquerait dans l'éventualité d'un conflit d'intérêts. Cependant, la validité juridique d'une politique permettant au conseil de ne pas tenir compte d'un conflit d'intérêts en violation de ses obligations fiduciaires serait douteuse.

Exonération des conflits d'intérêts dans les lois sur la constitution en société
Pour les organisations constituées en société en vertu de la loi fédérale, les conflits d'intérêts découlant d'une transaction particulière peuvent être assujettis aux dispositions correctives de la loi en vigueur. Certaines lois provinciales applicables aux sociétés, comme le Code civil du Québecnote 11, prévoient aussi des modalités pour régler ces conflits d'intérêts. Les conflits d'intérêts de nature non contractuelle doivent être réglés d'une autre façon.

En vertu de l'article 98 de la Loi sur les corporations canadiennes, un administrateur a le devoir de déclarer son intérêt direct ou indirect dans un contrat ou un projet de contrat avec la société à une réunion du conseil d'administration. La Loi énonce certaines exigences minimales pour régler le conflit. La procédure décrite dans la loi peut s'appliquer dans les situations où un administrateur :

  • détient un intérêt personnel dans un projet de contrat avec la société;
  • détient un intérêt dans un contrat avec la société parce qu'il est employé ou autrement au service d'une autre société avec laquelle la société s'apprête à conclure un contrat;
  • détient un intérêt dans un contrat avec la société en raison du fait qu'il est aussi administrateur d'une autre société avec qui la société s'apprête à conclure un contrat.

Dans ce dernier cas, même si la procédure est appliquée, le contrat pourrait ne pas être valide en loi si le chevauchement entre les deux organisations est tel qu'une majorité des membres du conseil d'administration de la société contractante sont aussi administrateurs de l'autre société.

Lorsqu'une société sans but lucratif constituée en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes souhaite conclure un contrat avec une autre société ou entreprise dont l'un des administrateurs détient un intérêt direct ou indirect dans le contrat, les modalités suivantes s'appliquent :

  • Dans le cas d'un projet de contrat, l'administrateur doit déclarer son intérêt à la réunion du conseil d'administration à laquelle la question de la conclusion de ce contrat est envisagée pour la première fois.
  • Lorsqu'un administrateur acquiert un intérêt dans un contrat après que celui-ci ait été conclu, la déclaration doit être faite à la première réunion des administrateurs à se tenir après que l'administrateur ait acquis cet intérêt.
  • La déclaration de l'intérêt d'un administrateur peut prendre la forme d'un avis général aux administrateurs de la société à l'effet que l'administrateur est un actionnaire ou détient un autre intérêt dans l'autre société ou entreprise, ou qu'il est membre d'une entreprise et qu'il doit être considéré comme ayant un " intérêt " dans tout contrat conclu par la société avec cette autre société ou entreprise.
  • L'administrateur qui a déclaré un conflit ne devrait pas participer au vote sur tout contrat dans lequel il détient un intérêt.
  • L'interdiction de voter dans ces circonstances ne s'applique pas 1) dans le cas de tout contrat passé par la société afin d'accorder aux administrateurs une garantie sur des avances de fonds ou en guise d'indemnisation (par Exemple lorsque le conseil d'administration approuve l'achat d'une assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants); 2) lorsqu'il n'y a pas quorum des administrateurs en fonction qui ne détiennent pas un intérêt dans un contrat donné (voir précédemment : un tel contrat pourrait être considéré non valide en loi); ou 3) si l'administrateur est un dirigeant ou un administrateur de l'autre société et qu'il détient uniquement le nombre d'actions requis pour être admissible à occuper la fonction d'administrateur (par Exemple si l'intérêt de l'administrateur dans l'autre société est limité au nombre minimal obligatoire d'actions devant être détenu par tout administrateur).

Exonération d'un conflit d'intérêts par le tribunal (dans le cas des organismes de bienfaisance)
En Ontario, un administrateur d'une société de bienfaisance qui pourrait retirer un avantage d'un contrat dans lequel il détient un intérêt pourrait ne pas pouvoir continuer à servir la société en qualité d'administrateur sans l'autorisation du tribunal.

Dans la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance, une procédure est prévue pour obtenir l'autorisation du tribunal dans le cas d'un conflit d'intérêts impliquant un fiduciaire. Étant donné qu'en vertu de cette loi, les administrateurs des sociétés de bien public de l'Ontario sont réputés être des fiduciaires, ils sont admissibles à cette exonération discrétionnaire du tribunal.

Le fait de recevoir un avantage personnel d'une société de bienfaisance tout en siégeant au conseil d'administration de cette société est considéré comme un conflit d'intérêts. Par conséquent, pour ce qui est d'une société sans but lucratif de bien public ayant des activités en Ontario :

  • un administrateur ne peut recevoir de paiement pour des services rendus à titre d'administrateur, ou recevoir, directement ou indirectement, tout avantage ou paiement de l'organisme en quelque autre qualité sans l'approbation du tribunal;
  • la société peut uniquement offrir une indemnisation et acheter de l'assurance-responsabilité pour ses administrateurs et dirigeants si ces derniers se conforment aux exigences énoncées dans le règlement 4/01 de l'Ontario en vertu de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance. (Pour plus de détails sur cette question, voir le chapitre 6.)

Cette politique est appliquée, du moins en partie, dans le cadre de la supervision exercée par le Bureau du Curateur public général de l'Ontario.

Un administrateur d'une société de bienfaisance d'une autre province qui pourrait être réputé agir à titre de fiduciaire en raison de la nature d'une affaire de la société peut, dans certains cas, obtenir une exonération du tribunal à l'égard du conflit potentiel sur dépôt d'une requête invoquant le droit des fiducies.

Conséquences pratiques
Le devoir de loyauté et l'obligation d'éviter les conflits d'intérêts comportent un certain nombre de conséquences pratiques. Les administrateurs devraient :

  • démontrer leur allégeance complète envers la mission de la société et en promouvoir la cause;
  • approuver une politique relative aux conflits d'intérêts qui renferme des lignes directrices sur les circonstances dans lesquelles les administrateurs sont considérés être en conflit et sur les recours appropriés dans les cas où ils négligent de divulguer un conflit d'intérêts;
  • ne pas divulguer d'informations acquises dans le cadre de leur fonction d'administrateur qui pourraient nuire aux intérêts de la société;
  • ne pas divulguer ou utiliser d'informations liées aux affaires de la société aux fins d'en tirer un avantage ou un bénéfice personnel;
  • placer les intérêts de la société devant leur intérêt personnel dans toutes leurs opérations avec la société;
  • s'acquitter de toutes leurs fonctions au mieux des intérêts de la société;
  • éviter activement tout conflit d'intérêts et divulguer immédiatement tout conflit de fait ou potentiel, réel ou perçu, au conseil d'administration;
  • s'assurer que le procès-verbal de toute réunion durant laquelle une décision soulevant un conflit d'intérêts potentiel est discutée traduit avec exactitude les opinions de tous les administrateurs en conflit et de ceux qui ne le sont pas;
  • obtenir un avis juridique lorsqu'il y a incertitude quant à l'existence d'un conflit d'intérêts;
  • démissionner lorsqu'ils sont administrateurs de deux sociétés, ou administrateur d'une société et au service d'une autre société, lorsque les intérêts des deux entités sont en conflit et qu'il est apparent que l'administrateur ne peut agir dans l'intérêt de l'une des sociétés sans agir au détriment des intérêts de l'autre.

DEVOIRS ENVERS LES MEMBRES

Les administrateurs ont certains devoirs envers les membres de la société. Ils doivent s'assurer que la société et ses administrateurs agissent conformément aux conditions énoncées dans les lettres patentes et les règlements administratifs, qui ont été interprétés par les tribunaux comme équivalant à un contrat entre la société et ses membresnote 12.

Les administrateurs doivent aussi traiter tous les membres sur un pied d'égalité (par Exemple en fixant et en percevant les droits ou en appliquant les règles et les règlements administratifs), à moins que les intérêts de la société n'exigent clairement d'agir d'une autre façon.

Les administrateurs doivent faire preuve d'une prudence particulière dans le domaine délicat et litigieux des mesures disciplinaires à l'endroit des membres.

Avant de suspendre, mettre à l'amende, expulser ou refuser de réadmettre un membre, les administrateurs doivent s'assurer que les règlements administratifs de la société leur confèrent clairement le pouvoir de le faire et que toutes les étapes de la procédure interne qu'ils ont établie (avis, délais, enquêtes et recommandations par un comité, audience, appel interne, etc.) ont été strictement respectées.

La procédure doit comporter un degré d'équité procédurale raisonnable — c'est-à-dire une procédure équitable et de bonne foi. Le membre visé par une mesure disciplinaire doit recevoir un avis raisonnable et avoir l'occasion d'être entendu (et d'être accompagné d'un avocat) pour présenter sa défense devant les membres du conseil, disposés à être persuadésnote 13. Autrement, la décision du conseil sera assujettie à l'examen du tribunal. Les administrateurs doivent prendre garde de ne pas entacher la réputation du membre, par Exemple en diffusant largement son expulsion et les motifs sous-jacents, ou encore en faisant ratifier des mesures par une assemblée générale des membres alors qu'une résolution du conseil aurait suffi selon les règlements de la société. Les administrateurs pourraient s'exposer personnellement à des poursuites en dommages-intérêts s'ils agissaient ainsi.

Exemples de questions que les administrateurs actuels ou éventuels peuvent poser à l'organisation

  1. Le conseil d'administration se réunit-il à intervalle régulier? À quelle fréquence?
  2. Quel avis et quels préparatifs (par Exemple ordre du jour, rapports, etc.) la société fournit-elle aux administrateurs avant la tenue des réunions du conseil?
  3. La société a-t-elle des politiques écrites, par Exemple une politique sur les conflits d'intérêts et une politique de placements?
  4. La société tient-elle des livres de comptes, des registres et des procès-verbaux des réunions, comme il se doit?
  5. La société donne-t-elle aux membres du conseil des renseignements sur les opérations et les programmes courants?
  6. Comment le conseil assure-t-il la surveillance et la supervision de la personne qui occupe la fonction de directeur général? Le conseil procède-t-il à une évaluation annuelle du rendement de cette personne?

Exemples de questions que les administrateurs peuvent se poser à eux — mêmes

  1. Est-ce que je comprends les devoirs d'un administrateur d'une société sans but lucratif?
  2. Est-ce que j'assiste régulièrement aux réunions du conseil? Est-ce que je me prépare adéquatement en vue de ces réunions? Est-ce que je prends connaissance de la documentation et l'étudie attentivement?
  3. Est-ce que j'exerce un jugement indépendant au moment de voter sur les questions qui concernent la société?
  4. Si je siège au conseil d'administration d'une société de bienfaisance, est-ce que je comprends les responsabilités fiduciaires particulières qui m'incombent?
  5. Suis-je sensible à tout conflit d'intérêts potentiel ou à toute apparence de gain personnel?
  6. Si je siège au conseil en raison de mon affiliation à un groupe intéressé, suis-je conscient que mon affiliation à ce groupe ne peut dicter mon vote sur toute décision du conseil? Suis-je disposé à déclarer un conflit d'intérêts et, dans certains cas, à démissionner si je ne puis concilier mon rôle au sein du groupe intéressé et ma fonction d'administrateur?
  7. Ai-je lu et compris les politiques de la société, notamment sur les placements et les conflits d'intérêts?

Liste de vérification — devoirs

Liste de vérification — devoirs
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Procédures de diffusion des documents  

Président et directeur général  

Annuellement  

Un critère devrait être établi afin de permettre aux membres du conseil de disposer d'un délai suffisant pour examiner la documentation; des limites quant au volume de documents devraient aussi être envisagées lorsque la quantité d'information empêche les administrateurs de lui accorder une attention adéquate.  

2. Registre des présences des administrateurs  

Président et chaque membre du conseil  

Annuellement  

L'administrateur assiste-t-il assez régulièrement pour apporter une contribution raisonnable aux délibérations du conseil?  

3. Rendement de l'administrateur, c'est-à-dire préparation et familiarité avec la documentation distribuée  

Président et chaque membre du conseil  

Annuellement  

L'administrateur participe-t-il régulièrement aux délibérations du conseil et sa participation témoigne-t-elle d'une compréhension informée des questions et de la documentation pertinentes aux sujets abordés?  

4. L'administrateur est-il conscient de ses devoirs et s'en acquitte- t-il?  

Président et chaque membre du conseil  

Lors de la sélection des membres du conseil et annuellement par la suite  

L'administrateur est-il conscient et s'acquitte-t-il de ses obligations juridiques sous l'angle de la compétence, de la diligence, de la loyauté, de l'honnêteté et de la bonne foi et évite-t-il de se placer en conflit d'intérêts?  

5. Y a-t-il d'autres devoirs imposés à l'administrateur en raison de la nature de la société ou de ses activités?  

Président et chaque membre du conseil  

Lors de la sélection des membres du conseil et annuellement par la suite  

L'administrateur est-il conscient des exigences supplémentaires qui peuvent découler, par Exemple, du fait que la société est un organisme de bienfaisance?  

6. Y a-t-il une procédure formelle pour l'évaluation du rendement des administrateurs ou leur renvoi?  

Président, directeur général et/ou comité des nominations  

Annuellement, avant le début du processus de nomination et de scrutin  

L'examen du rendement de l'administrateur peut être institué aux moyens d'une résolution, d'une politique ou d'un autre mécanisme. Une procédure de renvoi des administrateurs devrait être énoncée dans les règlements administratifs.  

7. Les affaires du conseil sont-elles discutées à fond et menées à leur conclusion?  

Ensemble des membres du conseil et directeur général  

Annuellement  

Une rétroaction devrait être demandée aux administrateurs, individuellement et comme groupe. Il pourrait être utile de prévoir un moyen de faire circuler anonymement des commentaires.  

8. Est-il nécessaire d'adopter des politiques particulières qui aideront les membres du conseil à s'acquitter de leurs devoirs?  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Les administrateurs devraient passer en revue leurs devoirs et envisager toute mesure qui faciliterait la conformité entière et informée avec ce qu'ils sont tenus de faire. Y a-t-il une politique sur les conflits d'intérêts? Y a-t-il une politique de sélection?  


* B. Soc., Sci., LL.B., cabinet d'avocats conseillant les organismes de bienfaisance et les organisations sans but lucratif établi à Ottawa.

Chapitre 3 : Responsabilité des administrateurs

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Jane Burke-Robertson *
Avocate et procureure

Introduction

En règle générale, les administrateurs ne sont pas personnellement responsables des contrats ou des actions ou omissions de la société qu'ils servent parce que cette dernière est considérée comme ayant une personnalité juridique distincte en loinote 1. La protection contre la responsabilité accordée aux administrateurs du fait de la constitution en société est souvent appelée le " voile corporatif ".

Cependant, il y a des exceptions à cette règle générale et de nombreuses situations imposent une responsabilité de common law aux administrateurs en vertu de lois fédérales et provinciales et en vertu du Code civil du Québec. Les administrateurs des sociétés sans but lucratif devraient connaître ces exceptions. Le présent chapitre explique la responsabilité à laquelle sont exposés les administrateurs.

Le chapitre est structuré selon les rubriques suivantes :

  • Responsabilité et contrats (a trait aux situations où les administrateurs passent un contrat sans être dûment autorisés, ou au nom d'une société inexistante).
  • Responsabilité délictuelle (a trait aux situations où des actes posés par des administrateurs sont de nature délictuelle).
  • Responsabilité pour manquement à l'obligation fiduciaire (cette question est examinée en détail au chapitre 2).
  • Responsabilité pour manquement aux devoirs de fiduciaire (a trait aux situations où la société est un organisme de bienfaisance ou aux situations où les administrateurs transigent avec des avoirs confiés à une fiducie).
  • Responsabilités en common law (a trait aux administrateurs qui agissent sans en être dûment autorisés par la société).
  • Responsabilités d'origine législative (a trait aux nombreuses obligations imposées aux administrateurs par les lois fédérales et provinciales).

Responsabilité et contrats

Les administrateurs ne sont habituellement pas tenus personnellement responsables des contrats qu'ils signent au nom de la société, pourvu qu'ils aient le pouvoir légal approprié de le faire. Les règlements administratifs de la société devraient renfermer une disposition traitant du pouvoir des administrateurs et des dirigeants d'exécuter des instruments légaux au nom de la société. Habituellement, les règlements administratifs comprennent aussi une clause prévoyant que le conseil d'administration peut adopter une résolution nommant explicitement des administrateurs ou des dirigeants habilités à signer au nom de la société.

À noter, toutefois, que la responsabilité personnelle des administrateurs à l'égard des contrats peut, dans certains cas, survenir en common law ou en vertu d'une loi si la société n'est pas identifiée de façon satisfaisante sur les documents. En common law, une responsabilité peut découler du fait qu'un administrateur prétend conclure un contrat au nom d'une société inexistante. Les dispositions législatives pertinentes sont examinées plus loin dans le présent chapitre.

Responsabilité délictuelle

Un délit est une faute civile reconnue par les tribunaux, même si elle n'est pas envisagée explicitement dans une loi, et pour laquelle la partie qui a subi un préjudice peut réclamer des dommages-intérêts. Les administrateurs ne sont pas personnellement responsables des délits commis dans le contexte d'une société à moins que leur conduite ne soit elle-même délictuellenote 2.

Bien que la jurisprudence soit clairsemée sur cette question, notamment dans le contexte des sociétés sans but lucratif, un cas possible où la conduite d'un administrateur constituerait un délit est celui d'une mauvaise gestion par négligence. Il y a mauvaise gestion par négligence lorsque le préjudice causé à la victime du délit peut être attribué à un manque de diligence dans la supervision d'un aspect des activités de la société. Elle survient dans les situations où le conseil savait ou aurait dû savoir qu'un problème systémique existait et qu'il n'a rien fait pour le régler.

La responsabilité personnelle des administrateurs en cas de délit peut survenir lorsqu'ils ne prennent pas de mesures adéquates pour superviser l'embauche des employés et des bénévoles ou pour surveiller leur conduite dans leur travail au sein de la société, notamment lorsqu'il y a allégation d'abus sexuel d'enfants et/ou de harcèlement des employés.

Exemple
Lorsque les administrateurs permettent qu'une situation non sécuritaire persiste sur la propriété de la société et qu'il s'ensuit un préjudice personnel, cela peut être considéré comme une mauvaise gestion par négligence de la part des administrateurs et entraîner une responsabilité personnelle.

Exemple
Lorsque le conseil d'administration a adopté une politique de communications qui suscite ou qui n'offre pas une protection adéquate contrela diffamation dans les publications de la société - par exemple lorsqu'une stratégie énergique de dénigrement d'un concurrent est avalisée par les administrateurs de la société.

Responsabilité pour manquement à l'obligation fiduciaire

Les administrateurs qui manquent à l'un ou l'autre de leurs devoirs envers la société, tels que décrits au chapitre 2, peuvent s'exposer à une responsabilité si la société subit une perte qui peut être directement attribuée à leurs actions ou omissions. Afin de se protéger contre cette responsabilité, les administrateurs devraient toujours se demander si une décision ou une action prise sert au mieux les intérêts de la société. Ils doivent s'acquitter de leurs devoirs de compétence et de diligence et de leur devoir de loyauté, notamment agir honnêtement et de bonne foi, ne pas déléguer de façon indue leurs responsabilités et éviter de se trouver en conflit d'intérêts.

Responsabilité pour manquement aux devoirs de fiduciaire

Les administrateurs des sociétés à vocation caritative peuvent être exposés à un plus grand risque de responsabilité personnelle que les administrateurs des autres sociétés sans but lucratif.

Le jugement rendu récemment en Ontario (Curateur public général) c. Société d'aide à l'enfance (Ontario)note 3 met en relief la responsabilité fiduciaire des administrateurs des sociétés à vocation caritative dans leur rôle quasi fiduciaire. Le tribunal a statué que ces obligations fiduciaires allaient au-delà de la simple poursuite du mandat de bienfaisance de la société. Le jugement précise que même si les administrateurs d'un organisme de bienfaisance peuvent ne pas être techniquement fiduciaires des biens destinés à des fins caritatives, ils sont, à toute fin pratique, liés par les règles qui régissent les fiduciaires.

Bien qu'il s'agisse d'un jugement de première instance, cette cause montre clairement que les administrateurs des sociétés de bienfaisance ont l'obligation d'affecter les biens de charité à la poursuite du mandat de bienfaisance de la société. Cela veut dire que les administrateurs sont tenus de prendre des mesures préventives pour protéger les biens destinés à des fins caritativesnote 4. Toute perte sur ces biens attribuable à l'inaction ou au défaut d'agir des administrateurs pourrait exposer ces derniers à une responsabilité pour manquement à leurs devoirs de fiduciaire, voire pour abus de confiance.

Risques de responsabilité liés à la rémunération des administrateurs
En common law, du moins en Ontarionote 5, les administrateurs des sociétés de bienfaisance ne doivent toucher aucune rémunération ou avantage direct ou indirect de l'organisme qu'ils servent en qualité d'administrateurs, à moins d'avoir obtenu au préalable l'autorisation du tribunal. Dans d'autres sphères de compétence, la loi n'est pas claire sur l'application d'une telle exigencenote 6. Cela signifie qu'un administrateur d'une société de bienfaisance ne peut être un employé, un entrepreneur, un consultant ou un fournisseur de services professionnels rémunéré de l'organisme, même s'il est rémunéré sous la juste valeur marchande pour les services rendus ou les biens fournis. Dans un tel cas, tant l'administrateur qui reçoit la rémunération que les administrateurs qui l'ont autorisée s'exposeraient à une responsabilité personnelle.

Les lecteurs pourront noter un conflit potentiel entre cette règle et l'article 98 de la Loi sur les corporations canadiennes, cité précédemment, qui permet par ailleurs aux administrateurs des sociétés sans but lucratif de déclarer un conflit d'intérêts dans un contrat ou un projet de contrat avec la société, et qui leur permet de conclure un contrat dans lequel ils détiennent un intérêt personnel. L'approche prudente est de considérer que la règle interdisant la rémunération des administrateurs des sociétés de bienfaisance a préséance sur l'article 98.

La règle interdisant la rémunération ne s'applique pas aux déboursés directs engagés par des administrateurs, par exemple pour les déplacements ou pour d'autres frais de voyage raisonnables. Les administrateurs peuvent se faire rembourser légitimement ces déboursés.

En Ontario, la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance (Ontario)note 7 permet aux organismes de bienfaisance de se prévaloir d'une procédure en vue d'obtenir le consentement du Curateur public général pour permettre aux administrateurs d'une société à vocation caritative de recevoir une rémunération. Mais les organismes de bienfaisance n'utilisent pas souvent ce mécanisme et il est difficile de dire quels cas seront approuvés par le Bureau du Curateur public général.

Ailleurs qu'en Ontario (sauf au Québec), il est possible que l'on puisse s'adresser au tribunal en vertu de la législation sur les fiducies pour obtenir l'autorisation de verser une rémunération. Cependant, ce recours ne semble jamais avoir été mis à l'épreuve devant les tribunaux au Canada.

Responsabilité pour abus de confiance dans la gestion des biens destinés à des fins caritatives
Parce que leurs devoirs sont semblables à ceux des fiduciaires, les administrateurs des sociétés à vocation caritative peuvent être tenus personnellement responsables d'un abus de confiance s'ils gèrent de façon inadéquate les biens destinés à des fins caritatives. Cela signifie qu'ils peuvent être tenus personnellement responsables du plein montant de toute perte d'avoirs destinés à des fins de bienfaisance.

Abus de confiance ayant trait à des décisions d'investissement
Les administrateurs de sociétés à vocation caritative s'exposent à un risque considérable de responsabilité s'ils investissent de façon inappropriée les fonds destinés à des fins caritatives. La responsabilité des administrateurs à cet égard peut découler d'une omission de leur part :

  • de déterminer les pouvoirs d'investissement prévus dans les lettres patentes ou dans la loi spéciale ayant servi à créer la société à vocation caritative et de s'y conformer;
  • de déterminer les pouvoirs d'investissement spécifiés dans les conventions accompagnant un don, par exemple le testament d'un donateur qui fait un don testamentaire ou un accord de donation par lequel un donateur lègue une dotation perpétuelle, et de s'y conformer;
  • de déterminer les pouvoirs d'investissement prévus par la loi provinciale qui s'appliquent aux investissements faits dans une province, habituellement dans la législation sur les fiducies, et de s'y conformer;
  • d'investir conformément aux normes applicables à un investisseur prudent lorsque les dispositions de la législation sur les fiducies s'appliquent, y compris tout critère d'investissement obligatoire en vertu de la Loi;
  • d'élaborer et de mettre en oeuvre un plan d'investissement tel que requis par la législation applicable sur les fiducies;
  • de prendre eux-mêmes les décisions en matière d'investissement ou, dans les provinces qui permettent la délégation de telles décisions, comme en Ontario, de s'assurer qu'un accord de représentation est en place pour la nomination d'un gestionnaire de placements qualifié et qu'il y a sélection et surveillance attentives du gestionnaire de placements.

Les risques de responsabilité auxquels s'exposent les administrateurs en rapport avec le placement des biens d'un organisme de bienfaisance peuvent être élevés et il peut être difficile de se prémunir contre ces risques. La responsabilité peut s'étendre aux pertes découlant de mauvais placements aux occasions d'investissement qui n'ont pas été saisies, et jusqu'aux décisions d'investissement trop conservatrices.

Exemple
À l'évidence d'une récession économique -c'est-à-dire deux trimestres consécutifs de croissance économique négative dans l'économie nationale — les fiduciaires qui négligeraient de revoir leur portefeuille de placements pourraient être considérés comme ayant exposé les avoirs de l'organisme de bienfaisance à un risque indu. Il importe de noter, toutefois, que cela suppose une exigence à deux volets : les administrateurs sont à la fois obligés de se demander si des changements devraient être faits dans le portefeuille de placements et, le cas échéant, de décider de la nature des changements à apporter.

Risques de responsabilité découlant de l'amalgame des fonds conditionnels des donateurs
Les fonds conditionnels des donateurs sont les dons faits à un organisme de bienfaisance avec des restrictions, des contraintes, des conditions, des modalités, des directives ou d'autres facteurs limitatifs imposés par le donateur, qui ont pour effet de contraindre ou de limiter la façon dont un l'organisme peut utiliser les dons en questionnote 8. Les fonds conditionnels des donateurs, aussi appelés fiducies spéciales à des fins de bienfaisance, peuvent englober :

  • les fonds de dotation, c'est-à-dire les dons en capital qui doivent être détenus et placés à perpétuité;
  • les dons à usage restreint, c'est-à-dire les sommes versées à un fonds immobilier;
  • les dons à conserver dix ans, c'est-à-dire les dons en capital devant être détenus pour une période minimale de dix ans conformément aux exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu.

En common law, chaque fonds conditionnel d'un donateur doit être détenu dans un compte distinct des autres fonds en fiducie restreints et ne peut être amalgamé. Toutefois, peu de sociétés à vocation caritative se conforment à cette interdiction de common law contre l'amalgame des fonds à usage restreint.

En Ontario, un règlement a été adopté en vertu de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance pour permettre aux organismes de bienfaisance d'amalgamer les fonds conditionnels des donateurs en un seul compte à des fins de placement. Cependant, les fonds conditionnels ne peuvent être amalgamés avec les fonds généraux de l'organisme. De plus, plusieurs exigences énoncées dans le règlement d'application de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance doivent être respectées avant que les fonds conditionnels de donateurs ne puissent être amalgamés en Ontarionote 9.

L'amalgame des fonds conditionnels des donateurs en contravention de la réglementation en vertu de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance de l'Ontario exposera les administrateurs à la responsabilité personnelle pour abus de confiance. En outre, lorsque la loi d'une autre province ne permet pas l'amalgame des fonds à usage restreint, les administrateurs des sociétés à vocation caritative pourraient s'exposer à la responsabilité même s'ils se conforment à la réglementation de l'Ontario.

Abus de confiance ayant trait au mandat caritatif
Les administrateurs sont tenus d'utiliser les avoirs destinés à des fins caritatives conformément au mandat de la société, énoncé dans les lettres patentes. L'omission de le faire peut exposer les administrateurs à une responsabilité pour abus de confiance.

Violation d'une fiducie spéciale à des fins de bienfaisance liée à un donateur
Les administrateurs peuvent être tenus responsables d'abus de confiance s'ils omettent d'utiliser les fonds conformément aux conditions imposées par les donateurs ou s'ils réaffectent des fonds donnés à une fin particulière, par exemple un fonds immobilier, pour les utiliser à une autre fin, par exemple couvrir les dépenses d'exploitation générales. L'abus de confiance peut aussi survenir si le capital n'est pas détenu et investi dans un fonds de dotation à perpétuité, à moins que le donateur n'ait autorisé la société à vocation caritative à faire des prélèvements sur le capital du fonds.

Responsabilités en common law

Responsabilité pour défaut de compétence
Les administrateurs qui outrepassent leurs pouvoirs définis dans les lettres patentes, les lettres patentes supplémentaires ou d'autres statuts régissant la société sont personnellement responsables de toute décision ou action qu'ils prennent. Cette responsabilité peut découler de lois, de contrats, de délits ou de la common law. De fait, les administrateurs sont réputés avoir pris la décision ou l'action à titre individuel plutôt qu'au nom de la personne morale de sorte que le " voile corporatif " ne s'applique pas.

Responsabilités d'origine législative

De nombreuses lois provinciales et fédérales imposent une responsabilité personnelle aux administrateurs des sociétés sans but lucratif. Les plus communes ont trait aux employés, aux exigences de déclaration, à l'impôt et à la réglementation en matière d'environnement. Les conseils d'administration devraient obtenir un avis juridique afin de déterminer la portée précise de la responsabilité d'origine législative qui les touche. Celle-ci variera selon la nature des activités de la société et la (les) sphère(s) de compétence où se déroulent ses activités. Cette section met l'accent sur certains des domaines où l'on retrouve le plus souvent une responsabilité d'origine législative.

À qui s'applique la responsabilité?
La plupart des lois qui imposent une responsabilité aux administrateurs ne définissent pas le terme " administrateur ". Les personnes qui agissent en qualité d'administrateurs — les administrateurs de fait — mais qui n'ont pas été réellement élues à ce poste peuvent néanmoins être exposées à la responsabilité incombant aux administrateurs. Cela pourrait englober les personnes qui sont administrateurs de fait, celles qui sont nommées d'office et les personnes appelées administrateurs " honoraires ", et celles qui siègent à un comité exécutif ou qui appartiennent à un groupe qui gère les affaires de la société, peu importe le titre qu'on leur donne. Si ces personnes agissent comme des administrateurs, elles peuvent s'exposer à la responsabilité qui échoit aux administrateurs.

Les administrateurs peuvent-ils se soustraire à leur responsabilité en démissionnant?
Démissionner d'un poste d'administrateur ne change rien à la responsabilité à laquelle s'expose un administrateur pour des actes ou des omissions survenus alors qu'il était en fonction. Cependant, la démission limitera la responsabilité éventuelle après la date de la démission et, par ailleurs, déclenchera la période de prescription. La plupart des lois renferment des périodes de prescription prévoyant, par exemple, qu'aucune action ne peut être intentée contre un administrateur après un certain nombre d'années suivant le moment auquel il a cessé d'être administrateur de la société.

Responsabilité des administrateurs en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes
La Loi sur les corporations canadiennesnote 10, selon laquelle toutes les sociétés sans but lucratif d'origine fédérale sont constituées (autres que celles établies par loi spéciale du Parlement du Canada), renferme toute une gamme de devoirs et de responsabilités d'origine législative qui s'appliquent aux administrateurs. De nombreuses lois provinciales sur la constitution en société renferment des dispositions semblables en matière de responsabilité. Les sociétés sans but lucratif constituées en vertu de la loi provinciale devront déterminer les exigences particulières qui s'appliquent à leur cas.

Les administrateurs devraient être plièrement conscients de la responsabilité qui survient dans quatre domaines :

  • les exigences relatives aux déclarations à remettre aux gouvernements;
  • l'identification appropriée de la société;
  • les dispositions relatives à la divulgation des listes de membres;
  • les procédures de liquidation.

Exigences de déclaration
L'omission de transmettre les renseignements requis à Industrie Canada peut déclencher la responsabilité personnelle des administrateurs. Il n'y a pas de prescription ou de défense possible pour un administrateur qui permet ou qui accepte de permettre un manquement à cet égard. Voici les dispositions pertinentes :

  • L'article 133 impose aux sociétés l'obligation de produire une déclaration annuelle le ou avant le 1er juin de chaque année, déclaration qui renferme des renseignements à jour au 31 mars précédent. Les renseignements requis dans la déclaration annuelle sont énumérés au paragraphe 133(1) et le formulaire doit être signé par un administrateur ou un dirigeant de la société. Le paragraphe 133(3) stipule qu'une société qui omet de produire une déclaration annuelle est coupable d'une infraction et passible, sur déclaration sommaire de culpabilité, d'une amende d'au moins vingt dollars et d'au plus cent dollars pour chaque jour que dure cette omission, et tout administrateur ou dirigeant qui, " … sciemment, a autorisé ou permis cette omission ou y a consenti est coupable d'une infraction et passible, sur déclaration sommaire de culpabilité, d'une amende semblable ".
  • Le paragraphe 150(2) stipule notamment que si l'un ou l'autre ou l'ensemble des administrateurs de la société sont informés du fait que la société ne s'est pas conformée aux dispositions de l'article 133 (dépôt de déclarations annuelles), le tribunal peut tenir les administrateurs personnellement responsables des coûts engagés pour la liquidation de la société conformément à une ordonnance du tribunal en vertu de la Loi sur les liquidations et les restructurations.
  • Le paragraphe 114.2(5) de la Loi sur les corporations canadiennes prévoit que si une société ou un dirigeant est tenu de déposer un rapport, une déclaration, un règlement ou tout autre document auprès d'Industrie Canada et que la société ou le dirigeant omet de produire le document, le Ministre peut obliger la société ou le dirigeant à produire un rapport sur toute question liée à cette omission, et tout administrateur ou dirigeant qui, sciemment, autorise ou permet l'omission de produire ce rapport est coupable d'une infraction et peut s'exposer à une pénalité maximale de 50 dollars pour chaque jour que dure cette omission.

Identification de la société
Les administrateurs ont l'obligation de s'assurer que l'identification de la société n'est pas erronée ou incomplète sur les documents d'affaires et dans les représentations faites à des parties externes. L'article 27 de la Loi sur les corporations canadiennes crée une infraction sur ce point et impose de plus une responsabilité personnelle aux administrateurs dans certains casnote 11.

La pénalité imposée aux administrateurs pour une omission de se conformer à l'article 27 est de deux cents dollars, mais l'administrateur est aussi personnellement responsable envers le détenteur de tout billet à ordre, lettre de change, chèque, mandat d'argent ou commande de marchandises, pour le plein montant, si celui-ci n'est pas acquitté par la société.

Listes de membres
La plupart des lois applicables renferment des dispositions qui permettent aux membres et parfois à d'autres d'obtenir une liste des noms et adresses des membres de la société. L'article 111.1 de la Loi sur les corporations canadiennes renferme des exigences relatives à l'obtention d'une telle liste et tient les administrateurs personnellement responsables dans les circonstances suivantes :

  1. lorsque la société néglige de fournir une liste de membres suite à une requête dûment émise, le paragraphe 111.1(1) prévoit que chaque administrateur et dirigeant qui … autorise, permet ou approuve sciemment … alors qu'il est en fonction, est coupable d'une infraction et passible, sur déclaration sommaire de culpabilité, d'une amende maximale de 1 000 dollars ou d'un emprisonnement de six mois, ou des deux;
  2. le paragraphe 111.1(3) crée une infraction lorsqu'une liste de membres est utilisée à des fins interdites énumérées dans cet article et, conjointement avec la société, tout administrateur ou dirigeant qui " … sciemment, a autorisé ou permis l'infraction ou y a consenti " est coupable d'une infraction et passible, sur déclaration sommaire de culpabilité, d'une amende d'au plus 1 000 dollars ou d'un emprisonnement d'au plus six mois, ou des deux;
  3. le paragraphe 111.1(5) précise que quiconque offre en vente, achète, ou autrement fait le trafic d'une liste ou d'une copie de liste des actionnaires d'une société est coupable d'une infraction et que tout administrateur ou dirigeant qui … autorise, permet ou approuve sciemment … alors qu'il est en fonction, est aussi coupable d'une infraction et passible, sur déclaration sommaire de culpabilité, d'une amende maximale de 1 000 dollars ou d'un emprisonnement de six mois, ou des deux.

Responsabilité à la liquidation
La Loi sur les corporations canadiennes impose une responsabilité aux administrateurs lorsque, sur requête du Procureur général du Canada à un tribunal, la société est liquidée et dissoute en vertu de la Loi sur les liquidations et les restructurations fédéralenote 12. Une société peut être liquidée de cette façon en vertu de l'article 5.6 de la Loi sur les corporations canadiennes si les activités de la société ont débordé le cadre de ses lettres patentes (les objets ou les pouvoirs de la société). Sur requête au tribunal pour l'obtention d'une ordonnance de liquidation de la société, le tribunal peut déterminer que les coûts de la liquidation seront assumés par la société ou, personnellement, par les administrateurs qui ont participé ou consenti à l'infraction.

De même, en vertu de l'article 150 de la Loi sur les corporations canadiennes, sur requête du Procureur général du Canada, une société sans but lucratif peut être liquidée si :

  1. elle omet de tenir une assemblée annuelle des membres pendant deux années consécutives ou
  2. omet de produire une déclaration annuelle pendant six mois ou plus.

Le paragraphe 150(2) stipule que sur requête à un tribunal en vue de l'obtention d'une ordonnance de liquidation de la société, le tribunal peut déterminer que les coûts de la liquidation seront assumés par la société ou, personnellement, par l'un ou l'autre ou l'ensemble des administrateurs qui, sciemment, sont responsables du manquement ou de l'omission de la société.

Disposition générale sur les infractions
La Loi sur les corporations canadiennes renferme une disposition générale sur les infractions qui englobe les manquements à tout article de la Loi pour lequel une peine n'est pas explicitement prescrite. L'article 149 de la Loi sur les corporations canadiennes stipule qu'un administrateur, un gérant ou un dirigeant sera passible, sur déclaration sommaire de culpabilité, d'une amende de 1 000 dollars au maximum, ou d'une peine d'emprisonnement d'une année au maximum, ou des deux, pour tout acte contraire aux dispositions de la Loi ou pour toute omission ou négligence de se conformer à toute exigence de la Loi.

Autres infractions prévues dans la Loi sur les corporations canadiennes
Outre les infractions décrites dans ce qui précède, les administrateurs devraient être renseignés sur les infractions et les peines suivantes qui s'appliquent aux administrateurs selon l'article 71 de la Loi sur les corporations canadiennes — Omission du registre des hypothèques, de l'article 72 — Refus d'une inspection (hypothèques), de l'article 98 — Administrateur intéressé dans un contrat avec la compagnie et qu'il n'y a pas de déclaration, ainsi que l'article 99, qui traite des employés. Puisque la responsabilité éventuelle à l'égard des employés est l'une de celles qui revient le plus souvent, elle fera l'objet d'un traitement distinct ci-dessous.

Responsabilité des administrateurs en vertu d'autres lois fédérales et provinciales
Les lois qui s'appliquent à une société sans but lucratif dépendent des activités qu'elle mène en vue d'accomplir sa mission. Ainsi, une garderie exploitée en Ontario est assujettie aux dispositions de la Loi sur les garderiesnote 13. Afin d'établir la portée de leur responsabilité, les administrateurs doivent être renseignés sur la législation qui s'applique aux activités et aux programmes de la société.

Cependant, certaines dispositions législatives s'appliquent à l'ensemble des sociétés commerciales et des sociétés sans but lucratif. Ces dispositions ont trait aux employés, à la fiscalité et à la réglementation en matière d'environnement.

Employés
Salaires
Dans la plupart des circonstances, la législation sur l'emploi régissant les sociétés sans but lucratif sera d'origine provinciale. Cependant, les sociétés qui sont exploitées dans des secteurs de compétence fédérale — par exemple les autorités aéroportuaires — seront assujetties aux lois et règlements fédéraux. De façon générale, les administrateurs peuvent être trouvés personnellement responsables des salaires impayés jusqu'à concurrence de six mois et de la paye de vacances due aux employés. Cependant, cela s'applique uniquement aux services fournis au cours de la période où un administrateur siégeait au conseil d'administration de la société et cette disposition peut être assujettie à d'autres restrictions. Ainsi, en Ontario, un administrateur n'est pas responsable à moins :

  • que la société n'ait été poursuivie pour le montant dû dans les six mois suivant la date d'échéance du montant et que les employés n'aient pu percevoir ce montant auprès de la société; ou
  • que la société ne soit en liquidation, n'ait été liquidée ou n'ait déclaré faillite.

Les administrateurs peuvent être poursuivis pour les montants dus alors qu'ils étaient toujours administrateurs ou pendant une période d'un an après qu'ils ont cessé de l'êtrenote 14.

Au Québec, la Loi sur les compagnies ne tient pas les administrateurs des sociétés sans but lucratif responsables des salaires impayés à leurs employés.

Retenues à la source
Omission de verser les impôts fédéraux
Les administrateurs doivent s'assurer que des retenues appropriées sont faites sur le salaire du personnel et les autres sommes versées en rémunération aux employés. En vertu de la Loi de l'impôt sur le revenunote 15, les administrateurs qui étaient en poste au moment où la société a omis de déduire, de retenir ou de verser le montant dû sont responsables, conjointement avec la société, du montant et de tout intérêt ou pénalité connexes.

Si un administrateur peut démontrer qu'il a exercé le degré de soin, de diligence et de compétence requis afin de prévenir l'omission de la déduction des retenues à la source qu'aurait exercé une personne raisonnablement prudente dans des circonstances comparables, il pourra ne pas être jugé responsablenote 16. Par conséquent, les administrateurs devraient s'assurer que des mesures de contrôle sont en place, par exemple la création d'un compte en fiducie pour les salaires, et exiger du trésorier ou du chef de la direction qu'il fasse rapport périodiquement au conseil pour confirmer que toutes les remises exigées ont été versées au gouvernement.

Les administrateurs devraient aussi s'assurer que la société traite comme un employé tout fournisseur de services lorsque la loi l'exige. Cela est notamment important dans le cas des entrepreneurs indépendants. S'il est établi qu'un entrepreneur indépendant est, de fait, un employé, les administrateurs peuvent être tenus responsables en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Dans certains cas, les tribunaux ont déclaré des organismes sans but lucratif responsables des retenues à la source impayées, en plus des intérêts et des pénalités applicables, pour des employés que ces organismes avaient indûment présentés comme des entrepreneurs indépendantsnote 17. Si la société est incapable de respecter cette obligation, les administrateurs peuvent être tenus personnellement responsables des montants dus.

Omission de verser les primes d'assurance-emploi et les cotisations au régime de pensions du canada ou au régime des rentes du québec
Chaque employeur qui verse une rémunération à une personne employée dans un emploi assurable doit déduire et verser au Receveur général les primes d'assurance, tel que prescrit dans la Loi sur l'assurance-emploinote 18, et les cotisations au Régime de pensions du Canada, tel que prescrit dans la Loi sur le Régime de pensions du Canada, ou au Régime des rentes du Québec. Toute omission à cet égard pourrait entraîner la responsabilité personnelle des administrateurs.

La Loi sur l'impôt prélevé sur les employeurs relatif aux services de santé établit un impôt-santé payable par les employeurs qui font affaire ou qui gèrent des programmes en Ontario. Les administrateurs et les dirigeants qui ont ordonné, autorisé, accepté, consenti ou participé à la commission d'une infraction par la société en vertu de cette Loi sont eux-mêmes coupables d'une infraction et passibles de la peine prévuenote 19. Des dispositions semblables peuvent s'appliquer en ce qui a trait au versement des primes d'assurance-santé ou de l'impôt-santé dans d'autres provinces.

Autres responsabilités liées aux employés
Selon les activités de la société, les administrateurs peuvent aussi s'exposer à une responsabilité personnelle en vertu du Code canadien du travailnote 20 et de la législation provinciale sur les prestations ou les normes des régimes de pensions, la législation sur l'équité salariale, la législation sur la santé et la sécurité professionnelles, ainsi que la législation sur la sécurité en milieu de travail.

Fiscalité
Loi de l'impôt sur le revenu
Les organismes de bienfaisance enregistrés et les sociétés sans but lucratif sont exemptés de l'impôt en vertu de la partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu. Cependant, ils ne sont pas exemptés des exigences relatives aux déclarations et à la conformité et aux dispositions de la Loi. Les pénalités prévues pour l'omission de se conformer à ces dispositions sont sévères. Un organisme de bienfaisance enregistré peut perdre son statut d'organisme de bienfaisance, ou ses administrateurs et dirigeants peuvent s'exposer à des sanctions pénales.

Loi sur la taxe d'accise
Les sociétés sans but lucratif sont généralement tenues de verser la TPS sur la plupart des biens et services (certains organismes caritatifs et sociétés sans but lucratif sont admissibles à une remise sur la TPS qu'ils versent). Les sociétés sans but lucratif peuvent aussi être tenues de percevoir et de verser la TPS sur les biens et services qu'elles fournissent au public.

L'une des erreurs les plus fréquemment commises par les sociétés sans but lucratif est de négliger de percevoir et de verser la TPS sur les droits d'adhésion ou sur la vente d'articles à des membres ou à des clients. L'application de la TPS dépend en partie du fait que le statut de membre confère aux membres un avantage matériel. Le simple fait de recevoir un bulletin ou un avantage d'importance marginale n'est toutefois pas suffisant pour que les droits d'adhésion soient assujettis à la TPS.

Dans certaines circonstances, la Loi sur la taxe d'accisenote 21 impose une responsabilité à la société et une responsabilité personnelle aux administrateurs pour les montants de TPS à verser. Cette responsabilité personnelle survient toutefois uniquement si certaines mesures — liées à l'enregistrement et à la preuve de la dette et de la dissolution ou de la faillite en cours de la sociéténote 22 — ont été prises.

En outre, les administrateurs ont accès à une défense de diligence raisonnable semblable à celle figurant à l'article 227 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le paragraphe 323(3) de la Loi sur la taxe d'accise stipule qu'un administrateur n'est pas responsable pour les montants de TPS dus lorsqu'il a exercé le degré de soin, de diligence et de compétence, en vue de prévenir un tel manquement, qu'une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables. En outre, la responsabilité à l'égard de la cotisation de tout montant payable par une personne qui est un administrateur d'une société expire deux ans après que cette personne ait cessé d'occuper la fonction d'administrateur.

Environnement
Les administrateurs et les dirigeants des sociétés sans but lucratif sont assujettis à la même responsabilité en vertu de la législation sur la protection de l'environnement que les administrateurs et les dirigeants des sociétés commerciales. Même si cette législation peut ne pas s'appliquer à la plupart des sociétés sans but lucratif, selon leur nature et l'endroit où elles exercent leurs activités et leurs programmes, il pourrait être utile d'étudier cet aspect plus en détail. Dans bien des cas, les responsabilités éventuelles envisagées dans les lois sur la protection de l'environnement ont une portée étendue et peuvent être passablement lourdes. Ainsi, si une société sans but lucratif se voit offrir un don en biens immeubles, il y aurait lieu de demander un avis juridique sur la possibilité que des contaminants se trouvent déjà sur ces biens.

La Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999)note 23 impose des obligations aux administrateurs en ce qui a trait à la pollution de l'air et de l'eau, ainsi qu'à l'entreposage et à l'élimination de façon appropriée des substances toxiques. La loi précise que les administrateurs et les dirigeants ont le devoir exprès de s'assurer que la société se conforme à la Loi et à ses règlements. L'omission de se conformer à la Loi peut entraîner une peine d'emprisonnement et une amende allant jusqu'à un million de dollars. La Loi sur la protection de l'environnement de l'Ontarionote 24 oblige les administrateurs à prendre des mesures raisonnables pour prévenir les déversements illégaux de contaminants dans l'environnement naturel.

Risques de responsabilité d'origine législative pour les administrateurs d'organismes caritatifs
Outre les responsabilités d'origine législative qui s'appliquent à toutes les sociétés sans but lucratif, les administrateurs des sociétés à vocation caritative sont assujettis à des responsabilités en vertu des lois qui ne s'appliquent qu'aux organismes de bienfaisance. Voici certaines des plus importantes.

Responsabilité d'origine législative pourles organismes de bienfaisance enregistrés dans la loi de l'impôt sur le revenu(canada)
Les administrateurs des sociétés à vocation caritative peuvent s'exposer à une responsabilité personnelle si la société ne se conforme pas aux exigences prévues dans la Loi de l'impôt sur le revenu concernant les activités de la société, les exigences de déclaration, l'affectation des fonds et l'émission de reçus pour les dons.

Responsabilité d'origine législative pour les organismes de bienfaisance dans la loi sur la comptabilité des œuvres de bienfaisance(ontario)
Les administrateurs des sociétés à vocation caritative ayant des activités en Ontario sont assujettis à une responsabilité supplémentaire en vertu de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance (Ontario). Le texte de loi accorde certains droits aux donateurs et au Curateur public général, qui leur permet de demander des comptes aux administrateurs lorsqu'il y a utilisation non appropriée des biens destinés à des fins caritatives.

L'article 6 de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance (Ontario) permet à un donateur de déposer une plainte au sujet des pratiques de collecte de fonds d'une société à vocation caritative. Le donateur n'a qu'à déposer une plainte écrite devant un juge de la Cour supérieure de justice de l'Ontario, lequel peut ordonner au Curateur public général de faire enquête. Cela ne s'applique pas aux organisations " religieuses " ou " fraternelles ".

La Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance de l'Ontario (à l'article 4) prévoit des peines pour un organisme de bienfaisance et ses administrateurs qui ne respectent pas les instructions explicites applicables à un don fait par testament ou par un donateur dans une convention de don. Le Curateur public général peut porter le litige devant le tribunal de sa propre initiative ou à la suite d'une plainte d'un donateur. Il peut demander au tribunal d'obliger l'organisme à se conformer aux modalités des instructions données par le donateur, ou à imposer une peine à l'organisme de bienfaisance ou une peine d'emprisonnement à ses administrateurs. Il peut aussi demander que l'organisme soit remplacé comme un fiduciaire du fonds conditionnel et qu'un nouveau fiduciaire soit nommé.

Risques de responsabilité liés à la collecte de fonds
Une société à vocation caritative et son conseil d'administration doivent se conformer à certaines lois touchant à la collecte de fonds à des fins de bienfaisance. L'omission de le faire peut exposer les administrateurs à une responsabilité personnelle. La portée du présent chapitre permet uniquement de donner un bref aperçu des lois applicables, dont voici certaines des plus importantes.

Lois qui s'appliquent spécifiquement aux activités de collecte de fonds des organismes caritatifs

Lois générales touchant la collecte de fonds à des fins de bienfaisance

Législation antiterrorisme
La Loi antiterroriste (Canada)note 35, auparavant le Projet de loi C-36, promulguée en décembre 2001, ainsi qu'une législation fédérale connexe, a créé d'importants nouveaux risques de responsabilité pour les administrateurs des sociétés à vocation caritative. Celles-ci vont de la saisie des biens destinés à des fins caritatives, à la perte du statut d'organisme de bienfaisance, à des accusations en vertu du Code criminelnote 36 contre l'organisme, ses administrateurs et même des donateurs pour la collecte de fonds destinés soutenir ou à faciliter directement ou indirectement des " activités terroristes " ou des " groupes terroristes ", définis largement.

Étant donné la portée d'application de la Loi antiterroriste (Canada) et des conséquences sérieuses qui en découlent, les administrateurs des sociétés à vocation caritative doivent maintenant faire preuve d'une grande diligence en s'assurant qu'ils ne commettent pas l'une des nombreuses infractions de nature criminelle ou civile énoncées dans la Loi et la législation fédérale connexenote 37.

ExempleS DE QUESTIONS QUE LES ADMINISTRATEURS ACTUELS OU ÉVENTUELS PEUVENT POSER À L'ORGANISATION

  1. Les activités actuelles de l'organisation traduisent-elles ses objectifs tels qu'énoncés dans ses statuts constitutifs?
  2. La société s'acquitte-t-elle de ses obligations en vertu de ses règlements administratifs, par exemple l'obligation de convoquer une assemblée générale annuelle?
  3. Le conseil d'administration dispose-t-il d'un processus pour autoriser la conclusion de contrats par la société?
  4. La société s'acquitte-t-elle de toutes ses obligations de nature statutaire, par exemple le dépôt des rapports obligatoires auprès des organismes gouvernementaux appropriés et la déduction appropriée des retenues à la source sur les salaires des employés?
  5. Si la société est un organisme de bienfaisance enregistré, prend-elle des mesures pour s'assurer que ses fonds destinés à des fins caritatives sont investis de façon appropriée?
  6. Si la société est un organisme se bienfaisance enregistré, se conforme-t-elle aux lois qui régissent ses activités de collecte de fonds?

Exemples de questions que les administrateurs peuvent se poser à eux-mêmes

  1. Lorsque je suis incapable d'assister à une réunion du conseil, est-ce que je lis le procès-verbal de la réunion et fait part de mes préoccupations le cas échéant?
  2. Est-ce que j'exprime mon opposition sur les questions avec lesquelles je suis en désaccord en m'assurant que mes objections sont consignées au procès-verbal de la réunion?
  3. Ai-je lu et compris les statuts constitutifs ou les lettres patentes ainsi que les règlements administratifs de la société? 
     
  4. Est-ce que je comprends toutes les obligations légales qui sont faites à la société? 
     
  5. Si je suis administrateur d'une société à vocation caritative, est-ce que je comprends les responsabilités juridiques spéciales auxquelles la société et moi-même sommes exposés?

Liste de vérification — responsabilité

Liste de vérification — Responsabilité
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Connaissance de la responsabilité découlant d'actions qui excèdent le pouvoir de la société  

Administrateur, en consultation avec ses collègues du conseil d'administration et/ou le directeur général  

Annuellement  

L'administrateur connaît-il la portée du mandat de la société, telle que définie dans les documents de constitution en société, et sait-il que la société est tenue de limiter ses activités à cette mission?  

2. Connaissance de la responsabilité contractuelle  

Administrateur, en consultation avec ses collègues du conseil d'administration et/ou le directeur général  

Annuellement  

Les documents régissant la société traitent-ils du pouvoir de signer des contrats? L'administrateur sait-il de quelles façons particulières sa responsabilité personnelle peut être engagée?  

3. Connaissance de la responsabilité délictuelle  

Administrateur, en consultation avec ses collègues du conseil d'administration et/ou le directeur général  

Annuellement  

L'administrateur connaît-il de quelles façons particulières sa responsabilité personnelle peut être engagée pour des réclamations faisant suite à une conduite préjudiciable? Sait-il qu'une mauvaise gestion par négligence peut donner lieu à de telles réclamations?  

4. Connaissance de la responsabilité découlant des devoirs de common law  

Administrateur, en consultation avec ses collègues du conseil d'administration et/ou le directeur général  

Annuellement  

L'administrateur sait-il qu'il est responsable auprès de la société des pertes subies par suite d'un manquement de sa part de s'acquitter de ses obligations de fiduciaire? L'administrateur comprend-il la portée de ces obligations de fiduciaire?  

5. Connaissance de la responsabilité d'origine lgislative  

Administrateur, en consultation avec ses collègues du conseil d'administration et/ou le directeur général  

Annuellement  

L'administrateur sait-il qu'en vertu de certaines lois, les administrateurs peuvent engager leur responsabilité personnelle?  

6. Responsabilité découlant de la législation sur la constitution en société (y compris le dépôt des déclarations), les salaires, les impôts — sur le revenu, sur les biens et services, sur les ventes, les retenues à la source, l'emploi et la protection de l'environnement  

Administrateur, en consultation avec ses collègues du conseil d'administration et/ou le directeur général  

Annuellement  

L'administrateur connaît-il et comprend-il les exigences liées à chacun de ces aspects, ainsi que l'obligation qu'ont les administrateurs de s'assurer que ces exigences sont respectées?  

7. Évaluation de la responsabilité d'origine législative découlant du mandat particulier ou des activités de la société  

Conseil d'administration  

Aux deux ans ou plus fréquemment si le contexte réglementaire évolue rapidement  

Un examen a-t-il été fait, à l'interne ou en demandant un avis juridique, pour identifier les exigences de la réglementation que la société est tenue de respecter?  


* B. Soc., Sci., LL.B., cabinet d'avocats conseillant les organismes de bienfaisance et les organisations sans but lucratif établi à Ottawa.

Chapitre 4: Droits et pouvoirs

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Terrance S. Carter * et Jacqueline M. Connor **
Carter & Associates, avocats et procureurs

Introduction

Les droits et les pouvoirs généraux des administrateurs d'une société sans but lucratif se trouvent dans la législation régissant sa constitution en société — la Loi sur les corporations canadiennes pour une société fédéralenote 1 — les lettres patentes de la société et, à un degré plus limité, la common law. Le Sommaire de la politique relative aux sociétés sans but lucratifnote 2, de la Direction générale des corporations, (Sommaire de la politique) énonce des lignes directrices générales que les administrateurs des sociétés sans but lucratif fédérales peuvent consulter pour passer en revue leurs droits et pouvoirs.

Droits des administrateurs

Accès à la gestion
Le conseil d'administration est responsable de la gestion efficace des affaires de la société sans but lucratif. De fait, le Sommaire de la politique précise que les règlements administratifs d'une société sans but lucratif fédérale doivent indiquer explicitement que le conseil a ce pouvoir, bien qu'ils puissent aussi exclure expressément certains pouvoirs qui seront plutôt exercés par les membres de la société. Le pouvoir de gérer la société englobe les aspects suivants :

  • s'assurer que l'on poursuit de façon appropriée la mission de la société;
  • établir des objectifs et des plans stratégiques à long terme pour la société;
  • être responsable de tous les aspects des opérations de la société;
  • s'assurer de la stabilité financière et de la performance d'ensemble de la société;
  • superviser les gestionnaires et le personnel.

Chaque administrateur d'une société sans but lucratif est aussi responsable, individuellement, pour ses actes et omissions pendant qu'il est en fonction. Le conseil d'administration doit donc avoir un accès inconditionnel à toutes les ressources de la société qui lui sont nécessaires pour s'acquitter efficacement de ses devoirs de gestion.

Livres comptables et registres
Une société sans but lucratif fédérale est tenue de conserver un ou des registres où sont consignés tous les documents de constitution (aussi appelés " actes constitutifs ") de la société, ainsi que le nom, l'adresse et la profession de chaque membre et administrateur de la sociéténote 3. Elle doit aussi tenir des livres comptables appropriés et les journaux où sont consignés toutes les opérations financières et autres transactions de la sociéténote 4. L'omission de le faire constitue une infraction en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes.

La Loi de l'impôt sur le revenu (Canada)note 5 oblige les sociétés à vocation caritative à conserver certains registres et livres de comptes, les duplicata de tous les reçus qu'elle émet pour des dons de bienfaisance et les renseignements qui permettent de vérifier les dons faits à la sociéténote 6.

En raison de ces exigences d'origine stutaire, l'administrateur d'une société sans but lucratif fédérale a le droit, à toute heure convenable, d'inspecter et de copier tous les livres, registres et documents (et non uniquement ceux qui sont accessibles au public), ainsi que d'inspecter les biens matériels que possède ou utilise la société. Cela permet aux administrateurs d'exercer leur pouvoir sur la gestion et l'administration, de prendre des décisions informées au sujet des affaires de la société, de confirmer que la société se conforme à toutes les lois applicables et de s'assurer que tous les fonds recueillis auprès du public par la société et placés en fiducie sont employés uniquement aux fins désignées.

Avis de la tenue des réunions
Les réunions du conseil d'administration d'une société sans but lucratif représentent un moyen essentiel pour les administrateurs d'exercer leur pouvoir sur la gestion et l'administration des affaires de la société. Par conséquent, chaque administrateur a le droit de recevoir un préavis adéquat de la tenue de toute réunion du conseil.

Les sociétés sans but lucratif fédérales doivent inclure des dispositions dans leurs règlements administratifs traitant de la façon dont la société tiendra ses réunionsnote 7. De façon générale, les règlements administratifs doivent soit préciser une période de temps spécifique raisonnable pour aviser les administrateurs de la tenue d'une réunion soit indiquer qu'un avis raisonnable sera donné. Bien qu'une période de temps explicite ne soit pas stipulée dans la Loi sur les corporations canadiennes, l'énoncé de politique recommande une période minimum de 14 jours pour l'envoi par courrier des avis aux administrateurs. Les règlements administratifs peuvent aussi permettre que les avis de la tenue d'une réunion du conseil d'administration soient envoyés par voie électronique, notamment par courriel ou facsimilé, ou que les administrateurs qui assistent à la réunion du conseil puissent renoncer à un tel avis.

Si un administrateur ne peut assister à une réunion du conseil d'administration, il a le droit d'examiner le procès-verbal de la réunion et tout état financier qui y est présenté, et il peut exprimer son objection à l'égard de tout élément qu'ils renferment.

Le droit d'assister à une réunion est assujetti à l'obligation fiduciaire des administrateurs d'éviter tout conflit d'intérêts. Dans certaines circonstances, un problème de conflit d'intérêts empêchera un administrateur d'être présent lors de la discussion et du vote pris sur une question particulière; à l'occasion, lorsque le règlement d'un conflit nécessite la démission d'un administrateur, celui-ci perdra le droit d'assister aux réunions. Dans un tel cas, les autres administrateurs doivent être conscients du risque que comporte la présence continue de l'ancien administrateur aux réunions, même à titre d'invité, parce que cela pourrait exercer une influence indue sur les décisions prises. Lorsqu'un administrateur est absent temporairement en raison d'un conflit d'intérêts, son absence devrait être consignée minutieusement dans le procès-verbal. (Veuillez consulter les chapitre 2 et 6 pour plus de renseignements sur les conflits d'intérêts.)

Droit de vote
Tous les administrateurs d'une société sans but lucratif fédérale, sauf ceux nommés d'office ou à titre honoraire, ont le droit de voter aux réunions du conseil d'administration. Cependant, les règlements administratifs de la société peuvent aussi accorder aux administrateurs nommés d'office ou à titre honoraire le droit de vote. Lorsque les règlements de la société accordent le droit de vote à ces administrateurs, les droits de vote de tous les administrateurs votants doivent être égaux. Cela signifie que ces administrateurs ne peuvent obtenir un droit de vote ayant une pondération différente de celle des autres droits de vote (par exemple le double ou la moitié) ou le droit de voter uniquement sur certaines questions (par exemple accorder à un trésorier honoraire le droit de voter uniquement sur les questions financières).

Alors que le droit de vote est un droit fondamental, il est assujetti à l'obligation fiduciaire qu'ont les administrateurs d'éviter tout conflit d'intérêts à l'égard de tout contrat ou projet de contrat de la société. (Veuillez consulter les chapitres 2 et 6 pour plus de renseignements sur cette obligation.)

Procès-verbaux
Une société sans but lucratif fédérale doit conserver un procès-verbal de toutes les réunions de ses membres, de ses administrateurs et de son comité exécutifnote 8. Les administrateurs ont le droit de voter pour approuver le procès-verbal de toute réunion antérieure du conseil d'administration et d'exprimer toute objection à cet égard.

Les administrateurs ont aussi le droit d'examiner les procès-verbaux de toutes les réunions dans le cadre de leur droit d'accès et d'inspection des livres comptables et des registres de la société. Si la société a créé des comités, le conseil d'administration a le droit de recevoir des copies des procès-verbaux des réunions de chaque comité. Cela permet aux administrateurs de s'acquitter de leur responsabilité d'exercer une supervision générale sur la gestion de la société.

Pouvoirs des administrateurs

De façon générale, les pouvoirs des administrateurs d'une société sans but lucratif fédérale sont énoncés dans ses lettres patentes. Les administrateurs devraient étudier attentivement les lettres patentes de la société dont ils sont membres du conseil d'administration. Ils devraient aussi consulter la Loi sur les corporations canadiennes, qui énonce les pouvoirs habituels d'une société sans but lucratif fédérale.

Pouvoir de gérer les affaires de la société
Le conseil d'administration d'une société sans but lucratif fédérale a le pouvoir de gérer les affaires de la société. Dans toutes les provinces sauf le Québec, les administrateurs d'une société à vocation caritative ont, de plus, un devoir assimilé à celui de fiduciaire qui leur est imposé par la common law et ils doivent gérer et rendre compte des biens de la société d'une manière semblable à celle que l'on attend d'un fiduciaire. À ce titre, les administrateurs des organismes caritatifs sont considérés comme ayant un pouvoir fiduciaire plus grand à l'égard des biens de la société et un devoir de diligence plus rigoureux que les administrateurs des autres sociétés sans but lucratif ou des sociétés à but lucratif. Cela signifie qu'ils ont les mêmes pouvoirs que les administrateurs des autres sociétés sans but lucratif mais qu'ils doivent exercer ces pouvoirs avec une diligence plus grande que leurs homologues des autres sociétés sans but lucratif. Comme il s'agit d'une question de droit civil, ce devoir supplémentaire de fiduciaire, imposé par la common law, ne s'applique pas au Québec.

Pouvoirs habituellement prévus par la loi
La Loi sur les corporations canadiennes (article 16) énonce l'ensemble des pouvoirs habituels d'une société fédérale. En termes juridiques, ces pouvoirs sont désignés comme étant accessoires et auxiliaires. Voici les plus importants :

  • le pouvoir d'acheter ou d'acquérir des biens ou des avoirs aux fins d'exécuter la mission de la société (par exemple acheter du matériel ou des meubles pour le travail de l'organisation, ou pour lui permettre de s'acquitter de ses fonctions);
  • le pouvoir de réclamer, d'acheter ou d'acquérir toute propriété intellectuelle qui peut être utilisée aux fins de la société, et d'intenter une poursuite, à l'égard de cette propriété intellectuelle ou d'exercer, d'élaborer ou d'accorder des licences connexes (par exemple pour acheter ou créer, utiliser et protéger des marques de commerce ou des oeuvres assujetties aux droits d'auteur);
  • le pouvoir de fusionner ou de conclure des partenariats ou d'autres arrangements avec toute autre société, entreprise ou personne menant des affaires ou des transactions que la société est autorisée à mener (par exemple conclure des contrats ou établir des coentreprises pour atteindre les buts de la société);
  • le pouvoir de conclure tout arrangement avec tout gouvernement ou autorité qui favorise la poursuite de la mission de la société afin d'obtenir des droits, des privilèges et des concessions (par exemple conclure des conventions d'achat de services avec le gouvernement en vue d'atteindre les objectifs de la société);
  • le pouvoir d'acheter, de louer, d'acquérir, de vendre ou de négocier d'une autre façon tout bien meuble ou immeuble (par exemple la location ou l'achat d'espaces à bureaux);
  • le pouvoir de demander en vue d'obtenir, d'exercer et d'appliquer tout pouvoir, droit ou privilège que tout gouvernement, autorité, société ou autre organisme public peut être habilité à accorder, et de payer, aider et contribuer à la mise en oeuvre de ceux-ci (par exemple le droit d'obtenir une licence ou une accréditation d'un organisme gouvernemental à une fin particulière, ou le droit de comparaître devant un tribunal administratif);
  • le pouvoir de faire des placements et des transactions avec les sommes d'argent que détient la société (par exemple l'achat de dépôts à terme avec l'encaisse de la société);
  • le pouvoir de faire toute autre chose ayant un lien avec la poursuite de la mission et l'exercice des pouvoirs de la société ou qui les facilite (par exemple étendre la portée des services à un groupe plus vaste ou à un secteur géographique différent, en conformité avec le mandat de la société).

Les sociétés sans but lucratif fédérales peuvent aussi être assujetties à des exigences statutaires spéciales selon la sphère de compétence où se déroulent leurs activités. Ainsi, leurs pouvoirs habituels peuvent être limités par la législation provinciale. À titre d'exemple, en vertu de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance (Ontario)note 9, les sociétés à vocation caritative de cette province ne peuvent détenir de terrains excédentaires en Ontario pour une période de plus de trois ans.

Pouvoir d'emprunt
La Loi sur les corporations canadiennes (paragraphe 65(1)) accorde aux administrateurs d'une société sans but lucratif fédérale des pouvoirs d'emprunt. Les administrateurs doivent auparavant adopter un règlement d'emprunt spécial. Ils doivent ensuite convoquer une assemblée spéciale des membres de la société pour leur permettre de voter sur le règlement. Le règlement entre en vigueur seulement s'il est sanctionné par au moins les deux tiers des votes exercés à cette assemblée spéciale des membres.

Les pouvoirs d'emprunt prévus par la loi permettent aux administrateurs d'une société :

  • d'emprunter de l'argent en fonction du crédit de la société;
  • de limiter ou d'augmenter le montant à emprunter;
  • d'émettre des débentures ou d'autres titres de la société;
  • de donner en garantie ou de vendre ces débentures ou ces titres;
  • de garantir ces débentures, ces titres ou ces emprunts par une hypothèque, une sûreté ou le nantissement de biens meubles et immeubles.

En vertu de la Loi sur les corporations canadiennes, les sociétés sans but lucratif peuvent emprunter des fonds sensiblement de la même façon que les sociétés commerciales. Toutefois, la Loi de l'impôt sur le revenu applique certaines restrictions à ce pouvoir pour les sociétés à vocation caritative.

Ainsi, les fondations de bienfaisance sont seulement autorisées à emprunter pour couvrir des dépenses d'exploitation courantes, l'achat et la vente de placements et l'administration d'activités de bienfaisancenote 10. Si elles le font, cela peut constituer un motif de retrait de l'enregistrement à titre d'organisme de bienfaisance émis en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. De plus, les administrateurs doivent s'assurer que toute sûreté donnée à l'égard d'un prêt contracté par la société est la propriété effective de celle-ci (c'est-à-dire qu'elle en est propriétaire à titre bénéficiaire) et n'est pas détenue en fiducie (au bénéfice d'une partie ou pour une fin particulière, par exemple une fondation détenue par une société à vocation caritative).

Les administrateurs des sociétés sans but lucratif fédérales peuvent déléguer leurs pouvoirs d'emprunt à d'autres dirigeants ou administrateurs s'ils sont autorisés à le faire par règlementnote 11. Ils doivent toutefois exercer une surveillance étroite sur le processus d'emprunt et sur la façon dont l'argent emprunté est dépensé.

Pouvoir d'investissement
Les administrateurs d'une société sans but lucratif fédérale ont le pouvoir de faire des placements. La Loi sur les corporations canadiennes (article 16) accorde aux sociétés sans but lucratif fédérales le pouvoir " de placer et gérer les deniers de la compagnie, non requis immédiatement, de la manière qui peut être déterminée au besoin ". Les lettres patentes de la société peuvent aussi renfermer des dispositions particulières qui ont préséance sur ce pouvoir ou qui viennent le compléter. Les administrateurs ont le devoir, en common law, d'investir les fonds spéciaux aux fins pour lesquelles ils sont destinés. Cela signifie qu'ils ont le pouvoir de refuser des requêtes ou des demandes de donateurs ou d'autres parties visant à détourner ces fonds à une autre fin.

Exemple
La Loi sur les fiduciaires de l'Ontario précise que les administrateurs d'une société à vocation caritative ont le pouvoir et le devoir d'investir les biens de la société comme le ferait un investisseur prudent. Cela comprend le pouvoir d'investir dans des fonds communs de placement et de déléguer le pouvoir décisionnel en matière de placements à des gestionnaires de portefeuille qualifiés. Les administrateurs doivent, toutefois, se conformer à certaines exigences législatives, par exemple les critères obligatoires qui s'appliquent aux placements et à l'élaboration et au respect d'un plan d'investissement, tout comme ils doivent s'assurer qu'un accord écrit de représentation est conclu entre la société et le gestionnaire de portefeuille qualifié nommé par le conseil d'administration.

Si une société sans but lucratif fédérale détient des biens en fiducie, comme un fonds d'avantages pour les employés, la législation provinciale peut renfermer des dispositions qui définissent le pouvoir d'investissement de la société à l'égard de ces biens. Ces dispositions peuvent aussi s'appliquer aux sociétés sans but lucratif qui sont des organismes de bienfaisance enregistrés.

Les pouvoirs d'investissement ne sont pas uniformes d'une province canadienne à l'autre. Il est donc important que la société sans but lucratif détermine soigneusement les pouvoirs d'investissement qu'elle possède dans la sphère de compétence où elle veut placer des fonds.

Pouvoir d'aliéner des biens
Les administrateurs d'une société sans but lucratif fédérale ont le pouvoir de vendre, de louer, d'échanger, d'hypothéquer ou d'aliéner d'une autre façon tout bien de la société. Ce pouvoir est assujetti aux restrictions qui peuvent figurer dans un document de fiducie ou une entente constituant un don à une société sans but lucratif à vocation caritative, par exemple une convention portant sur un don à conserver pendant dix ans. Les administrateurs d'une société sans but lucratif, en particulier une société à vocation caritative, doivent déterminer la nature du bien à aliéner et des restrictions qui pourrait s'y appliquer.

Exemples de questions que les administrateurs éventuels peuvent poser à l'organisation

  1. Est-ce que je comprends tous les droits et tous les pouvoirs associés à la fonction d'administrateur?
  2. Est-ce que la société a adopté des procédures ou des mesures qui m'aideront à exercer ces droits et ces pouvoirs?

Exemples de questions que les administrateurs peuvent se poser à eux-mêmes

  1. Est-ce que je connais et exerce la gamme complète de mes droits et pouvoirs?
  2. Devrais-je rechercher une aide logistique auprès de l'organisation pour faciliter l'exercice de mes droits et pouvoirs (par exemple un meilleur accès aux livres, aux registres, etc.)?
  3. Devrais-je rechercher une aide sur les questions de procédure auprès du conseil ou des dirigeants qui siègent au conseil, pour faciliter l'exercice de mes droits et pouvoirs (par exemple un préavis plus long pour la tenue des réunions)?

Liste de vérification — droits et pouvoirs

Liste de vérification — Droits et pouvoirs
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Pouvoir de gestion  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Vérifier si les règlements administratifs définissent des pouvoirs et noter toute disposition qui réserve exclusivement des pouvoirs aux membres.  

2. Livres comptables et registres  

Président du conseil, comité de vérification ou autre personne ou comité désigné par le conseil  

Annuellement, habituellement à l'occasion de la vérification s'il y a un examen externe des finances de la société  

Vérifier la disponibilité des livres et des registres de la société.  

3. Procédures relatives aux réunions  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Les préavis de la tenue des réunions sont-ils adéquats? Les administrateurs sont-ils informés des restrictions qui peuvent s'appliquer aux droits de vote? Les procès-verbaux sont-ils rédigés et distribués de façon régulière?  

4. Pouvoirs habituels  

Ensemble du conseil  

Au moment d'une décision  

Existe-t-il un pouvoir approprié pour entreprendre une action donnée, soit dans le cadre des pouvoirs habituels soit dans le cadre des pouvoirs attribués au conseil par un autre document?  

5. Emprunts  

Ensemble du conseil  

Au moment de la décision relative à la transaction  

Existe-t-il un pouvoir approprié pour conclure la transaction? La nature de la société ou le genre d'avoirs donnés en garantie soulève-t-il des préoccupations additionnelles (par exemple y a-t-il une fiducie en cause)?  

6. Placements  

Ensemble du conseil  

Au moment de la décision relative à la transaction  

Existe-t-il un pouvoir approprié pour conclure la transaction? La nature de la société ou le genre d'avoirs donnés en garantie soulève-t-il des préoccupations additionnelles (par exemple y a-t-il une fiducie en cause)?  


* B.A., LL.B. Le cabinet de monsieur Carter, Carter & Associates (www.charitylaw.ca) est établi à Orangeville, en Ontario. Il agit à titre de conseiller juridique auprès du cabinet Fasken, Martineau, DuMoulin LLP, à Toronto.

** B.A., LL.B. Madame Connor pratique le droit à titre d'associée au sein du cabinet Carter & Associates. Les auteurs souhaitent remercier et témoigner leur gratitude envers Wen Wu, étudiant en droit, pour sa collaboration à la recherche et à la rédaction de ce chapitre.

Chapitre 5 : Comités

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Peter Broder*
Conseiller juridique et analyste des politiques,
Centre canadien de philanthropie

Introduction

Les comités sont un instrument essentiel au fonctionnement efficace du conseil d'administration d'une société sans but lucratif. Une structure apropriée de comités permet au conseil d'orienter les compétences là où elles peuvent le mieux svir, et de gérer le flux d'information de telle manière que les administrateurs ne soient pas encombrés de documents inutiles qui risquent de gêner plutôt que de faciliter une bonne prise de décision. Un bon travail en comité — c'est-à-dire une évaluation réfléchie des renseignements débouchant sur des recommandations ou des options bien ciblées — est la pierre angulaire d'une prise de décision prudente et informée au conseil.

Il n'y a pas de formule magique pour déterminer la meilleure répartition des responsabilités entre le conseil dans son ensemble et les comités qu'il peut créer. Le mandat, la taille et le stade de développement de l'organisation dicteront essentiellement sa structure de comités. Dans certains cas, les comités formés dépendront du modèle de gouvernance de l'organisation. Certains modèles requièrent la création d'un comité exécutif, d'un comité permanent de la vérification et/ou d'un comité des candidatures. Dans d'autres cas, des comités seront créés pour répondre aux besoins opérationnels du conseil ou de l'organisation. Ainsi, le conseil peut créer un comité pour l'aider à résoudre une question importante ou un problème particulier — comme la politique du conseil en matière de conflits d'intérêts ou la politique relative à l'adhésion à l'organisation.

Les responsabilités d'un comité peuvent varier d'une organisation à l'autre, selon la mesure dans laquelle elle fait appel à des bénévoles. À titre d'exemple, le comité de collecte de fonds au sein d'une organisation dirigée essentiellement par des bénévoles peut être responsable de la préparation des demandes de financement. Dans une organisation qui embauche du personnel rémunéré, un tel comité peut jouer davantage un rôle de soutien — en recherchant et en identifiant des bailleurs de fonds potentiels — tandis que le personnel prépare les demandes. Dans les organisations disposant d'un personnel professionnel, le rôle du comité de collecte de fonds peut être limité à l'examen de la politique et au règlement de questions telles que : comment et où les efforts de financement devraient-ils être orientés.

Une bonne coordination est requise entre le conseil (habituellement par l'entremise de son président) et le directeur général afin de déterminer la structure de comités appropriée, notamment en ce qui a trait aux comités formés pour traiter de questions opérationnelles. Cela permettra d'éviter les situations où le conseil crée un comité pour assumer une fonction qu'il conviendrait mieux de confier au personnel. Donner à un comité du conseil le mandat de régler une question opérationnelle, notamment lorsque ce mandat est écé dans les règlements administratifs, peut parfoinuire au travail du personnel effectivement chargé de régler ces questions, et peut même signifier que les ressources qui seront consacrées à ce comité pourraient être mieux utilisées ailleurs.

Au minimum, les mandats des comités devraient toujours préciser les éléments suivants :

  • la présidence (mode de sélection);
  • la composition (taille et mode de sélection);
  • la responsabilité en matière de rapports (à qui et quand);
  • le mandat (la portée de l'autorité);
  • la nature de l'autorité (rapport, recommandation, action);
  • le soutien au niveau des ressources et/ou du personnel.

Une police d'assurance adéquate devrait toujours être en place pour protéger les membres des comités — y compris ceux qui ne sont pas membres du conseil — contre toute responsabilité pouvant découler d'une décision ou d'une action prise de bonne foi par un comité. Les dispositions d'indemnisation des statuts constitutifs ou des règlements administratifs devraient aussi traiter de la protection accordée contre les actions découlant du travail des comités.

GENRES DE COMITÉS

Comités spéciaux
Ce sont des comités de courte durée créés pour traiter d'une question de gouvernance ou d'organisation particulière ou pour faire des recommandations. Les membres du comité n'ont pas à être membres de l'organisation ou de son conseil d'administration.

Parmi les comités spéciaux habituellement créés par les sociétés sans but lucratif, il y a le comité du personnel ou des ressources humaines, le comité de collecte de fonds et le comité du programme. Parmi les autres comités que l'on peut utilement envisager, même si l'on y recourt moins fréquemment, il y a le comité des communications, le comité de la rémunération et le comité des bénévoles.

Le mandat d'un comité spécial est déterminé par résolution du conseil qui l'a établi. La résolution devrait faire mention de la taille du comité, en précisant un nombre donné ou permissible de membres, la procédure de sélection et la portée de tout pouvoir délégué au comité.

Dans certains cas, la portée du pouvoir d'un comité peut être définie ou modifiée dans une résolution distincte — par exemple, lorsque le mandat du comité évolue avec le temps ou lorsqu'un aspect du travail du comité n'a pas été envisagé au moment de sa création.

Les comités qui sont constitués " avec autorité " disposent de pouvoirs suffisants pour mener à bien leur mandat. En vertu de la Loi sur les compagnies du Québec, seul le comité exécutif peut être nommé " avec autorité "; tous les autres comités ont un rôle consultatif.

Au niveau fédéral et dans certaines autres sphères de compétence, des comités peuvent être nommés avec une autorité plus restreinte — par exemple pour représenter le conseil dans certaines transactions, pour agir comme représentants à des fins spécifiques, ou encore pour lier la société dans une transaction particulière.

Exemple
Un comité peut se voir confier le mandat defaire uniquement des recommandations ou celui de prendre des décisions sur certaines questions. Ainsi, une organisation peut avoir besoin d'acheter ou de construire de nouveaux bureaux. Son conseil peut établir un comité de construction qui aura pour mandat de faire tout le nécessaire, allant de la recherche et de la formulation de recommandations sur la location ou l'achat, au choix d'un site approprié et à la sélection d'un architecte qui supervisera la construction des nouvelles installations.

L'étendue de l'autorité déléguée au comité dépendra de sa taille et de son expertise en comparaison de l'ensemble du conseil, de l'envergure du projet et de la nécessité de réaliser un équilibre approprié entre l'efficience et l'obligation de rendre compte dans le processus de prise de décision.

À l'instar des administrateurs, les pouvoirs des comités sont assujettis à certaines restrictions. Un conseil ne peut jamais faire indirectement, par le biais d'un comité, une chose qu'il n'a pas le pouvoir de faire en tant que conseil. Un comité ne peut donc agir hors du mandat de l'organisation énoncé dans ses objets. Les membres des comités qui ne sont pas membres du conseil d'administration sont visés par les mêmes restrictions.

Les comités consultatifs n'ont aucune autorité pour agir au nom de la société. Ces comités sont parfois établis pour donner à une organisation une certaine crédibilité ou servir d'instrument de collecte de fonds. Dans certains cas, ils sont créés pour réunir un éventail d'expertise technique que le personnel pourra consulter au fil des activités de l'organisation.

Les membres des comités devraient comprendre clairement leurs pouvoirs et être prudents dans la façon dont ils présentent le comité à des intervenants de l'extérieur. Dans certains cas, une responsabilité éventuelle peut survenir lorsqu'une tierce partie se fie à l'autorité que semble posséder un comité, mais que ce dernier n'a pas en réalité.

Lorsqu'on s'attend à ce que les membres d'un comité consultatif donnent des avis techniques ou professionnels au personnel, collectivement ou individuellement, il faudrait s'assurer que les conseillers ou la société sont protégés par une assurance adéquate contre toute réclamation pouvant découler de ces avis.

Dans les sociétés sans but lucratif, où les comités jouent un rôle actif dans la prise de décision, une attention particulière doit être accordée à la structure des comités afin que le personnel n'ait pas à répondre à deux autorités. En pratique, cela signifie que les mandats des comités ne devraient pas chevaucher les descriptions de tâches des employés. Lorsque le mandat d'un comité correspond étroitement aux responsabilités d'un employé, ce dernier pourrait recevoir du comité des directives qui sont en contradiction avec celles que lui donne son surveillant ou l'ensemble du conseil d'administration. Les employés devraient toujours relever soit d'un autre employé soit de l'ensemble du conseil, mais non d'un comité.

Comités permanents
Ce sont des comités créés en permanence pour régler ou faire des recommandations sur des questions de gouvernance ou d'organisation courantes. Il n'est pas nécessaire que les membres des comités permanents soient membres de l'organisation ou du conseil qui les a nommés.

Le mandat d'un comité spécial peut être défini soit par une disposition des règlements de l'organisation soit par une résolution du conseil qui l'a constitué. Les comités permanents diffèrent des comités spéciaux dans la mesure où leurs décisions ou leurs actions font partie intégrante du travail du conseil. Ainsi, il serait avisé de préciser dans les règlements administratifs la façon dont ces comités seront constitués. Le Sommaire de la politique relative aux sociétés sans but lucratif, d'Industrie Canada, qui s'applique aux sociétés constituées en vertu de la loi fédérale, énonce ce qui suit :

Lorsque les règlements administratifs prévoient des comités permanents, ils doivent aussi préciser :

  1. Le mode de nomination ou d'élection des membres du comité.
  2. La façon dont les membres du comité sont relevés de leurs fonctions.
  3. Les responsabilités ou les devoirs des membres du comité.
  4. La rémunération des membres du comiténote 1.

Les comités permanents n'ont pas à être constitués par voie de règlement. Mais s'ils ne le sont pas, les quatre aspects qui précèdent ainsi que la taille du comité (nombre donné ou autorisé de membres) devraient à tout le moins être précisés dans la résolution du conseil établissant le comité et consignés au procès-verbal de la réunion au cours de laquelle la résolution a été adoptée. L'étendue du pouvoir délégué au comité devrait aussi être définie dans la résolution. Si l'étendue du pouvoir du comité est définie dans les règlements administratifs, elle ne peut être modifiée par résolution du conseil.

Deux comités permanents que l'on retrouve souvent dans les sociétés sans but lucratif sont le comité des candidatures et le comité de vérification.

Comité des candidatures
Ce comité supervise le processus de recrutement des membres du conseil et voit au remplacement ou à la révocation des administrateurs. Même si un comité des candidatures n'est pas requis en loi, c'est un élément clé d'une bonne gouvernance dans les sociétés sans but lucratif. Le rôle du comité des candidatures peut être limité à la recherche de candidats au poste d'administrateur ou il peut aller jusqu'à la sélection des candidats appropriés à certains postes du conseil. Il peut aussi assumer une fonction consultative ou disciplinaire en traitant du cas des administrateurs qui manquent à leurs devoirs ou en proposant des rôles et des paramètres pour définir le travail des administrateurs.

La participation d'une gamme étendue d'intervenants dans le processus de gouvernance est la norme dans de nombreuses sociétés sans but lucratif. Le cas échéant, le comité des candidatures peut jouer un rôle clé en veillant à assurer un bon équilibre entre tous les intérêts en présence et en s'assurant que la composition du conseil favorise une prise de décision servant au mieux les intérêts de l'ensemble de la société.

Il faudrait veiller à ce que les membres du comité des candidatures soient désintéressés — c'est-à-dire qu'ils n'aient pas de lien étroit avec des membres du personnel ou des factions particulières au sein du conseil. Peut-être plus que tout autre comité, le comité des candidatures doit se préoccuper des intérêts à long terme de l'organisation. Pour cette raison, il est important qu'il agisse de façon indépendante. À moins d'être perçu comme agissant en toute indépendance, la capacité du comité de révoquer ou de traiter du cas des administrateurs en faute pourrait être compromise.

Comité de vérification
La fonction principale de ce comité est d'assurer la liaison entre le vérificateur et le gestionnaire financier de la société. Selon les compétences professionnelles du personnel d'une société sans but lucratif et l'étendue de ses activités, le mandat du comité de vérification peut se limiter essentiellement à un examen financier annuel ou aller jusqu'à une supervision étroite des pratiques comptables.

Dans certains cas (habituellement dans les petits organismes sans but lucratif créés pour offrir des avantages à leurs membres), une évaluation externe indépendante de la situation financière de l'organisme n'est pas requise en loi. Le conseil devrait déterminer le degré d'intervention approprié du comité dans ces circonstances pour surveiller adéquatement l'intégrité financière de la société. Des facteurs tels que la taille du budget, le niveau des dépenses discrétionnaires et le calibre professionnel du personnel devraient entrer en ligne de compte. Cette décision peut être prise avec la contribution du comité lui-même et/ou le vérificateur ou le conseiller financier externe de la société.

Le comité de vérification devrait être distinct du comité des finances. Souvent, la composition de ces comités se recoupe, mais leurs fonctions sont passablement différentes. Le comité de vérification est un organe de gouvernance qui se préoccupe de l'intégrité des procédures financières de la société. Le comité des finances s'intéresse aux modalités des opérations financières de la société. Selon la nature et le degré de maturité de la société, ce comité peut être exclusivement un organe de gouvernance, ou encore il peut être en partie un organe de gouvernance et en partie un organe opérationnel.

Dans certains cas, le rôle du comité des finances sera assuré par un seul membre du conseil, habituellement désigné " trésorier " ou " vice-président, finances ".

Lorsque l'organisation choisit d'avoir un comité des finances, celui-ci traite habituellement des questions relatives au budget et à la présentation de rapports périodiques sur les résultats financiers au conseil. Il peut aussi traiter de questions telles que les achats, le contrôle des coûts et la gestion des avoirs. Dans le cas des organismes à vocation caritative, le traitement des avoirs peut être assujetti à des exigences législatives ou de common law. Le cas échéant, le travail du comité devrait être structuré de manière à s'assurer que ces exigences sont respectées.

Le mandat du comité de vérification englobe parfois la responsabilité de la conformité de la société aux dispositions de la loi. Parce que la loi évolue sans cesse, des ressources importantes (personnel, membres du comité ou conseiller juridique externe) doivent constamment, ou à tout le moins fréquemment, être consacrées au suivi de l'évolution des lois qui peuvent toucher la société.

En raison du fait que ce travail est de nature continue et lié aux opérations, il est préférable que cette fonction soit déléguée au comité des finances ou à un autre comité. Cependant, lorsque le conseil a confié cette responsabilité au comité de vérification, les administrateurs doivent se rappeler que l'expertise de ce comité se portera naturellement vers les aspects comptables, en veillant à ce que la composition du comité et les ressources mises à sa disposition permettent de faire une évaluation appropriée de la conformité aux lois.

Comité exécutif
Ce comité est habituellement de nature permanente. Il assure une supervision générale de l'organisation, notamment la direction du personnel entre les réunions du conseil d'administration; normalement, il a le pouvoir de lier la société. Les membres du comité exécutif devraient aussi être membres du conseil chargé des nominations.

En raison de l'autorité que possède le comité exécutif, sa constitution doit être prévue dans les règlements administratifsnote 2.

Le Sommaire de la politique relative aux sociétés sans but lucratif, d'Industrie Canada, qui s'applique aux sociétés constituées en vertu de la loi fédérale, énonce ce qui suit :

Lorsque les règlements prévoient la formation d'un comité exécutif, ils doivent aussi préciser :

  1. Les procédures applicables à la tenue des réunions du comité exécutif.
  2. Le quorum des réunions du comité exécutif [fixé à un minimum de deux administrateurs].
  3. Une période raisonnable de préavis de la tenue d'une réunion du comité exécutif, ou une indication à l'effet qu'un avis raisonnable sera donné.
  4. Le mode de nomination ou d'élection des membres du comité exécutif.
  5. La procédure de révocation des membres du comité exécutif.
  6. Les responsabilités ou les devoirs des membres du comité exécutif.
  7. La rémunération des membres du comité exécutifnote 3.

Le comité exécutif a le pouvoir de lier la société, mais il ne peut se faire déléguer le pouvoir de liquider l'actif, de dissoudre ou de fusionner la société ou de prendre d'autres décisions qui influeraient sur le mandat ou la structure fondamentale de la société.

Bien qu'un comité puisse être désigné par résolution du conseil pour superviser la gestion d'une société sans but lucratif, son pouvoir devrait être considéré comme plus limité que celui d'un comité mandaté par règlement. Ainsi, il pourrait y avoir contestation de la délégation à un comité du pouvoir général de lier la société. Lorsque ce genre de comité de supervision est nommé par voie de résolution, il devrait être désigné par une expression autre que " comité exécutif " pour éviter toute confusion ou le risque que des tiers se fient indûment à son autorité apparente.

Au moment de décider de la composition du comité exécutif, le conseil devrait tenter :

  • de réunir la gamme des compétences requises pour que le comité puisse s'acquitter de ses fonctions;
  • assurer une diversité parmi les membres pour représenter adéquatement les régions ou les clientèles desservies par la société;
  • permettre la tenue de réunions fréquentes à faible coût (cela signifie habituellement de tenir compte de la proximité géographique des membres ou de prévoir la participation aux réunions par voie électronique).

Le conseil d'administration dans son ensemble devrait être informé des décisions et des actions du comité exécutif à la première occasion. Dans certains cas, le comité exécutif pourrait souhaiter prendre une décision provisoire sur une question, laquelle ne prendrait effet qu'au moment où elle serait examinée par l'ensemble du conseil. Si le comité exécutif a quelque doute au sujet de son autorité pour traiter d'une question, il devrait demander un avis juridique sur la portée de ses pouvoirs et/ou renvoyer la question à l'ensemble du conseil ou aux membres, comme il convient.

Procédures
Le caractère formel des procédures employées en comité peut varier considérablement. Un avantage clé des comités est qu'ils comptent moins de participants et que leurs délibérations sont marquées par une plus grande souplesse. Cela permet de traiter plus efficacement l'information et de prendre plus rapidement des décisions.

Les administrateurs devraient toutefois être conscients que la délégation d'une responsabilité à un comité ne les protège pas nécessairement contre la responsabilité qui découle des décisions ou des actions du comité. En pratique, les administrateurs devraient toujours s'assurer qu'ils ont accès aux procès-verbaux et aux registres des comités. Ils ont légalement le droit de consulter ces documents.

La légitimité des réunions des comités, comme celle des autres réunions, peut être contestée si l'on n'offre pas aux membres une certaine équité au niveau de la procédure. Même lorsque les comités fonctionnent de façon très informelle, il faudrait prévoir :

  • des avis de convocation aux réunions;
  • le respect des exigences en matière de quorum;
  • la certitude quant au sujet à examiner;
  • la disponibilité des procès-verbaux et des registres pour fins d'examen;
  • l'occasion d'enregistrer sa dissension.

Dans bien des cas, il n'est pas nécessaire que ces procédures soient consignées par écrit. Cependant, les membres du conseil et des comités devraient toujours les avoir à l'esprit. Si la procédure est consignée quelque part, cela permet d'éviter de renvoyer une question à l'ensemble du conseil ou de devoir instituer des politiques plus formelles dans l'éventualité d'un différend.

La nature exacte de la supervision que le conseil d'administration devrait exercer sur un comité dépend de l'étendue du pouvoir et de la portée des questions confiées au comité. Elle pourrait aussi dépendre du fait que le comité est composé essentiellement de membres du conseil ou qu'il comprend des personnes de l'extérieur. Ainsi, la nécessité pour le conseil de superviser les procédures d'un comité consultatif est minimale. Mais si un comité a le pouvoir de lier la société, le conseil doit alors s'assurer que des garanties procédurales sont en place. Celles-ci englobent :

  • la sélection minutieuse des candidats aux postes de membre d'un comité (un candidat peut-il avoir des intentions cachées ou y a-t-il risque d'un conflit de personnalité?);
  • le conseil conserve le droit de désigner le président du comité;
  • un examen périodique ou occasionnel des procès-verbaux et des registres du comité;
  • un rapport annuel, ou plus fréquent, du comité à l'ensemble du conseil d'administration.

Les comités peuvent informer le conseil d'administration sur leur travail au moyen des procès-verbaux, de rapports oraux ou écrits, ou de recommandations. Les procès-verbaux sont habituellement déposés au conseil pour qu'il puisse suivre le fonctionnement du comité. Les rapports peuvent ou non renfermer des recommandations. Le cas échéant, ces recommandations devraient figurer dans la conclusion du rapport. Si l'examen du rapport est inscrit à l'ordre du jour de la réunion du conseil, il n'est pas nécessaire d'adopter une motion pour le " recevoir "note 4. Dans de rares cas, un conseil pourrait souhaiter "adopter", "accepter" ou "avaliser" un rapport. Cela signifie que le conseil est d'accord non seulement avec les constatations contenues dans le rapport, mais avec les délibérations du comité telles que présentées dans ce rapport. Il est assez rare qu'un conseil d'administration souhaite donner son aval à un rapport de cette façon. N'ayant pas participé aux travaux, il est peu probable que les membres du conseil souhaitent en partager toutes les nuances.

Plutôt, le conseil devrait centrer son attention sur les recommandations, présentées soit dans le rapport lui-même soit de façon distincte. Il peut prendre un vote pour mettre en oeuvre les recommandations ou adopter d'autres mesures qu'il juge appropriées — y compris, par exemple, le rejet de certaines recommandations ou leur renvoi au comité pour réexamen.

Note au sujet des conseils consultatifs
De nombreuses sociétés sans but lucratif créent un " conseil consultatif ", habituellement pour les conseiller sur la réalisation du mandat de la société et/ou pour améliorer leur crédibilité auprès du public. Ces conseils ne participent pas directement à la régie de la société. Afin d'éviter tout malentendu possible parmi le public ou les groupes intéressés, il importe que la relation entre le conseil consultatif, le conseil d'administration et le personnel soit bien définie. La société devrait pouvoir expliquer ces divers rôles aux tiers qui en font la demande. En décrivant les membres d'un conseil consultatif, on devrait établir clairement qu'ils n'ont aucune autorité sur les activités de l'organisation. Le terme " administrateur " devrait être évité.

Exemples de questions que les administrateurs éventuels peuvent poser à l'organisation

  1. Quelle est la structure des comités du conseil?
  2. Quels comités permanents sont envisagés dans les règlements administratifs de la société?
  3. Quel est le mandat et le rôle de chacun des comités permanents et spéciaux de la société?
  4. Y a-t-il des comités consultatifs ou des comités honoraires au sein de la société et, le cas échéant, quels sont leur rôle et leur composition?

Exemples de questions que les administrateurs peuvent se poser à eux-mêmes

  1. Compte tenu de mes compétences et de mon expérience, à quel(s) comité(s) serait-il approprié que je siège?
  2. Y a-t-il des comités dont je devrais m'informer régulièrement des décisions ou des activités, même si je n'en suis pas membre?
  3. Suis-je d'avis que les procédures des comités sur lesquels je siège sont appropriées compte tenu de leur mandat et de leur composition?

Liste de vérification — comités

Liste de vérification — Comités
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Structure de comités  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

La structure actuelle des comités représente-t-elle la meilleure répartition des responsabilités en vue de la réalisation du mandat de la société et des tâches du conseil d'administration? Le mandat et la composition de chacun des comités actuels sont-ils énoncés clairement dans les documents constitutifs de la société? Une protection d'assurance adéquate a-t-elle été mise en place pour faire face à toute réclamation pouvant découler du travail des comités?  

2. Mandat des comités  

Ensemble du conseil et présidents des comités  

À la création du comité  

Les mandats des comités énoncent-ils : le poste de président (mode de sélection); la composition (taille et mode de sélection); la responsabilité en matière de rapports (à qui et quand); le mandat (étendue du pouvoir); la nature du pouvoir (rapports, recommandations, actions); enfin, le soutien aux niveaux des ressources et/ou du personnel?  

3. Procédures des comités  

Ensemble du conseil et/ou présidents des comités  

Annuellement  

Les procédures des comités sont-elles clairement articulées? Y a-t-il un recours en cas de contestation du caractère équitable des procédures d'un comité?  

4. Comités permanents  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Si les règlements administratifs prévoient des comités permanents, ceux-ci sont-ils obligatoires ou facultatifs? Les comités requis sont-ils en fonction?  

5. Opérations  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Y a-t-il un comité exécutif ou un autre organe responsable du règlement des questions qui concernent la société entre les réunions du conseil d'administration? Sinon, quelle procédure est prévue pour prendre des décisions que ne peut prendre l'ensemble du conseil en temps opportun?  

6. Gouvernance  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Y a-t-il un comité responsable de la supervision des questions de gouvernance au conseil, par exemple un comité des candidatures? Sinon, comment ces questions sont-elles réglées?  

7. Vérification  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Y a-t-il un comité responsable de la liaison avec le vérificateur? Sinon, à qui incombe cette tâche?  

8. Finances  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Y a-t-il un comité responsable de la supervision des opérations financières de la société? Sinon, à qui incombe cette tâche?  

9. Comités consultatifs  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Le rôle et la composition de tout organe consultatif sont-ils clairement articulés dans les documents constitutifs de la société? Une police d'assurance adéquate a-t-elle été mise en place pour faire face à toute responsabilité qui pourrait découler de ses travaux?  


* B.A., LL.B. Le Centre canadien de philanthropie est un organisme national d'encadrement dans le secteur bénévole.

Chapitre 6 : Protection contre le risque

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Terrance S. Carter *
Carter & Associates, avocats et procureurs

Introduction

Considérations générales
Le risque peut être défini comme la possibilité qu'un événement préjudiciable ou indésirable survienne. Dans leur travail, les administrateurs des sociétés sans but lucratif peuvent faire face à deux événements préjudiciables ou indésirables :

  1. un événement qui aura des effets préjudiciables sur la société;
  2. feront l'objet d'une poursuite ou seront tenus responsables d'une autre façon d'un événement préjudiciable découlant de leurs actes ou de leur inaction.

Le présent chapitre traite principalement de la seconde éventualité.

Aucune des diverses mesures de protection disponibles aux administrateurs — diligence raisonnable, indemnisation par la société, dispositions législatives, assurances — ne vise à leur accorder une protection absolue contre les fautes. Elles visent toutefois à offrir une certaine marge de manoeuvre pour les erreurs de bonne foi, sans mettre indûment en danger la société.

L'évaluation du risque est un élément clé du travail de tout administrateur, de sorte qu'il est peut-être approprié que l'une des premières choses qu'un candidat à ce poste devrait faire est d'évaluer si des mesures de protection suffisantes existent pour lui permettre de servir en toute confiance le conseil d'administration d'une société sans but lucratif. L'information présentée ci-dessous devrait être utile à cette fin.

Exposition au risque
Les risques de responsabilité pour les administrateurs des sociétés sans but lucratif peuvent provenir d'un texte de loi ou de la de common law. Un administrateur peut être tenu personnellement responsable de ses actes ou de son inaction — conjointement (avec un ou plusieurs autres administrateurs) et solidairement (individuellement). Le chapitre 3 renferme un résumé des risques de responsabilité auxquels sont le plus souvent exposés les administrateurs des sociétés sans but lucratif, avec mention spécifique des sociétés à vocation caritative le cas échéant.

Portée du chapitre
Le présent chapitre traite de certains risques légaux auxquels font face les administrateurs des sociétés sans but lucratif et présente un aperçu de certaines des mesures qui peuvent être prises pour se protéger contre le risque de responsabilité. Un examen approfondi de tous les risques de responsabilité rendrait ce chapitre beaucoup trop long. Le chapitre débute par un examen de la diligence raisonnable dans divers contextes pour ensuite traiter de l'indemnisation par la société, des mesures de protection prévues dans la loi et de l'assurance. La dernière section traite de certains autres moyens de réduire le risque de responsabilité.

Diligence raisonnable

Considérations générales
Dans le cadre de leur obligation fiduciaire, les administrateurs des sociétés sans but lucratif sont tenus de faire preuve de diligence raisonnable dans la supervision et la gestion des activités de la société. Cela comprend, par exemple, la participation aux réunions du conseil d'administration, la supervision des opérations de la société, et la surveillance de la conformité à la mission énoncée dans les lettres patentes de la société; de même, ils doivent s'assurer que les résolutions adoptées par le conseil sont fondées sur des décisions éclairées des administrateurs.

La diligence raisonnable signifie aussi que les administrateurs doivent se familiariser avec tous les aspects de la société. Pour cette raison, les administrateurs devraient, dans la mesure du possible, assister à toutes les réunions du conseil d'administration. Si un administrateur ne peut être présent à une réunion du conseil, il devrait prendre les dispositions nécessaires pour examiner le procès-verbal de la réunion et tout état financier ou rapport qui y aurait été présenté. Si une question n'est pas claire aux yeux de l'administrateur, celui-ci devrait faire un suivi approprié en soulevant la question à la prochaine réunion du conseil.

L'obligation qu'ont les administrateurs des sociétés sans but lucratif de superviser le fonctionnement de la société et de s'assurer qu'elle se conforme à son mandat est particulièrement exigeante. Certains modèles de gouvernance des conseils d'administration — notamment aux États-Unis — préconisent que les administrateurs se limitent aux questions de politique en laissant la responsabilité de l'administration et des opérations au jour le jour au personnel de direction de la sociéténote 1. Ce rôle limité des administrateurs ne reflète pas les obligations qui leurs sont imposées par la loi, notamment dans le cas des administrateurs de sociétés à vocation caritative au Canada.

S'ils ont fait preuve de diligence raisonnable, les membres d'un conseil d'administration disposent alors d'une bonne défense contre les accusations de négligence et les allégations d'infractions à certaines responsabilités d'origine législative.

Exemple
En vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada), les administrateurs des sociétés sans but lucratif ont le devoir de déposer diverses déclarations auprès du gouvernement et deverser les retenues à la source de l'impôt sur le revenu à l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Afin d'éviter la responsabilité, les administrateurs doivent pouvoir démontrer qu'ils ont pris des mesures préventives pour s'assurer que la société se conformait à ces exigences de la Loi. Si les administrateurs peuvent démontrer qu'ils ont exercé le degré de soin, de diligence et de compétence que l'on attendrait d'une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances, ils ne seront pas tenus personnellement responsables de l'omission de la société de se conformer à la Loi.

Toutefois, la diligence raisonnable n'offre pas une défense contre toutes les infractions prévues par la loi. En vertu de la Loi antiterroriste (Canada), les administrateurs des sociétés à vocation caritative peuvent être tenus responsables des actions de l'organisme qui facilitent une " activité terroriste ", même s'ils ont pu faire preuve de diligence raisonnable pour prévenir de tels événements. Les administrateurs et leurs conseillers juridiques devraient donc examiner attentivement la Loi antiterroriste (Canada) et la législation fédérale connexe pour s'assurer que la société se conforme à leurs dispositions et prévenir qu'ils ne tombent, à leur insu, sous le coup de cette législation.

Risque de responsabilité pour défaut d'autorité
Une société sans but lucratif peut uniquement entreprendre des activités qui entrent dans les limites de ses objets, tels que définis dans ses lettres patentes et dans toute modification figurant dans ses lettres patentes supplémentaires. Certaines activités peuvent aussi devoir être autorisées par un règlement administratif.

Si les administrateurs permettent à la société d'entreprendre des activités qui sortent du cadre des objets de cette dernière ou qui ne sont pas dûment autorisées par règlement (c'est-à-dire des activités qui débordent de son mandat), ils s'exposent à une responsabilité personnelle pour les conséquences de ces activités.

Afin d'éviter ce genre de responsabilité, les administrateurs devraient :

  • obtenir et examiner attentivement les lettres patentes de la société et toutes lettres patentes supplémentaires au moment où ils deviennent administrateurs de la société;
  • obtenir et examiner attentivement les règlements administratifs qui régissent actuellement les activités de la société;
  • s'assurer que le conseil d'administration procède à un examen de tous ces documents au moins une fois l'an.

Si la société envisage d'entreprendre de nouvelles activités allant au-delà de ce qui est énoncé dans ses lettres patentes, elle doit alors modifier sa mission. Cela se fait au moyen de lettres patentes supplémentaires. Celles-ci doivent être obtenues avant d'entreprendre toute nouvelle activité. Les lettres patentes supplémentaires qui visent à modifier la mission de la société ne peuvent être accordées de façon rétroactive. Si une société à vocation caritative envisage de modifier sa mission, le conseil d'administration doit d'abord obtenir l'approbation de l'Agence des douanes et du revenu du Canada et, dans le cas des oeuvres de bienfaisance constituées en vertu de la loi ontarienne, celle du Bureau du Curateur public général.

Risque de responsabilité contractuelle pour les administrateurs
Les administrateurs qui signent des contrats pour une société sans but lucratif peuvent s'exposer à une responsabilité éventuelle si les contrats conclus n'avaient été dûment autorisés par une résolution du conseil, ou si les administrateurs ont sciemment permis un manquement au contrat subséquemment à sa signature. Afin de réduire ce risque, les administrateurs devraient s'assurer que les contrats de la société ont été dûment autorisés par le conseil d'administration, ou même par les membres de la société si cela est requis par la loi. Les administrateurs devraient aussi exercer une diligence raisonnable en s'assurant que les conditions des contrats sont respectées afin d'éviter toute allégation d'intervention fautive de leur part en vue d'inciter au non-respect d'un contrat.

Risques de responsabilité pour mauvaise gestion négligente
Les administrateurs des sociétés sans but lucratif peuvent aussi s'exposer à une responsabilité personnelle lorsque les activités de la société sont présumées avoir été gérées de façon négligente par le conseil d'administration. Voici quelques exemples de mauvaise gestion par négligence : les administrateurs ont permis que prévalent des conditions non sécuritaires dans les installations de la société, lesquelles provoquent une glissade et une chute; ou encore, ils ont permis la conduite négligente d'un véhicule de la société ou d'un autre véhicule utilisé dans le cadre des activités de la société.

Les administrateurs doivent exercer une diligence raisonnable en s'assurant que, dans les situations où les préjudices subis par des tiers peuvent être entièrement ou partiellement imputables à une politique du conseil, ou découler directement de la conduite de membres du conseil, ils aient examiné attentivement les conséquences possibles de leurs actes ou de leur inaction.

Sélection
Un certain nombre de causes retentissantes portées devant des tribunaux contre des sociétés sans but lucratif ces dernières années concernaient des allégations d'abus. Les allégations les plus fréquentes portent sur des abus sexuels et la violence physique ou psychologique. Jusqu'à maintenant, ces causes ont mis en relief la responsabilité de la société plutôt que celle des administrateurs. Toutefois, les administrateurs doivent se préoccuper de la fréquence de ces allégations pour deux raisons :

  • les dommages-intérêts découlant des allégations d'abus peuvent entraîner la faillite, l'insolvabilité ou l'épuisement des ressources d'une société au point où celle-ci ne pourra plus fonctionner à toutes fins pratiques;
  • lorsque l'abus est partiellement attribuable à une politique de la société ou s'est produit dans des circonstances qui impliquaient une participation directe des administrateurs, ces derniers peuvent être tenus personnellement responsables.

Pour ces raisons, dans une société qui traite avec des clients ou d'autres personnes vulnérables à un abus, par exemple des enfants, une politique ou un protocole de sélection devrait être mis en place. Une stratégie de sélection peut aussi être appliquée afin de réduire d'autres risques de responsabilité comme la fraude ou le vol.

Un processus de sélection approprié comportera, au minimum, les éléments suivants :

  • l'évaluation du risque (déterminer la nature et l'étendue du risque);
  • l'adoption de mesures raisonnables à prendre dans les circonstances (à la lumière de l'évaluation du risque, de la norme de diligence requise, des coûts, etc.);
  • l'application systématique de la procédure de sélection (évaluer de la même façon toutes les personnes qui occupent ou qui postulent une fonction particulière);
  • l'intégration des résultats de la sélection dans la prise de décision;
  • des mesures de contrôle appropriées de l'information recueillie dans le cadre du processus de sélection;
  • l'évaluation continue de l'efficacité et de la mise en oeuvre de ce processus;
  • la vérification du dossier criminel, lorsque cela s'avère approprié.

Au moment d'élaborer un processus de sélection, on devrait obtenir un avis juridique pour s'assurer que la politique ou le protocole respecte les exigences des lois relatives à la protection de la vie privée et aux droits de la personne, des lois du travail et d'autres textes de loi.

Les sociétés sans but lucratif devraient obtenir le consentement des employés et des candidats actuels et éventuels afin de procéder à une vérification de leur dossier criminel avant de leur permettre de travailler auprès d'enfants et d'autres personnes vulnérables à un abus. La vérification du dossier criminel devrait être complétée par d'autres moyens de vérification des antécédents et de la fiabilité de ces personnes.

Les sociétés qui traitent avec des personnes ou des groupes vulnérables devraient adopter par écrit et appliquer des politiques sur l'abus et le harcèlement sexuel en abordant explicitement des questions telles que la sélection, les procédures de rapport et les mesures disciplinaires. Des politiques écrites permettent de démontrer que la société et ses administrateurs ont fait preuve de diligence raisonnable en ce qui a trait à l'abus potentiel des enfants et d'autres clientèles à risque.

Demander de l'aide et des conseils
Les administrateurs des sociétés sans but lucratif sont tenus d'exercer une diligence raisonnable au moment de prendre des décisions au sujet des opérations de la société et de la gestion de ses avoirs. Cependant, le conseil d'administration ne possède pas toujours toutes les connaissances, les compétences et l'expérience requises pour s'acquitter pleinement des devoirs qui lui incombent en vertu de la législation ou de la common law. Souvent, il doit compter sur l'aide et les conseils des gestionnaires de la société et sur les avis de professionnels de l'extérieur.

Compter sur les gestionnaires
Les administrateurs des sociétés sans but lucratif ont le droit de se fier aux conseils et à l'aide des gestionnaires de la société dans la mesure où il est prudent pour eux d'agir ainsi. Le conseil d'administration peut déléguer la conduite des affaires courantes de la société aux gestionnaires, mais les administrateurs doivent en demeurer responsables. Ils doivent maintenir une supervision et un contrôle adéquats sur les décisions et les initiatives des gestionnaires. La délégation des responsabilités ou le fait de compter sur les conseils et la collaboration des gestionnaires ne soustrait pas les administrateurs à leurs responsabilités. Il est donc important que le conseil d'administration reçoive et examine des rapports en provenance des gestionnaires à chaque réunion du conseil.

Recours à des professionnels de l'extérieur
Les administrateurs de sociétés sans but lucratif, et notamment les sociétés à vocation caritative, doivent souvent obtenir des avis de professionnels de l'extérieur (avocats, comptables, fiscalistes, etc.). Ces professionnels sont habituellement appelés à intervenir lorsque la complexité d'une question ou le degré de responsabilité en cause va au-delà de ce que le conseil est en mesure de gérer lui-même de façon compétente. De fait, il est souvent plus prudent de retenir les services de professionnels externes parce que :

  • L'exploitation d'une société sans but lucratif, notamment une société à vocation caritative, fait surgir des questions de droit, de comptabilité et de fiscalité complexes. Lorsque ni le conseil d'administration ni les gestionnaires de la société ne possèdent des connaissances suffisantes sur ces questions, le conseil a alors le devoir de demander de l'aide et des avis pour garantir la conformité aux lois applicables et aux devoirs de common law qui lui sont imposés.
  • La société et son conseil d'administration pourront plus efficacement " écarter le risque juridique ", pour la société et eux-mêmes, en transférant ces risques à des professionnels de l'extérieur qui seront vraisemblablement protégés par une assurance-responsabilité professionnelle.
  • Le recours à des professionnels de l'extérieur constitue une preuve de diligence raisonnable de la part des administrateurs et peut les aider à se protéger contre la responsabilité.

Au moment de faire appel à des professionnels de l'extérieur, le conseil d'administration d'une société sans but lucratif doit :

  • s'assurer que les professionnels sélectionnés sont qualifiés;
  • s'assurer que ces professionnels ont reçu des instructions et un mandat appropriés;
  • faire preuve de prudence en exigeant des rapports sur le travail exécuté par ces professionnels et en décidant de donner suite, ou non, aux conseils de ces professionnels (le simple fait d'obtenir des rapports de l'extérieur et de les accepter sans en évaluer la pertinence ou le bien-fondé n'est pas suffisant pour s'acquitter des devoirs qui incombent à un administrateur).

Les membres du conseil qui sont eux-mêmes des professionnels ne devraient pas être invités à donner un avis professionnel à la société. Pour des raisons tant économiques que pratiques, on devrait éviter de le faire :

  • Cela n'est pas équitable pour les administrateurs concernés parce qu'il est peu probable qu'ils puissent réclamer le plein montant des honoraires correspondant à leurs services. Si la société est un organisme de bienfaisance ayant des activités en Ontario, la loi interdit à ses administrateurs de réclamer des honoraires pour leurs services.
  • Les autres administrateurs pourraient hésiter à remettre en question l'opinion professionnelle d'un collègue. Si cette opinion s'avère mal fondée, il pourrait être délicat et désagréable de tenir un collègue administrateur responsable de négligence en raison de l'avis qu'il a donné. Cela est notamment vrai lorsque l'administrateur en question voulait uniquement agir à titre de bénévole non rémunéré en donnant son avis.

Indemnisation

Considérations générales
L'indemnisation est une entente en vertu de laquelle la société s'engage à assumer le coût ou à dédommager les administrateurs des pertes ou des dommages-intérêts découlant d'actions en justice qui visent des actes ou l'inaction d'un administrateur dans l'exercice de ses fonctions. L'engagement à assumer ces coûts doit être énoncé dans les règlements administratifs de la société. L'indemnisation englobe habituellement les coûts de la défense contre une action en justice. La protection peut ou non s'étendre aux situations ou le plaignant a gain de cause et l'administrateur trouvé coupable; cependant, il n'y aura habituellement pas d'indemnisation dans les situations où un acte a été posé de façon illégale.

Ensemble des sociétés sans but lucratif
Dispositions de la législation fédérale
La Loi sur les corporations canadiennesnote 2 permet à une société sans but lucratif d'adopter un règlement administratif pour indemniser les administrateurs et les dirigeants de la société contre tous les coûts découlant d'une action ou d'une procédure judiciaire se rapportant à l'exécution des tâches que comporte leur fonction. Cela ne s'applique pas aux actions en justice qui font suite à une négligence ou à un manquement délibéré de la part d'un administrateur ou d'un dirigeant.

Il est avantageux et recommandé d'adopter un règlement administratif sur l'indemnisation. Cependant, un tel règlement aura peu d'utilité dans les situations suivantes :

  • la société n'a pas d'avoirs suffisants ou de protection d'assurance pour couvrir les obligations financières liées à l'indemnisation;
  • les actes posés par l'administrateur ou le dirigeant sortaient du cadre de ses attributions à titre d'administrateur, ou l'administrateur a agi de mauvaise foi ou de façon malhonnête;
  • les actes ou l'inaction d'un administrateur ou d'un dirigeant constituent une négligence ou un manquement délibéré;
  • les actes ou l'inaction d'un administrateur ou d'un dirigeant constituent un manquement à ses obligations fiduciaires envers la société, même si cela n'est pas considéré comme une négligence ou un manquement délibéré;
  • un administrateur ou un dirigeant est tenu personnellement responsable du paiement d'un montant prévu par la loi, par exemple au titre des salaires impayés ou des retenues à la source destinées au gouvernement;
  • un administrateur ou un dirigeant est impliqué dans une infraction en vertu du Code criminel, par exemple un abus sexuel contre des enfants ou une infraction aux dispositions de la Loi anti-terroriste (Canada).

Même si la Loi sur les corporations canadiennes permet aux sociétés sans but lucratif d'indemniser leurs administrateurs et dirigeants, certaines sociétés n'adoptent pas de règlement administratif sur la question de l'indemnisation. D'autres négligent de veiller à ce qu'un tel règlement soit adopté de façon appropriée. Cela est habituellement attribuable aux raisons suivantes :

  • la société existe depuis déjà un certain nombre d'années et son conseil d'administration n'a jamais été informé de l'importance d'adopter un règlement administratif sur la question de l'indemnisation;
  • le libellé du règlement traitant de l'indemnisation reflète, à tort, la clause d'indemnisation applicable aux sociétés commerciales, plutôt que les dispositions sur l'indemnisation énoncées dans la Loi sur les corporations canadiennes pour les sociétés sans but lucratifnote 3;
  • le règlement sur l'indemnisation n'a jamais été approuvé par les membres de la société comme l'exige la Loi sur les corporations canadiennes.

Dispositions de la législation provinciale
En Ontario, la Loi sur les personnes morales (Ontario)note 4 permet aux sociétés sans but lucratif d'adopter un règlement sur l'indemnisation dont la forme ressemble à celui figurant dans la Loi sur les corporations canadiennes. En vertu de la Loi sur les personnes morales (Ontario) et des lois similaires des autres provinces, une société peut indemniser ses administrateurs et dirigeants contre la responsabilité personnelle découlant d'un acte ou d'une omission dans l'accomplissement de leurs devoirs. Cependant, en Ontario, une société sans but lucratif ne peut indemniser un administrateur ou un dirigeant contre la responsabilité lorsqu'il n'a pas agi honnêtement ou de bonne foi en s'acquittant de ses devoirs.

Au Québec, la Loi sur les compagnies permet l'indemnisation des administrateurs " avec le consentement de la compagnie donné à toute assemblée générale " pour les coûts, les frais et les dépenses engagés en rapport avec une action ou une procédure intentée contre eux et portant sur l'exécution de leurs devoirs ou des affaires se rattachant à leur fonction, si la faute n'est pas en causenote 5. Ce règlement administratif peut être pris soit à l'égard d'un acte en particulier soit en vue d'une application plus générale. En pratique, un règlement général prévoyant l'indemnisation obligatoire est préférable. Cela évite que les administrateurs soient à la merci des membres du conseil lorsqu'ils ont besoin d'être indemnisés sur une question particulière.

Parfois, les lois provinciales prévoient l'indemnisation dans le cadre de la procédure judiciaire, ainsi/plutôt que par règlement.

À titre d'exemple, la Societies Act (Colombie-Britannique) requiert l'approbation du tribunal pour qu'il y ait indemnisation. Elle exige aussi l'honnêteté et la bonne foi et — dans certains contextes — des motifs raisonnables de croire que la conduite était légitime. Le paragraphe 30(2) de la Loi précise ce qui suit (traduction) :

Une société peut, avec l'approbation du tribunal, indemniser un administrateur ou un ancien administrateur de la société, ou un administrateur ou un ancien administrateur d'une filiale de la société, ainsi que ses héritiers et représentants personnels, contre tous les coûts, frais et dépenses, y compris un montant versé en règlement d'une action ou pour satisfaire un jugement, réellement et raisonnablement engagés par lui ou elle, dans une action ou une procédure de nature civile, pénale ou administrative à laquelle il était partie en sa qualité d'administrateur, y compris une action intentée par la société ou sa filiale si :

  1. il a agi honnêtement et de bonne foi, au mieux des intérêts de la société ou de sa filiale dont il est administrateur et
  2. dans le cas d'une poursuite ou d'une procédure de nature pénale ou administrative, il a des motifs raisonnables de croire que sa conduite était légitime.

Les administrateurs des sociétés sans but lucratif doivent déterminer avec précision quelles dispositions en matière d'indemnisation s'appliquent, le cas échéant, dans la sphère de compétence où elles sont établies.

Note
Les commentaires suivants traitent à la fois de l'indemnisation et de l'assurance; voir ci-dessous pour un examen des aspects plus généraux de l'assurance.

Sociétés à vocation caritative
Le Bureau du Curateur public général de l'Ontario a adopté la position qu'une société à vocation caritative en Ontario ne peut indemniser ses administrateurs ou acheter de l'assurance-responsabilité pour ses administrateurs et ses dirigeants sans avoir d'abord obtenu l'approbation du tribunal. Le raisonnement sous-jacent est que ces mesures sont perçues comme des avantages pour les administrateurs. Ce prolongement de la règle de common law interdisant toute rémunération des administrateurs des sociétés à vocation caritative s'est révélé une restriction gênante pour le fonctionnement de ces sociétés.

En conséquence, la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance a été modifiée pour y inclure un règlement qui permet à une société à vocation caritative en Ontario d'indemniser ses administrateurs et ses dirigeants contre la responsabilité personnelle pour des actes ou des omissions liés à l'exécution de leurs tâches. Les oeuvres de bienfaisance doivent se conformer aux exigences du règlement et ne peuvent indemniser un administrateur contre la responsabilité découlant d'un manquement à son devoir d'agir honnêtement et de bonne foi.

Le même règlement permet aux oeuvres de bienfaisance d'acheter de l'assurance à l'intention des administrateurs et des dirigeants pour couvrir leur responsabilité personnelle en rapport avec des actes ou des omissions survenant dans l'exécution de leurs tâches. Cependant, les conditions de l'assurance protégeant les administrateurs et les dirigeants et les modalités du règlement sur l'indemnisation ne peuvent entraver le droit d'un tiers d'intenter une poursuite en justice contre un administrateur ou un dirigeant. Le règlement énonce également que l'achat d'une police d'assurance ne doit pas gêner indûment la poursuite des objets religieux, éducatifs, publics ou de bienfaisance pour lesquels l'organisme possède des biens. Le conseil d'administration doit tenir compte des critères suivants avant d'accorder une indemnisation ou d'acheter de l'assurance à l'intention des administrateurs et dirigeants de la société :

  • le degré de risque auquel peut être exposé un administrateur ou un dirigeant (un organisme caritatif dont la vocation est de faire de la recherche sera vraisemblablement moins à risque qu'un autre engagé dans la prestation de services);
  • si, en pratique, le risque ne peut être supprimé ou sensiblement réduit par des moyens autres que l'indemnisation ou l'assurance (par exemple l'oeuvre de bienfaisance de bienfaisance peut-elle instituer des procédures ou désigner un membre du personnel pour surveiller ce risque et intervenir au besoin);
  • si le montant ou le coût de l'assurance est raisonnable en relation avec le risque;
  • si le coût de l'assurance est raisonnable en relation avec les recettes de l'organisme;
  • si le fait d'accorder une indemnisation ou d'acheter de l'assurance facilite l'administration et la gestion des biens destinés à des fins de bienfaisance.

Le règlement précise qu'une oeuvre de bienfaisance ne peut verser une indemnisation ou acheter de l'assurance s'il s'ensuit que le montant des dettes et du passif de la société dépassera la valeur des biens destinés à des fins caritatives ou rendra la société insolvable. De plus, l'indemnisation ne peut être versée ou l'assurance achetée qu'à même les biens de bienfaisance auxquels est liée la responsabilité personnelle et non à même tout autre bien destiné à des fins caritatives. Cela signifie que le revenu provenant des fonds conditionnels des donateurs, par exemple les fonds de dotation, qui n'engendrerait normalement pas la responsabilité d'un administrateur ou d'un dirigeant ne devrait pas servir à acheter de l'assurance-responsabilité ou à indemniser des administrateurs ou des dirigeants contre une réclamation. Le détournement de ces sommes à des fins d'indemnisation ou d'assurance pourrait être contesté comme étant une utilisation de biens de bienfaisance à des fins non appropriées.

Pour les oeuvres de bienfaisance constituées en vertu de la loi fédérale et dans les provinces de common law autres que l'Ontario — où cette question est abordée dans la législation — la question de savoir si l'indemnisation ou l'assurance constitue un avantage pour les administrateurs de l'organisme n'a pas encore été réglée. Dans ces sphères de compétence, si de telles mesures ne sont pas inappropriées, elles peuvent à tout le moins être contestées sauf si elles ont été sanctionnées par un tribunal. Puisque le Québec est assujetti au droit civil, la question ne se pose pas dans cette province.

Assurance

Considérations générales
Les conseils d'administration devraient envisager d'obtenir une ou plusieurs des diverses formes d'assurance disponibles, selon les activités et les ressources de leur société.

Ensemble des sociétés sans but lucratif
Assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants
La police d'assurance-responsabilité générale d'une société sans but lucratif n'offre qu'une protection limitée aux administrateurs et aux dirigeants contre une allégation d'actes fautifs. Ce genre de police, couramment acquise par les sociétés, offre habituellement une protection contre les réclamations qui surviennent dans le cadre des activités de l'organisation.

Une société ayant des activités qui pourraient exposer les administrateurs et les dirigeants à une responsabilité personnelle devrait acquérir une police d'assurance distincte pour ses administrateurs et dirigeants en supplément de l'assurance-responsabilité générale qu'elle possède. Les polices d'assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants protègent habituellement ces derniers contre les réclamations découlant des décisions ou des omissions du conseil, ou encore des actes ou des activités exécutés directement sous la gouverne du conseil d'administration. Lorsque les administrateurs et les dirigeants agissent à titre de fiduciaires, les réclamations visant cet aspect de leur travail ne sont pas couvertes par l'assurance-responsabilité habituelle des administrateurs et des dirigeants. Une police d'assurance " responsabilité fiduciaire " est requise pour les protéger contre ce genre de réclamations.

Il y a autant de catégories de polices d'assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants qu'il y a de compagnies d'assurance. Habituellement, ces polices protègent les administrateurs et les dirigeants des sociétés sans but lucratif contre les réclamations suivantes :

  • les dommages-intérêts qu'ils deviennent légalement obligés de verser et que la société ne paiera pas ou ne pourra payer;
  • les réclamations contre un administrateur ou un dirigeant que la société est obligée d'indemniser.

Voici certaines des considérations les plus importantes à garder à l'esprit au moment d'acquérir une assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants :

  • La police devrait couvrir tous les administrateurs, dirigeants et membres de comités, passés et présents, de la société.
  • Les polices d'assurance pour les administrateurs et les dirigeants sont habituellement émises " sur la base des réclamations ". Cela signifie que la société doit aviser l'assureur avant la fin de la période visée par la police de toute réclamation possible ou éventuelle contre des administrateurs et des dirigeants de la société.
  • La police devrait inclure une disposition prévoyant que l'avis de l'annulation de la police soit envoyé non seulement à la société, mais aussi au président du conseil d'administration. Cela garantira que le conseil soit avisé de toute annulation envisagée de la police.
  • L'assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants vient en complément de la protection générale d'assurance-responsabilité de la société sans but lucratif. Par conséquent, le montant de la protection devrait, si possible, correspondre à celui de la police d'assurance-responsabilité générale, en supposant que cette protection est disponible et que la société sans but lucratif peut se permettre de défrayer les primes.
  • Une police d'assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants couvre les risques qui ne sont pas assurés en vertu de la police d'assurance-responsabilité générale, mais elle ne couvre pas toutes les actions pouvant être intentées contre les administrateurs et les dirigeants. Par conséquent, il est important que les administrateurs prennent connaissance des exclusions que comporte la protection et, si cela est possible, d'envisager d'obtenir toute protection additionnelle requise (comme une police d'assurance-responsabilité fiduciaire).
  • L'assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants d'une société sans but lucratif ne couvrira probablement pas les poursuites que pourraient intenter des autorités publiques pour abus de confiance par suite d'une mauvaise gestion des fonds en fiducie, de placements non appropriés, d'infractions à la Loi antiterroriste ou toute autre infraction à des lois.

Restrictions de la protection de l'assurance-responsabilité générale
Les polices d'assurance-responsabilité générale renferment souvent des restrictions à la protection accordée. Les administrateurs d'une société sans but lucratif devraient examiner leur protection générale contre la responsabilité et connaître toute restriction qui s'applique. Parmi celles-ci, il y a :

  • un montant d'assurance insuffisant pour couvrir tous les risques anticipés;
  • l'exclusion de la protection pour les abus sexuels et/ou la violence physique envers des enfants;
  • l'exclusion de la protection pour le harcèlement sexuel;
  • des restrictions relatives à la région couverte par la police;
  • des restrictions quant aux personnes couvertes en vertu des modalités de la police;
  • l'exclusion de la couverture pour les peines et les amendes;
  • des restrictions relatives à la couverture des frais juridiques;
  • l'exclusion de la couverture lorsque la société a omis d'aviser l'assureur des changements survenus dans les risques assurables;
  • l'exclusion de la couverture lorsque la société a omis de déclarer des réclamations à l'assureur dans un délai raisonnable.

Couverture de l'assurance pour abus et/ou harcèlement sexuel
Si la police d'assurance actuelle de la société sans but lucratif ne renferme pas une protection pour les cas d'abus et/ou de harcèlement sexuel, mais que la société est exposée à un risque à cet égard, le conseil d'administration doit être informé de cette absence de couverture. Les administrateurs peuvent courir un risque important d'être tenus personnellement responsables dans l'éventualité d'une telle réclamation.

Lorsqu'une protection d'assurance pour les cas d'abus et/ou de harcèlement sexuel est disponible, il serait avisé de l'obtenir, " sur la base des événements " plutôt que " sur la base des réclamations ".

Les polices émises " sur la base des événements " fournissent une protection pour tous les incidents qui surviennent au cours d'une période donnée (la période de couverture de la police), peu importe le moment auquel la réclamation est présentée et nonobstant qu'un futur conseil d'administration se rappelle ou non de la nécessité de maintenir cette police d'assurance.

Par contre, les polices émises " sur la base des réclamations " n'offrent une protection que si la police est en vigueur au moment où la réclamation est présentée, peu importe la date de l'événement à l'origine de la réclamation. Une telle police n'est pas rétroactive. Cela signifie que les réclamations pour les allégations d'abus commis avant la date d'entrée en vigueur de la protection " sur la base des réclamations " seraient expressément exclues de la couverture de la police. Cela peut entraîner des lacunes dans la protection d'assurance pour des incident passés ou futurs, ce qui pourrait aggraver le risque de responsabilité auquel sont exposés les administrateurs de la société.

En résumé, il est généralement dans l'intérêt du conseil d'administration de s'assurer que la société dispose d'une police d'assurance pour les cas d'abus et/ou de harcèlement sexuel et, si possible, que cette police soit négociée " sur la base des événements ".

Sociétés à vocation caritative
Tous les commentaires qui précèdent au sujet de l'assurance pour les sociétés sans but lucratif s'appliquent également aux sociétés à vocation caritative, sauf pour l'achat des polices d'assurance-responsabilité à l'intention des administrateurs et des dirigeants. En Ontario, comme nous l'avons expliqué précédemment, le Bureau du Curateur public général a adopté la position que l'achat d'une assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants par une société à vocation caritative conférait un avantage personnel aux administrateurs. Cependant, le règlement en vertu de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance (Ontario) permet maintenant aux sociétés à vocation caritative d'acheter de l'assurance à l'intention des administrateurs et des dirigeants, pourvu que ces derniers se conforment aux exigences énoncées dans le règlement. (Pour un résumé du règlement ontarien et une analyse des dispositions législatives en vigueur dans d'autres sphères de compétence, veuillez consulter la rubrique Sociétés à vocation caritative de la section du présent chapitre traitant de l'indemnisation.)

Protection d'origine législative

Considérations générales
Dans une large mesure, les administrateurs des sociétés sans but lucratif ne bénéficient pas de la même protection législative que leurs homologues des sociétés commerciales. La Loi sur les corporations canadiennes n'offre qu'un nombre limité de mécanismes de protection législatifs aux administrateurs des sociétés sans but lucratif. Ces mécanismes sont décrits ci-dessous.

Protection contre la responsabilité civile en matière de contrat
En vertu de la Loi sur les corporations canadiennesnote 6, les administrateurs et les dirigeants d'une société sans but lucratif ne sont pas, dans le cours normal des affaires, assujettis à une responsabilité personnelle à l'égard de tiers lorsqu'ils concluent un contrat, un accord ou un engagement avec une autre entité, aussi longtemps qu'ils agissent dans le cadre de leurs attributions à titre de représentants ou d'employés de la société. (À noter, toutefois, que dans ces transactions, l'article 27 de la Loi tient les administrateurs éventuellement responsables dans les circonstances où l'identification de la société est inexacte ou incomplète dans l'instrument écrit de la transaction.)

Protection à l'égard des conflits d'intérêts
Les administrateurs des sociétés sans but lucratif ont le devoir d'éviter de se placer en conflit d'intérêts et même d'une apparence de conflit d'intérêts. Cela signifie que si un administrateur profite directement ou indirectement de ses transactions avec la société sans but lucratif, ou de la fonction qu'il y occupe, il violera sa responsabilité fiduciaire et sera tenu de rendre des comptes à la société pour les avantages ainsi reçus. Cependant, la Loi sur les corporations canadiennes a assoupli cette règle de common law en permettant aux administrateurs de conclure des arrangements par ailleurs indus sans courir le risque de manquer à son obligation fiduciaire.

La Loi sur les corporations canadiennesnote 7 affirme que s'il y a conflit d'intérêts, l'administrateur doit déclarer ce conflit à la réunion du conseil d'administration et ne prendre part à aucune discussion ni à aucun vote (voir le chapitre 2 pour un examen plus détaillé de ces dispositions). Si ces exigences législatives sont respectées, l'administrateur intéressé ne sera pas tenu de rendre compte de l'avantage reçu et il ne sera pas responsable du bénéfice touché dans le cadre de tout contrat dans lequel il détient directement ou indirectement un intérêt lorsque ce contrat a été confirmé par vote des membres à une assemblée générale spéciale convoquée à cette fin.

Autres moyens de réduire le risque de responsabilité

Il y a un certain nombre d'autres mesures pratiques qu'un conseil d'administration peut prendre afin d'atténuer le risque de responsabilité. Voici quelques-unes des mesures les plus simples qui peuvent être adoptées :

  • Constituer un comité de gestion du risque juridique pour identifier les aspects à risque, recommander des mesures correctives et, de façon générale, donner des avis au conseil d'administration sur la mise en place de procédures ou de mesures appropriées pour établir la diligence raisonnable du conseil.
  • Encourager les administrateurs à obtenir un avis juridique indépendant dans les situations où ils pourraient courir un risque élevé de responsabilité personnelle (par exemple lorsque la société fait face à l'insolvabilité). Cela permet aux administrateurs de déterminer de façon indépendante le niveau de risque personnel qu'ils sont prêts à accepter.
  • Réduire le nombre de personnes servant à titre de membres du conseil d'administration (réduire la probabilité qu'une mauvaise décision soit prise).
  • Recourir davantage à des comités et à des conseils consultatifs formés de personnes qui ne sont pas membres du conseil (créer une structure qui augmente les ressources tout en diversifiant la responsabilité pour la gestion de divers aspects des opérations de la société).
  • Transférer les avoirs personnels des membres du conseil à leurs conjoints avant qu'ils ne joignent les rangs du conseil d'administration.

Exemples de questions que les administrateurs actuels ou éventuels peuvent poser à l'organisation

  1. Les politiques de la société sont-elles énoncées par écrit et ont-elles été distribuées à tous les membres du conseil?
  2. La société a-t-elle procédé à une évaluation de ses risques juridiques? Quand cela a-t-il été fait? Par qui?
  3. Les règlements administratifs de la société prévoient-ils l'indemnisation des administrateurs?
  4. La société fait-elle tout ce qu'elle peut pour informer les administrateurs au sujet de litiges possibles et de les protéger dans cette éventualité?
  5. La société traite-t-elle régulièrement avec des enfants ou d'autres groupes vulnérables? La société a-t-elle mis en place une politique de sélection? Le cas échéant, quelle est-elle et comment est-elle appliquée? La politique de sélection prévoit-elle l'obtention du consentement des personnes qui feront l'objet d'une vérification de sécurité? La société dispose-t-elle d'une politique écrite sur l'abus sexuel?
  6. La société a-t-elle acquis une police d'assurance adéquate pour couvrir la responsabilité éventuelle? À quelle fréquence la protection d'assurance fait-elle l'objet d'un examen? Par qui?
  7. La société a-t-elle acquis une assurance-responsabilité à l'intention de ses administrateurs et dirigeants? Quelle est la protection offerte et quelles sont les exclusions?

Exemples de questions que les administrateurs actuels ou éventuels peuvent se poser à eux-mêmes

  1. Ai-je lu et compris toutes les politiques de la société?
  2. Est-ce que je comprends tous les risques légaux auxquels peut être exposée la société?
  3. Est-ce que je comprends les risques légaux auxquels je suis exposé en qualité d'administrateur d'une société sans but lucratif?
  4. Suis-je informé de la façon de limiter ma responsabilité à titre d'administrateur d'une société sans but lucratif?
  5. Ai-je l'assurance que les méthodes de sélection de la société sont adéquates compte tenu de la nature de ses activités?
  6. Est-ce que je comprends la protection d'assurance qui est en place pour la société et ses administrateurs?
  7. Est-ce que je comprends ce qui est couvert et ce qui ne l'est pas?

Liste de vérification — protection contre le risque

Liste de vérification — Protection contre le risque
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Diligence raisonnable  

Ensemble du conseil  

Annuellement et/ou au moment de la décision ou de la transaction  

Les exigences relatives à la diligence raisonnable ont-elles été respectées avant qu'une décision particulière ne soit prise ou qu'une transaction particulière ne soit conclue?  

2. Sélection  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Les méthodes de sélection de la société sont-elles adéquates à la lumière de ses activités actuelles? Quel est le mécanisme de surveillance de l'application des modalités de sélection et celui-ci est-il adéquat?  

3. Compter sur les gestionnaires  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Y a-t-il une supervision adéquate et régulière des gestionnaires à la lumière des responsabilités qui leur ont été déléguées?  

4. Recours à des spécialistes  

Ensemble du conseil  

Au moment de la décision ou de la transaction  

Le Conseil est-il satisfait des titres de compétence du spécialiste et de la qualité du travail ou des avis fournis? Le conseil a-t-il étudié attentivement l'avis du spécialiste avant de prendre une décision indépendante sur la question?  

5. Indemnisation  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Les règlements administratifs de la société prévoient-ils l'indemnisation et celle-ci est-elle conforme aux exigences de la législation sur la constitution en société? Si la société est une oeuvre de bienfaisance, l'indemnisation est-elle permise par la loi ou doit-elle être autorisée par un tribunal? Sinon, quelles mesures (p. ex. l'obtention d'un avis juridique) la société a-t-elle prises avant d'offrir une indemnisation?  

6. Assurances générales  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

La société a-t-elle une protection d'assurance adéquate et convenable en regard de son mandat et de ses activités? Quelle est la portée et quelles sont les restrictions des polices d'assurance qu'elle a contractées?  

7. Assurance-responsabilité pour les administrateurs et les dirigeants  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

La protection d'assurance s'étendelle au travail des comités auxquels participent des membres du conseil et/ou au travail des comités dont les membres ne font pas partie du conseil? S'étend-elle aux personnes qui pourraient intervenir dans la gouvernance de la société même si elles ne siègent pas à titre de membre du conseil — par exemple des membres de conseils consultatifs? Sinon, une assurance est-elle nécessaire et prévue pour ces situations?  

8. Autres mesures visant à atténuer la responsabilité  

Ensemble du conseil et administrateurs à titre individuel  

Annuellement  

Les administrateurs, collectivement et individuellement, ont-ils pris toutes les mesures possibles pour limiter leur risque de responsabilité?  


* B.A., LL.B. Le cabinet de monsieur Carter, Carter & Associates (www.charitylaw.ca) est établi à Orangeville, en Ontario. Il agit à titre de conseilller juridique auprès du cabinet Fasken, Martineau, DuMoulin LLP, à Toronto. L'auteur tient à souligner la collaboration précieuse de Jacqueline Connor, associée au sein du cabinet Carter & Associates, qui a révisé le présent chapitre, ainsi que de Wen Wu, étudiant en droit, pour son aide au niveau de la recherche.

Chapitre 7 : Fiscalité

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


David Stevens *
Goodman & Carr, LLP et Faculté de droit, Université McGill

Introduction **

Les organismes de bienfaisance enregistrés et les autres sociétés sans but lucratif bénéficient d'un traitement fiscal spécial. Toutes les sociétés sans but lucratif sont exemptées de l'impôt sur le revenunote 1. En outre, les organismes de bienfaisance enregistrés peuvent émettre des reçus de dons, lesquels accordent un crédit d'impôt aux donateurs individuels et une déduction fiscale aux sociétés donatricesnote 2. Afin de conserver leur statut spécial, les sociétés sans but lucratif et les organismes de bienfaisance enregistrés doivent se conformer à certaines exigences de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Au Québec, un régime d'enregistrement parallèle est en place et ses exigences correspondent à celles en vigueur au palier fédéral.

La législation et la réglementation fiscales régissant les organismes sans but lucratif et, en particulier, les organismes de bienfaisance, sont assez restrictives. Selon l'objectif visé, il est possible de s'accommoder de certaines restrictions réglementaires en organisant les activités en plusieurs sociétés interdépendantes. Certaines de ces structures imbriquées sont examinées à la fin du présent chapitre.

Sociétés sans but lucratif

De façon générale, les sociétés sans but lucratif qui ne sont pas des organismes de bienfaisance et qui entrent dans la définition d'" organismes sans but lucratif " de l'alinéa 149(1)(l) de la Loi de l'impôt sur le revenu, ne versent pas d'impôt sur le revenu. Elles sont assujetties à l'impôt sur le revenu provenant de placements ou de biens et peuvent être assujetties à d'autres formes d'impôts — par exemple, la taxe sur les produits et services, la taxe de vente ou les impôts fonciers. Dans certains cas, les sociétés sans but lucratif peuvent être admissibles à des exemptions ou à des taux préférentiels si elles se conforment à la définition ou aux exigences énoncées dans la loi ou le règlement établissant un impôt. Pour conserver son statut d'organisme sans but lucratif aux fins d'être exemptée de l'impôt sur le revenu, une société sans but lucratif ne doit permettre qu'aucun revenu provenant des opérations de la société ne profite personnellement aux membres. Il y a une exception limitée à cette exigence pour certaines associations athlétiques amateuresnote 3. Il est interdit aux organismes sans but lucratif de gagner et d'accumuler des revenus excédentaires au-delà de ce qui est considéré raisonnable pour réaliser les buts de l'organisationnote 4.

Organismes de bienfaisance

La Loi de l'impôt sur le revenu accorde aux " organismes de bienfaisance enregistrés " et aux " donataires reconnus " le droit d'émettre des reçus officiels de dons. Selon la définition de la Loi de l'impôt sur le revenu, les donataires reconnus englobent les organisations qui n'ont pas nécessairement une vocation caritative selon la loi, mais que le gouvernement estime mériter d'être soutenues par des donsnote 5.

Les donataires reconnus englobent, sans toutefois s'y limiter, les associations canadiennes de sport amateur, les municipalités canadiennes, les Nations Unies et ses organismes, ainsi que certaines universités et oeuvres de bienfaisance étrangères.

Organismes de bienfaisance enregistrés
Un " organisme de bienfaisance enregistré " est défini dans la Loi de l'impôt sur le revenu comme une " oeuvre de bienfaisance, une fondation privée ou une fondation publique " résidante au Canada qui a été établie ou créée au Canada et qui est enregistrée auprès du ministre du Revenu nationalnote 6. Les expressions "oeuvre de bienfaisance ", " fondation privée " et " fondation publique " sont définies et réglementées séparément en vertu de la Loinote 7.

Tous les organismes de bienfaisance enregistrés doivent être " exclusivement à des fins de bienfaisance " tant par leur mandat qu'en réalité. Bien que la Loi de l'impôt sur le revenu définisse presque toutes les activités admissibles et non admissibles des organismes de bienfaisance enregistrés en fonction de cette norme, elle ne définit pas le terme " bienfaisance ". Plutôt, l'Agence des douanes et du revenu du Canada et les tribunaux se sont appuyés sur la définition de bienfaisance en common law. Il y a deux sources principales pour cette définition en common law : le préambule de 1601 du Statute of Elizabeth, et le critère établi dans les motifs invoqués par Lord Macnaghten dans le jugement rendu par la Chambre des Lords en 1891 dans la cause Commissioner for Special Purposes of the Income Tax v. Pemselnote 9.

Le préambule (transcrit d'un style archaïque à un style modernenote 10) définit le terme bienfaisance ainsi (traduction) :

Le secours aux personnes âgées, invalides et pauvres … l'entretien des soldats et des marins malades et blessés, les écoles d'apprentissage, les écoles libres et les universités … la réparation des ponts, des ports, des havres, des chaussées, des églises, des banquettes et des routes … l'éducation et l'avancement des orphelins … l'aide, l'approvisionnement ou l'entretien des maisons de correction … les mariages des domestiques démunis … le soutien, l'aide et l'assistance aux jeunes ouvriers et artisans et aux personnes invalides … le secours ou le salut des prisonniers ou des captifs, ainsi que l'aide ou le soulagement de tous les habitants démunis pour le paiement des fifteens, et le règlement des taxes de soldat et autres taxesnote 11.

Même si le Statute of Elizabeth a été abrogé depuis longtemps, le préambule a été " intégré " à la common law et continue d'influencer la jurisprudence dans les pays du Commonwealth pour ce qui est de la définition de bienfaisance. Le lecteur moderne est sensé en faire une lecture par analogie avec son époque.

Dans Pemsel, Lord Macnaghten a élaboré la classification suivante des organismes de bienfaisance (traduction) :

" Organisme de bienfaisance ", dans son sens juridique, englobe quatre grandes divisions : les fiducies destinées à soulager la pauvreté, les fiducies pour l'avancement de l'éducation, les fiducies pour l'avancement de la religion et les fiducies à d'autres fins bénéfiques pour les collectivités qui n'entrent pas dans l'une des divisions qui précèdentnote 12.

Le critère de Pemsel est une classification et non une définition, mais il constitue un point de départ utile pour l'analyse des " organisme de bienfaisance ".

Ces deux critères, ainsi que l'abondante jurisprudence consacrée à leur interprétation et à leur application, ont joué un rôle particulièrement important dans le droit des fiducies, où il est essentiel de définir l'expression " exclusivement à des fins de bienfaisance " pour établir la validité d'une fiducie à buts sous réserve de quelques exceptions mineures. La même exigence s'applique aux entités qui souhaitent s'enregistrer en tant qu'organismes de bienfaisance en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. En appliquant ces critères, les tribunaux exigent que l'objet de l'entité,ou de la fiducie soit exclusivement à des fins de bienfaisance et que l'entité ou la fiducie soit constituée pour le " bien public ". Cela signifie, en termes généraux, que l'organisme de bienfaisance doit se consacrer vraiment aux fins de bienfaisance pertinentes, pour le bénéfice d'un segment suffisamment large de la société, " le public ".

Oeuvres de bienfaisance
Les oeuvres de bienfaisance se distinguent des fondations par leur orientation active — en général, les oeuvres de bienfaisance mènent leurs propres activités caritatives. Une oeuvre de bienfaisance doit consacrer toutes ses ressources aux activités caritatives qu'elle poursuit. Elle ne doit pas distribuer ou permettre l'accès à une part quelconque de ses revenus à, ou pour le bénéfice, de personnes ou parties autres que les bénéficiaires visés.

Certaines exceptions s'appliquent à divers aspects des exigences que ces organismes doivent habituellement respecter. Les oeuvres de bienfaisance peuvent verser des subventions à des donataires reconnus pour un total ne dépassant pas 50 p. 100 de leur revenu au cours d'une année. Elles sont autorisées à mener " des activités commerciales complémentaires ". Enfin, elles peuvent verser leur revenu à une oeuvre de bienfaisance " connexe "note 13. Les oeuvres de bienfaisance peuvent être organisées sous la forme de fiducies, de sociétés ou d'associations.

Exemple
Subvention — une organisation qui ne possède pas une infrastructure très développée dans un secteur géographique qu'elle a le mandat de servir peut verser des subventions à une organisation locale (elle-même un organisme de bienfaisance enregistré) de cette localité pour atteindre ses buts.

Exemple
Activité commerciale complémentaire -un organisme de service social peut exploiter un magasin d'occasions pour appuyer son travail,ou encore un hôpital peut exploiter une cafétéria et verser les bénéfices provenant de la vente des aliments à ses recettes générales.

Exemple
Oeuvre de bienfaisance connexe — une organisation peut financer une organisation connexe (elle-même un organisme de bienfaisance enregistré), qui a pour mandat d'exécuter une partie de son travail, par exemple le chapitre provincial d'une organisation nationale.

Fondations
Les fondations se caractérisent par une orientation passive — de façon générale, elles financent des activités de bienfaisance entreprises par d'autres organisations. Les fondations peuvent être constituées et exploitées exclusivement à des fins de bienfaisance. L'expression " fins de bienfaisance " englobe le versement de fonds à des donataires reconnus (y compris des organismes de bienfaisance enregistrés)note 14. Le revenu d'une fondation ne peut, même en partie, servir à procurer un avantage personnel à toute personne ou partie qui n'est pas un bénéficiaire visé dans les objets de la fondationnote 15. Les fondations doivent être organisées sous forme de fiducie ou de société. Elles ne peuvent être organisées sous forme d'association non constituée en sociéténote 16.

Dirigeants des organismes de bienfaisance enregistrés et sources de capital
La Loi de l'impôt sur le revenu renferme des dispositions traitant de la composition de la direction (dirigeants, administrateurs et fiduciaires, etc.) des organismes de bienfaisance enregistrés et de leurs sources de capital).

De façon générale, si l'organisme de bienfaisance enregistré doit être une oeuvre de bienfaisance ou une fondation publique, plutôt qu'une fondation privée, plus de 50 p. 100 de ses dirigeants ne doivent pas avoir de lien de dépendance les uns avec les autres ou avec les autres membres de la directionnote 17, et pas plus de 50 p. 100 de son capital doit avoir été versé par une personne, ou par un groupe de personnes qui ne traitent pas entre elles sans lien de dépendance. La détermination d'un lien de dépendance est faite en examinant le lien de parenté et/ou d'affaires ou tout autre lien entre les parties. Si l'organisme de bienfaisance enregistré est classé comme fondation privée, il est alors assujetti à une réglementation plus rigoureuse.

La Loi de l'impôt sur le revenu prévoit une exception permettant, dans certains cas, à des gouvernements, des oeuvres de bienfaisance, des fondations publiques, des clubs, des sociétés et des associations d'établir des fondations publiques ou des oeuvres de bienfaisance en y versant 50 p. 100 ou plus du capitalnote 18.

Processus d'enregistrement des oeuvres de bienfaisance
Les examinateurs de la Direction des organismes de bienfaisance de l'Agence des douanes et du revenu du Canada décident si un organisme qui demande à être enregistré comme oeuvre de bienfaisance auprès du gouvernement fédéral est admissible après une évaluation de la mesure dans laquelle cet organisme satisfait à la définition juridique d'une oeuvre de bienfaisance telle qu'indiquée précédemment.

L'Agence des douanes et du revenu du Canada n'est pas tenue d'accorder une audience ou de recevoir les représentations du demandeur. Cependant, la Direction des organismes de bienfaisance a mis en place une procédure uniformisée pour obtenir des précisions ou des renseignements supplémentaires dans le cas des demandes qui s'avèrent problématiques. Le demandeur peut porter en appel une décision négative auprès de la Cour d'appel fédérale.

Retrait de l'enregistrement
Une oeuvre de bienfaisance peut perdre son enregistrement pour les raisons suivantesnote 19 :

  • le défaut de se conformer à l'obligation de déposer annuellement une déclaration de renseignements;
  • l'émission de reçus de dons irréguliers ou frauduleux;
  • le défaut de se conformer à toute exigence liée à l'enregistrement, y compris :
    • mener toute entreprise, s'il s'agit d'une fondation privée, ou une activité commerciale non complémentaire, s'il s'agit d'une oeuvre de bienfaisance ou d'une fondation publique
    • s'il s'agit d'une fondation, acquérir le contrôle de toute société ou contracter certaines formes d'emprunts;
    • tenter de retarder indûment les dépenses destinées à des activités de bienfaisance en transférant des montants à une autre oeuvre de bienfaisance;
    • omettre de débourser une proportion fixe de ses avoirs ou de ses fonds reçus au cours de l'année précédente à des fins ou pour des activités de bienfaisance; ou
    • omettre de conserver des registres et des livres de comptes appropriés.

La décision de révoquer l'enregistrement est prise par le Ministre en vertu du paragraphe 168(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le Ministre donne avis de son intention de révoquer par courrier enregistré et offre à l'oeuvre de bienfaisance la possibilité d'y répondre.

La plupart des révocations découlent de l'omission de déposer la déclaration de renseignements. Parfois, une révocation est déclenchée par une vérification. Lorsque la révocation découle d'une omission de produire une déclaration, l'organisme ne devrait pas prendre pour acquis que son enregistrement sera renouvelé automatiquement une fois les formalités complétées. Des changements dans la définition légale d'une oeuvre de bienfaisance pourraient signifier que l'organisme n'est plus admissible.

La révocation peut survenir rapidement, soit trente jours après la publication, dans la Gazette du Canada, de la décision du Ministre de révoquer l'enregistrement d'un organisme, bien que le processus prenne habituellement un peu plus de temps. L'oeuvre de bienfaisance peut porter appel auprès de la Cour d'appel fédéralenote 20.

Réglementation des organismes de bienfaisance

La Loi de l'impôt sur le revenu et/ou l'Agence des douanes et du revenu du Canada réglementent les placements, les activités commerciales, les activités politiques, les emprunts, les subventions et les activités internationales des oeuvres de bienfaisance. La Loi de l'impôt sur le revenu impose aussi certains niveaux de déboursés à toutes les oeuvres de bienfaisance. Les règlements qui s'appliquent aux oeuvres de bienfaisance peuvent être ramenés à deux règles fondamentales :

1) Une oeuvre de bienfaisance doit se consacrer exclusivement à des fins de bienfaisance.
Les fondations doivent être constituées et exploitées exclusivement à des fins de bienfaisance. Les oeuvres de bienfaisance doivent consacrer " toutes leurs ressources … à des activités de bienfaisance menées par l'organisation elle-même ". Cela signifie qu'une oeuvre de bienfaisance ne peut poursuivre une autre fin — commerciale, d'investissement, politique — sauf dans la mesure où celle-ci est complémentaire et auxiliaire des fins de bienfaisance ou représente un moyen d'atteindre ces fins. De nombreuses règles examinées dans le présent chapitre soit imposent des exigences plus spécifiques en regard de ce critère, soit font place à certaines pratiques acceptables.

2) Une oeuvre de bienfaisance doit dépenser un certain pourcentage de ses fonds dans le cadre d'une activité de bienfaisance.
La Loi de l'impôt sur le revenu exige que la fonction de bienfaisance se déroule en respectant un certain seuil quantifiable, en obligeant l'organisme à débourser un certain niveau de ressources dans le cadre d'activités de bienfaisance. Ces niveaux ne sont pas les mêmes pour les oeuvres de bienfaisance et les fondations. Ces déboursés obligatoires sont appelés " contingent des versements ".

Contrôle de sociétés
Les fondations ne peuvent " acquérir le contrôle " d'une société. Cette interdiction ne s'applique pas, cependant, à une fondation qui acquiert le contrôle d'une société par voie de don.

Placements
La Loi de l'impôt sur le revenu n'exige pas que les placements d'un organisme de bienfaisance rapportent un taux de rendement donné. Elle ne traite que de façon indirecte de la question du rendement sur l'investissement, en imposant un contingent des versements de 4,5 p. 100 aux fondations. Les fondations privées sont assujetties à des règles plus détaillées et restrictives pour empêcher la manipulation de transactions en vue de réduire artificiellement le contingent des versements, et pour éviter que des personnes ou des parties qui ont un lien de dépendance avec la fondation privée ne reçoivent des avantages financiersnote 21.

Activités commerciales
Un organisme de bienfaisance enregistré, qu'il s'agisse d'une oeuvre de bienfaisance ou d'une fondation, n'a pas le droit de mener une activité commerciale non complémentaire. Cela constituerait une infraction à l'exigence relative aux fins exclusivement de bienfaisance.

Les oeuvres de bienfaisance peuvent toutefois avoir des activités commerciales complémentaires. Une oeuvre de bienfaisance qui a des activités commerciales complémentaires est considérée, en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, comme affectant l'ensemble de ses ressources à ses activités de bienfaisance.

Rien dans la Loi de l'impôt sur le revenu ne vise explicitement les fondations publiques à cet égard. Par conséquent, celles-ci sont autorisées à avoir des activités commerciales complémentaires.

Par contre, il est explicitement interdit aux fondations privées d'avoir quelque activité commerciale, complémentaire ou nonnote 22.

Activités politiques
Les organismes de bienfaisance enregistrés sont autorisés à participer à des activités politiques en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, mais de façon très limitée. Ce droit est encadré par deux ensembles de règles, la première ayant trait à la définition d'une oeuvre de bienfaisance et la seconde, au contingent des versements.

  • Les organismes de bienfaisance enregistrés sont autorisés à participer à des activités politiques connexes ou accessoires aux objets de bienfaisance de l'organisme. L'activité politique est acceptable pourvu que l'organisme de bienfaisance consacre " essentiellement la totalité " de ses ressources à des fins de bienfaisance et uniquement une partie des ressources à des activités politiques non partisanes de nature " plutôt accessoire et connexe ". Les " ressources " comprennent toutes les ressources financières, matérielles et humaines que possède l'organisme de bienfaisance ou qui sont à sa disposition, et non uniquement celles qui proviennent des dons recueillis. L'Agence des douanes et du revenu du Canada définit l'expression " sensiblement toutes " comme étant 90 p. 100 ou plus des ressourcesnote 23.
  • Les organismes de bienfaisance enregistrés doivent respecter leur contingent des versements au moment de consacrer des ressources à des activités politiques, ce qui impose une restriction supplémentaire à ces activités. Le montant dépensé par un organisme de bienfaisance enregistré pour des activités politiques n'est pas compté parmi les dépenses liées à des activités de bienfaisance ou comme un don fait à un donataire reconnu aux fins de respecter le contingent des versementsnote 24. Étant donné que ces contingents sont assez élevés, il y a donc peu de place dans les budgets de la plupart des organismes de bienfaisance pour faire des dépenses politiques admissibles.

Activités d'emprunt
Les oeuvres de bienfaisance peuvent faire des emprunts si l'autorité nécessaire est prévue dans leurs règlements administratifs. Les fondations ne sont pas autorisées à contracter des dettes à des fins autres que les dépenses d'exploitation courantes, l'achat de placements et les dépenses administratives.

Activités internationales
Un organisme de bienfaisance enregistré doit être résidant du Canada. Cela limite sensiblement la mesure dans laquelle les Canadiens et les organismes de bienfaisance canadiens peuvent avoir des activités de bienfaisance à l'étranger. Cependant, il y a trois façons dont un organisme de bienfaisance enregistré peut faire du travail de bienfaisance hors du Canada en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu.

  • Un organisme de bienfaisance enregistré peut mener ses propres activités de bienfaisance à l'étranger. En termes pratiques, toutefois, cette option est ouverte uniquement à quelques organismes de bienfaisance déjà bien établis, par exemple les organismes de secours, qui ont les ressources financières et administratives nécessaires pour envoyer des gens à l'étranger.
  • L'alinéa 110.1(1)(a) et le paragraphe 118.1(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu permettent des déductions et des crédits pour les dons aux Nations Unies ou à l'un de ses organismes, à des universités étrangères prescrites et à des organismes de bienfaisance hors du Canada auxquels le gouvernement canadien a récemment fait un don. Cela permet un niveau limité d'activité de bienfaisance à l'échelle internationale, mais la liste des donateurs admissibles est très restreinte.
  • Une oeuvre de bienfaisance canadienne peut conclure une entente de représentation avec une entité, habituellement une oeuvre de bienfaisance étrangère, qui effectuera du travail de bienfaisance à l'étranger pour le compte de l'organisme de bienfaisance canadien.

Traitement des dons aux organismes de bienfaisance enregistrés et donataires reconnus

Dons
Il n'y a pas de définition du terme " don " dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Par conséquent, les tribunaux utilisent la définition de ce terme provenant du droit privé — c'est-à-dire la common law ou le droit civil — au moment d'appliquer les dispositions de la Loi. La définition d'un don, en common law, est énoncée dans Friedberg c. MRNnote 25 :

Un don est un transfert volontaire d'un bien détenu par un donateur à un donataire, en contrepartie duquel le donateur ne reçoit aucun avantage ou considérationnote 26.

De façon similaire, l'article 1806 du Code civil du Québec définit ainsi un don :

La donation est le contrat par lequel une personne, le donateur, transfère la propriété d'un bien à titre gratuit à une autre personne, le donataire; le transfert peut aussi porter sur un démembrement du droit de propriété ou sur tout autre droit dont on est titulaire.

La position de l'Agence des douanes et du revenu du Canada sur l'interprétation à donner au terme "don " est énoncée clairement et de façon détaillée dans le Bulletin d'interprétation IT 110-R3, " Dons et reçus officiels de dons "note 27. Le Bulletin d'interprétation IT 110-R3 définit ainsi un don :

Un don … est un transfert volontaire de biens sans contrepartie de valeur. Habituellement, il y a don si les trois conditions énumérées ci-dessous sont réunies :

  1. des biens, normalement des espèces, sont transférés par un donateur à un organisme de bienfaisance enregistré;
  2. le transfert est volontaire;
  3. le transfert s'effectue sans perspective de rendement. Le donateur ou toute personne désignée par lui ne doit s'attendre à recevoir aucun avantage de quelque nature que ce soit, sauf si l'avantage a une valeur nominalenote 28.

Un don est un transfert de biens, non de services. Aucun crédit d'impôt pour don ne peut être obtenu pour la prestation de services sans rémunération ou rétributionnote 29. Un professionnel qui souhaite obtenir un reçu de don pour le temps et les compétences professionnelles qu'il a fournis à une oeuvre de bienfaisance doit d'abord facturer celle-ci pour les services rendus et ensuite faire don du montant qu'il a reçu en paiement à l'oeuvre de bienfaisance.

Un don peut être le don d'une participation légale ou en équité, de sorte qu'une disposition de bien en fiducie par laquelle un intérêt résiduel en équité est créé en faveur d'une oeuvre de bienfaisance est un don de cet intérêt résiduel en équité.

Le prêt d'un bien n'est pas un don de ce bien parce qu'aucun titre ou droit de propriété n'est transféré en vertu du prêt.

Les dons en nature sont des dons de bien. Un don en nature est habituellement évalué au montant qui aurait été reçu pour ce bien s'il avait été vendu sur le marché libre à une partie non liée et informée, à la date à laquelle le don a été fait.

Le transfert ne peut être un transfert en conformité d'une obligation légale. Ainsi, l'Agence des douanes et du revenu du Canada a récemment statué qu'un don fait en vertu d'une obligation légale de le faire — par exemple une promesse par un enfant de faire don de biens reçus par legs d'un parent — n'est pas un donnote 30.

Pour qu'il y ait don, le bien doit être transféré à l'oeuvre de bienfaisance. Mais le transfert peut, dans certains cas, être assujetti à des conditions et à des restrictions. Cela permet la création de dons " sur instruction " ou " sur désignation " du donateur. Des restrictions relatives aux usages d'un don peuvent aussi être imposées par la création d'une fiducie à des fins de bienfaisance.

L'Agence des douanes et du revenu du Canada ne permet pas que des dons soient destinés à des personnes ou à des familles spécifiques. Cela signifie qu'une oeuvre de bienfaisance ne peut accepter un don assorti de la condition que celui-ci soit donné à une autre personne.

L'Agence des douanes et du revenu du Canada a pour position que le transfert d'un terrain d'une valeur de 100 000 dollars grevé d'une hypothèque de 25 000 dollars, assumée par l'oeuvre de bienfaisance, pourrait ne pas être un don parce que l'organisme — en assumant une obligation aux termes de l'hypothèque — pourrait accorder une contrepartie au donateur. Plus précisément, si le donateur a garanti l'hypothèque par un engagement personnel, le fait qu'il soit libéré de cette obligation constitue une contrepartie de valeur.

Exemple
L'Agence canadienne des douanes et du revenu a pour position que le transfert d'un terrain d'une valeur de 100 000 dollars grevé d'une hypothèque de 25 000 dollars, assumée par l'oeuvre de bienfaisance, pourrait ne pas constituer un don parce que l'organisme de bienfaisance — en assumant la responsabilité aux termes de l'hypothèque — pourrait se trouver à accorder une contrepartie au donateur. Plus précisément, si le donateur avait garanti l'hypothèque en donnant un engagement personnel, la libération de cette obligation constitue une contrepartie de valeur.

Il y a trois exceptions à cela. Dans le Bulletin d'interprétation IT 110R3, l'Agence des douanes et du revenu du Canada précise qu'elle permet à un organisme de bienfaisance d'émettre un reçu pour la partie, correspondant à un don, des paiements fait à une oeuvre de bienfaisance lors d'une levée de fonds, par exemple un dîner ou un tournoi de golf. Elle adopte une approche semblable à l'égard des frais de scolarité payés pour un enseignement religieux et pour les rentes aux fins de bienfaisance.

Divers jugements rendus ces dernières années ont généralement appuyé la position adoptée par l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Il est utile de mentionner en particulier le jugement rendu dans la cause Woolner c. le Procureur général du Canadanote 31, où la Cour d'appel fédérale est arrivée à la conclusion que les dons à une église n'étaient pas des dons. Les contribuables avaient versé des contributions à leur église et reçu en échange des reçus pour dons de bienfaisance. L'église utilisait les fonds pour accorder des bourses d'études aux enfants des personnes qui étaient à l'origine de ces contributions. Le tribunal a conclu que les requérants avaient versé ces contributions en anticipant que leurs enfants obtiendraient une bourse, non parce qu'ils souhaitaient faire un don à l'église.

Le traitement des dons assortis d'un reçu
Le crédit pour les particuliers
Les personnes qui font des dons à un organisme de bienfaisance enregistré ou à un autre donataire reconnu ont droit à un crédit d'impôt fédéral. Celui-ci s'applique au total des dons jusqu'à concurrence de 75 p. 100 du revenu du donateur pour l'année. Cette proportion monte à 100 p. 100 du revenu du donateur pour l'année de son décès et l'année précédant celle de son décès. Les " dons de biens culturels " et les " dons de biens écosensibles " peuvent être réclamés jusqu'à concurrence du revenu total du particulier pour l'année. Ces expressions sont définies dans la Loi de l'impôt sur le revenu.

Les crédits fédéraux équivalent à 16 p. 100 de la première tranche de 200 dollars de don et à 29 p. 100 du montant excédentaire. Les crédits provinciaux varient d'une province à l'autre, allant d'un plafond de 24,5 p. 100 au Québec à un plancher de 11,16 p. 100 en Ontario.

Les crédits pour dons peuvent être reportés de façon prospective pendant cinq ansnote 32. Le crédit d'impôt pour les dons faits par le contribuable au cours de l'année de son décès peut être appliqué à l'année précédente s'il ne peut être utilisé entièrement pour l'année du décèsnote 33.

Les personnes peuvent réclamer le crédit pour les reçus émis au nom d'un conjoint.

Contingents de versements
Les organismes de bienfaisance enregistrés sont tenus de consacrer un pourcentage spécifique de leur revenu à des activités de bienfaisance ou à des dons à des donataires reconnus. En règle générale, les coûts administratifs directement liés au fonctionnement de l'organisme sont admissibles à titre d'activités de bienfaisance, mais les coûts des activités de levée de fonds et des services juridiques et comptables ne le sont pas.

Le contingent pour les organismes de bienfaisance
Un organisme de bienfaisance doit dépenser au moins 80 p. 100 des dons reçus au cours de l'année précédente dans le cadre d'activités de bienfaisance ou en dons à des " donataires reconnus ". L'autre 20 p. 100 représente la part des recettes de l'organisme de bienfaisance qui, de l'avis du gouvernement, peut servir à des fins autres que de bienfaisance, par exemple les frais d'administration et de collecte de fonds et les activités politiques. Le fait que seulement les dons assortis d'un reçu soient inclus signifie que les biens provenant d'organismes exemptés de l'impôt (les gouvernements et les organismes sans but lucratif) et de non-résidents, ainsi que les dons pour lesquels un reçu n'a pas été émis n'entrent pas dans le calcul du montant des dons qui doivent donner lieu à des versements. Les dons provenant de donateurs qui ne demandent pas de reçu sont exclus, comme les dons faits par legs ou héritage et les dons assujettis à une fiducie ou à la condition que le bien donné (ou le bien substitué) soit détenu pour une période d'au moins dix ansnote 34. Les dons entre deux organismes de bienfaisance enregistrés sont aussi exemptésnote 35. Ces exceptions visent à permettre aux organismes de bienfaisance de constituer une dotation en capital à même les dons destinés à cette fin.

Dans certains cas, le contingent des versements ne peut être respecté. L'organisme de bienfaisance peut alors s'adresser au Ministre afin d'obtenir une exemption discrétionnaire à l'égard du manque à versernote 36. La Loi de l'impôt sur le revenu renferme aussi une disposition prévoyant le report prospectif de tout excédent par rapport au contingent des versements sur les cinq années suivantes et le report rétrospectif sur une annéenote 37. Le Ministre permet aussi que l'écart par rapport au contingent des versements au cours d'une année soit corrigé en augmentant les dépenses de façon correspondante l'année suivante.

Le contingent pour les fondations publiques
Le contingent qui s'applique aux fondations publiques représente le total d'un certain nombre d'éléments distincts :

  • Les fondations publiques doivent débourser 80 p. 100 des dons pour lesquels elles ont émis un reçu au cours de l'année précédente, sauf les dons reçus sous forme de capital ou ceux provenant d'autres oeuvres de bienfaisance.
  • Les fondations publiques doivent débourser 80 p. 100 de tous les dons reçus en provenance d'organismes de bienfaisance enregistrés au cours de l'année précédente, sauf les " dons désignés ". La disposition relative aux dons désignés permet un transfert de capital, sans conséquence fiscale, entre des oeuvres de bienfaisance. Si l'oeuvre de bienfaisance qui fait le don a invoqué la disposition relative aux dons désignés, elle ne peut compter ce montant dans son propre contingent des versements.
  • Les fondations publiques doivent aussi débourser 4,5 p. 100 de la valeur totale moyenne de tous les biens d'investissement, calculé d'une façon spécifiée, qu'elles possédaient au cours de la période de 24 mois précédentenote 38. L'hypothèse sous-jacente est que la fondation devrait tirer un taux de rendement réel sur ses placements d'environ 4,5 p. 100, ou légèrement supérieur à ce niveau. Le contingent des versements est calculé de manière à ce qu'il y ait peu de possibilité d'accroître le capital grâce aux gains faits sur les placements à long terme.

Les dispositions qui prévoient des exceptions au contingent des versements des organismes de bienfaisance, à la discrétion du Ministre, et qui permettent le report rétrospectif ou prospectif des surplus par rapport à ces contingents s'appliquent également aux fondations publiques.

Le contingent pour les fondations privées
Le contingent des versements pour les fondations privées est le même que pour les fondations publiques, sauf qu'une fondation privée doit débourser 100 p. 100 de la valeur de ses dons non désignés reçus d'organismes de bienfaisance enregistrés, au lieu de 80 p. 100 dans le cas des fondations publiques.

Recherche du contingent le plus avantageux et de moyens d'éviter de faire des versements
Le Ministre a le pouvoir de désigner une oeuvre de bienfaisance sous l'une ou l'autre des trois catégories d'enregistrementnote 39. Ce pouvoir est utilisé pour empêcher qu'une oeuvre de bienfaisance évite les contingents de versements plus rigoureux en manipulant le système de classification.

Structures de la société

De nombreux modes de planification s'offrent pour contourner certaines des difficultés que soulèvent les règles régissant les oeuvres de bienfaisance examinées dans ce chapitre.

Une difficulté que rencontrent fréquemment les oeuvres de bienfaisance a trait aux restrictions qui s'appliquent à la participation à des activités politiques. La structure suivante est couramment employée pour atténuer cette difficulté :

Une société sans but lucratif qui ne peut obtenir le statut d'organisme de bienfaisance, habituellement parce qu'elle a des activités partisanes, peut constituer une société sans but lucratif parallèle pour mener les activités de bienfaisance que prévoit son mandat, par exemple des activités éducatives (figure A). Chaque organisation mènera ses propres activités de façon distincte, bien qu'il soit possible qu'elle partage des locaux et du personnel. Le cas échéant, ces modalités doivent être commercialement raisonnables, de sorte q(Figure A)ue l'on ne puisse faire valoir de façon plausible que la société de bienfaisance subventionne les activités de la société à caractère politique.

 

Figure A - Cette figure montre deux sociétés différentes, SSBL "X" inc à gauche et la Fondation de bienfaisance "X" inc à droite. Les deux ont un conseil d'administration composé de Paul, Marie et de Jacob. Ces sociétés ont chacune deux membres respectivement nommés Membre 1 et Membre 2.

Il y a diverses façons d'assurer un lien approprié entre les deux entités ou de soumettre l'une au contrôle de l'autre. En loi, ce sont des entités autonomes et l'organisme de bienfaisance sera tenu de respecter toutes les exigences de la loi de l'impôt sur le revenu et des lois provinciales.

Cependant, le chevauchement des conseils d'administration ou la composition des membres, illustré à la figure A, permettra habituellement de coordonner de façon satisfaisante les activités des deux sociétés.

Un autre scénario que l'on retrouve fréquemment est celui d'un organisme de bienfaisance qui souhaite mener certaines activités commerciales au-delà de ce qui est permis dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Supposons, par exemple, qu'un organisme de bienfaisance repère et exploite une occasion commerciale dans un domaine extérieur au sien. Pourvu que certaines conditions soient respectées, il est possible pour cet organisme de bienfaisance de détenir des actions d'une société qui exerce l'activité commerciale en question. Cette société pourrait faire don ou verser en dividendes une partie ou la totalité de son revenu à l'organisme de bienfaisance (figure B).

Si la société sans but lucratif n'est pas un organisme de bienfaisance, le revenu qu'elle tire sur les biens de la société à but lucratif (dividendes et intérêts, le cas échéant) est imposable, de même que les gains en capital à la vente des actions de la société à but lucratif. Si la société sans but lucratif est un organisme de bienfaisance, elle sera habituellement autorisée à émettre des reçus pour tout don provenant de la société à but lucratif.

Les fondations (mais non les organismes de bienfaisance) ne peuvent, rappelons-le, acquérir le contrôle d'une société. Cette règle n'interdit pas aux fondations d'être en position d'exercer un contrôle après avoir reçu les actions d'une société sous forme de don. En Ontario, la Loi sur les dons de bienfaisance interdit à un organisme de bienfaisance de détenir directement ou indirectement plus de 10 p. 100 d'une entreprise. La structure illustrée à la figure C permet de contourner cette difficulté. (Figure B)

 

Figure B - Cette figure montre la SSBL "X" inc avec ses deux membres, Membre 1 et Membre 2. Une filiale dénommée Fondation de bienfaisance "X" à but lucratif ltée est illustrée avec une flèche allant à la SSBL "X" inc Au côté de la flèche, on trouve la mention "dons ou dividendes ou intérêts".

La technique du chevauchement des conseils d'administration ou de la composition des membres peut être utilisée pour faire en sorte de maintenir un niveau de contrôle approprié. (Figure C)

 

Figure C - Cette figue montre la SSBL "X" inc ainsi que deux entités apparentées, la Société à but lucratif "X" ltée et l'Organisme de bienfaisance "X" ltée Une flèche allant de la Société à but lucratif "X" ltée à l'Organisme de bienfaisance "X" ltée est illustrée de même que la mention "Dons".

Exemples de questions que les administrateurs éventuels peuvent poser à l'organisation

  1. Quel est le statut fiscal de la société?
  2. Quelles mesures ont été mises en place pour faire en sorte que les déclarations requises par l'Agence des douanes et du revenu du Canada soient produites afin de conserver ce statut?  

  3. Quelles mesures ont été mises en place pour s'assurer que l'organisme se conforme à toutes les autres obligations qui lui sont faites en vertu de la réglementation afférente à la Loi de l'impôt sur le revenu?
  4. Si les parties intéressées ont créé une structure de sociétés interdépendantes pour atteindre leur(s) objectif(s), cette structure a-t-elle été élaborée de façon appropriée et des mesures de protection sont-elles en place pour s'assurer de maintenir toute distinction juridique nécessaire entre les diverses entités?

Exemples de questions que les administrateurs peuvent se poser à eux-mêmes

  1. Les déclarations de revenus et de renseignements de la société sont-elles à jour?
  2. Les activités productives de recettes de la société sont-elles conformes aux exigences applicables afin qu'elle conserve son statut fiscal atuel? La création d'une structure sociétale différente faciliterait-elle la conduite de ce genre d'activités?
  3. Les activités de représentation et les activités politiques de la société sont-elles conformes aux exigences applicables afin qu'elle puisse conserver son statut fiscal actuel? La création d'une structure sociétale différente faciliterait-elle la conduite de ce genre d'activités?
  4. Si la société est un organisme de bienfaisance, respecte-t-elle son contingent des versements?
  5. Si la société est un organisme de bienfaisance, sa politique d'émission de reçus est-elle conforme aux exigences de l'Agence des douanes et du revenu du Canada?

Liste de vérification — fiscalité

Liste de vérification — Fiscalité
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Déclarations de revenus et de renseignements  

Ensemble du conseil, comité de vérification ou comité des finances  

Annuellement  

La société produit-elle à temps les déclarations requises?  

2. Statut fiscal  

Ensemble du conseil  

Au moment de la constitution de la société et lorsque des modifications sont apportées à son mandat  

La société a-t-elle le statut fiscal approprié (organisme de bienfaisance enregistré ou société sans but lucratif) à la lumière de ses objets et de ses activités et compte tenu des exigences de la réglementation qui s'applique à différentes catégories de statut fiscal?  

3. Statut d'organisme sans but lucratif  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

La société a-t-elle des activités pouvant être interprétées comme une source de gains monétaires personnels pour ses membres?  

4. Statut d'organisme de bienfaisance  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

La société respecte-t-elle son contingent des versements et se conforme-t-elle aux exigences de la réglementation qui s'appliquent à l'émission de reçus pour les dons?  

5. Activités produisant des revenus  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Les activités productrices de revenus, actuelles ou envisagées, nécessitent-elles l'obtention d'un statut fiscal différent, ou une structure de sociétés interdépendantes peut-elle être créée pour faciliter la conduite de telles activités?  

6. Activités de représentation et activités politiques  

Ensemble du conseil  

Annuellement  

Les activités de représentation ou les activités politiques actuelles ou envisagées nécessitent-elles l'obtention d'un statut fiscal différent, ou la création d'une structure de sociétés interdépendantes faciliterait-elle la conduite de telles activités?  


* B.A., LL.B. Cabinet établi à Toronto.

** Ce chapitre est adapté d'un texte publié pour la première fois par l'Association canadienne d'études fiscales. Voir Conference Reports : " Impacts on Charity Taxation ", 2001.

Chapitre 8 : Formation des administrateurs

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Wayne Amundson*
Président, Association Xpertise Inc.

Introduction

Aperçu
L'orientation et la formation sont deux éléments essentiels à la mise en place d'un conseil d'administration engagé et efficace. Les conseils d'administration sont encouragés à offrir une orientation formelle aux nouveaux administrateurs et aux administrateurs déjà en fonction, ainsi qu'à inclure un volet formation à chacune de leur réunion. Deux outils importants peuvent les aider dans ces initiatives : le manuel du conseil et la retraite du conseil.

Outils

Le manuel du conseil
Le manuel du conseilnote 1 joue un rôle clé dans l'orientation et la formation des nouveaux administrateurs et des administrateurs actuels. Le manuel du conseil devrait être soigneusement planifié, bien structuré et abondamment utilisé.

Initialement, le manuel du conseil sert une importante fonction d'orientation. Il fournit aux nouveaux membres du conseil (et à ceux qui reviennent siéger au conseil) des renseignements utiles sur la société, son conseil d'administration et son personnel. Pour le reste du mandat d'un administrateur, le manuel devrait constituer un outil indispensable et une ressource essentielle au sujet de la société et de son conseil.

Voici certains des éléments qui devraient figurer dans le manuel du conseil :

  • les noms des membres du conseil, leur biographie, leur mandat et un énoncé de leurs responsabilités;
  • une liste des comités et des groupes de travail, leur mandat, leur échéancier et leur composition;
  • un bref historique de la société et/ou une feuille de renseignements sur celle-ci;
  • les lettres patentes, les lettres patentes supplémentaires et les règlements administratifs;
  • les énoncés de mission et de vision;
  • le cadre ou le plan stratégique et le plan d'exploitation annuel courant;
  • les procès-verbaux des récentes réunions du conseil;
  • les politiques du conseil (par exemple sur les conflits d'intérêts, la protection d'assurance, le remboursement des dépenses);
  • le rapport annuel et le rapport de vérification de l'année précédente;
  • le budget de l'année en cours et les plus récents états financiers;
  • les résolutions bancaires et la politique d'investissement;
  • la liste actuelle des principaux bailleurs de fonds ou partenaires et/ou un diagramme des parties intéressées;
  • un organigramme et des renseignements sur le personnel;
  • le calendrier annuel;
  • le matériel promotionnel et des renseignements sur le site Web.

Pour être efficace, le manuel doit être à jour et facile à consulter. Il doit permettre l'ajout et le retrait de documents. Les documents inclus dans le manuel devraient porter une date pour faciliter la mise à jour du manuel.

Le manuel devrait être structuré en sections clairement identifiées et inclure une table des matières. Il est aussi utile de prévoir des pochettes pour y insérer les brochures et les articles semblables. Toutefois, il importe d'être sélectif. Le manuel ne devrait pas être un recueil de tous les renseignements qui existent au sujet de la société. Il devrait avoir une taille et un poids raisonnables, à défaut de quoi les administrateurs risquent de ne pas le lire et seront moins incités à l'utiliser comme outil de référence. Il faut éviter d'y consigner des éléments qui se chevauchent ou se ressemblent et, dans la mesure du possible, utiliser des sommaires plutôt que les documents plus détaillés. Cependant, les documents qui ont une incidence directe sur la responsabilité éventuelle des administrateurs, par exemple les lettres patentes et les règlements administratifs, ne devraient pas être abrégés. Une copie du manuel devrait être disponible pour fins de référence au cours des réunions du conseil.

Même si la tâche de produire ce manuel incombe habituellement au personnel, le travail devrait être fait en consultation avec les dirigeants et les administrateurs et avec leur participation. Les membres du conseil devraient évaluer régulièrement son utilité et faire des suggestions en vue de l'améliorer.

Retraites du conseil
Les retraites du conseil aident à consolider le conseil d'administration d'une société sans but lucratif et à améliorer son efficacité en donnant aux membres du conseil le temps nécessaire pour se connaître et élaborer une planification stratégique ou à long terme pour l'organisation. Étant donné les horaires chargés et les contraintes de temps auxquels sont habituellement soumis les administrateurs qui servent à titre bénévole, les réunions habituelles ne leur donnent souvent pas l'occasion de s'engager dans des discussions approfondies et de se livrer à une réflexion créatrice. La valeur des retraites est qu'elle permet au conseil de se mettre à l'abri des distractions venant de l'extérieur pour une période de temps suffisamment longue afin de pouvoir aborder des questions de stratégie et de gouvernance, y compris le développement du conseil d'administration lui-même. Ces retraites peuvent aussi fournir une occasion de faire appel à des compétences de l'extérieur pour aider à résoudre certaines questions complexes touchant à la gouvernance ou à la société.

Dans de nombreuses organisations, la tenue d'une retraite annuelle pour les membres du conseil est devenue une affaire de routine; mais dans une société sans but lucratif, l'idée d'une retraite du conseil est souvent mal accueillie par les membres ou le public. Souvent, la retraite est perçue comme une dépense extravagante. Le lieu où la retraite se tiendra et combien elle coûtera, plutôt que les raisons qui motivent cette retraite, pourraient se retrouver au centre des débats. De telles préoccupations devraient inciter les administrateurs à justifier soigneusement les avantages et le coût d'une retraite si un membre ou un bailleur de fonds s'interroge sur l'utilité d'un tel événement.

Évaluation
Le conseil d'administration devrait réserver du temps, à la fin de chaque réunion, pour évaluer celle-ci et voir comment on pourrait améliorer les réunions futures. Le conseil d'administration devrait aussi procéder annuellement à une auto-évaluation approfondie de son rendement et de celui de son président. Le rendement individuel des administrateurs devrait aussi être évalué (habituellement par le président) et une rétroaction donnée à chacun.

Individuellement, les administrateurs peuvent aussi évaluer leur propre rendement, en mettant l'accent sur leur contribution au conseil et sur les objectifs qu'ils poursuivent personnellement en siégeant au conseil.

Lorsqu'il y a de l'animosité entre certains administrateurs ou que la dynamique de groupe est mauvaise, le conseil pourrait demander l'aide d'un facilitateur de l'extérieur pour mener l'évaluation.

Enfin, le conseil devrait demander l'avis des membres ou des autres partenaires au moyen de sondages et d'autres méthodes afin de déterminer le niveau de satisfaction à l'égard de la gouvernance de la société.

Exemples de questions que les administrateurs éventuels peuvent poser à l'organisation

  1. Quels documents d'orientation sont fournis aux administrateurs? Existe-t-il un manuel du conseil?
  2. Quelles activités d'orientation et de formation sont prévues pour préparer les administrateurs à joueur leur rôle?
  3. Fait-on une évaluation formelle du conseil et de chacun des administrateurs, et une rétroaction est-elle donnée?

Exemples de questions que les administrateurs peuvent se poser à eux-mêmes

  1. Quel est le rendement attendu des administrateurs? Les attentes sont-elles définies?
  2. Comment suis-je évalué? 
     
  3. Quelle formation est prévue afin d'améliorer le rendement du conseil et des administrateurs?

Liste de vérification — formation

Liste de vérification — formation
Sujet Responsabilité Fréquence Commentaires

1. Examen du manuel du conseil  

Président du conseil et directeur général  

Annuellement  

La rétroaction des administrateurs qui ont utilisé le manuel est essentielle. L'examen devrait porter sur le contenu et la facilité d'utilisation.  

2. Déroulement des activités d'orientation  

Président du conseil et directeur général  

Annuellement  

Les besoins des administrateurs, nouveaux et actuels, devraient être pris en compte. Le manuel du conseil devrait être utilisé comme base de l'orientation. Une retraite est utile étant donné le temps nécessaire à l'orientation et le besoin pour les administrateurs de mieux se connaître.  

3. Formation des membres du conseil  

Président du conseil et directeur général et, au besoin, spécialistes de l'extérieur  

Chaque réunion du conseil  

Intégrer une formation régulière à chaque réunion en vue de compléter l'orientation initiale reçue lors de la retraite. Une formation est essentielle pour assurer l'efficacité des administrateurs.  

4. Évaluation  

Président et membres du conseil  

Chaque réunion et annuellement pour ce qui est du rendement du conseil et des administrateurs  

Évaluer chaque réunion et intégrer des éléments d'amélioration. Évaluer le rendement du conseil, du président et de chaque administrateur. Une auto-évaluation constitue aussi un instrument efficace pour s'assurer que l'on répond aux besoins des administrateurs.  


* B.Admin.,CMA, CAE. Association Xpertise Inc. (www.axi.ca) est établie à Calgary.

Notes

Guide à l'intention des administrateurs des sociétés à but non lucratif (Droits, Fonctions et Pratiques)


Introduction

1 M. Gill, Governance Do's & Don'ts — Lessons from Case Studies on Twenty Canadian Non-Profits, Final Report, Ottawa, Institut sur la gouvernance, mai 2001, p. 5. Retour to Text

2 Selon Talking About Charities, un sondage d'opinion publique réalisé en 2000 par le Centre canadien de philanthropie pour la Fondation Muttart, plus de 75 p. 100 des répondants ont affirmé avoir " beaucoup " ou " un peu " confiance dans les organismes de bienfaisance. Le sondage a fait ressortir un pourcentage similaire de répondants qui estiment que " les organismes de bienfaisance sont généralement honnêtes dans la façon dont ils utilisent les dons ". Des copies des résultats complets du sondage sont disponibles sur le site Web de la Fondation Muttart, à www.muttart.org (Retour au texte). (Retour au texte)

Chapitre 1

1 Même si, dans la documentation sur les organismes sans but lucratif, les membres sont parfois considérés comme les propriétaires de l'organisation, ce terme est généralement employé dans l'optique de leur rôle de bailleurs de fonds et d'électeurs, par contraste avec leur rôle de clients des programmes de l'organisme. (Retour au texte)

2 Industrie Canada ne considère pas que les transferts d'argent suivants donnent lieu à un gain pécuniaire : (Retour au texte)

  • un transfert à un membre qui joue le rôle de représentant de la société dans la mise en oeuvre de ses activités (par exemple le paiement du salaire d'un employé qui est aussi membre);
  • un transfert à un organisme de bienfaisance membre en vue de la poursuite des objectifs de la société;
  • un transfert par une société qui est un organisme de bienfaisance enregistré à un membre qui est un bénéficiaire légitime au regard des objets de la société;
  • un transfert à un membre ou à un administrateur pour des services rendus à la société (par exemple les paiements pour les services rendus par un fournisseur qui est aussi membre).

Cependant, il faut noter sur ce dernier point que d'autres règles énoncées dans la législation sur les sociétés sans but lucratif peuvent restreindre ou interdire les transactions entre un administrateur et sa société. Voir les chapitres 2 et 6.

3 À la dissolution, à moins d'indication contraire dans les règlements administratifs ou dans un autre document constitutif, les avoirs d'une société sans but lucratif qui n'est pas un organisme de bienfaisance peuvent être distribués à ses membres. Ces paiements peuvent être imposables entre les mains des membres. Les organismes de bienfaisance enregistrés doivent transférer leurs avoirs à un autre organisme de bienfaisance enregistré ou à un donataire reconnu, au risque de s'exposer à une pénalité fiscale qui correspond, de fait, à la saisie de tous ses avoirs. (Retour au texte)

4 Les objets ou les buts spécifiques d'une société sans but lucratif représentent le fondement de sa constitution en société. Elle n'a aucun pouvoir hors de ces objets. Cela contraste avec l'approche adoptée dans la plupart des sphères de compétence au Canada à l'égard des sociétés à but lucratif où, après s'être constituées, elles bénéficient des " pouvoirs d'une personne physique " — soit les mêmes pouvoirs que ceux que possède une personne pour mener couramment des affaires sans devoir obtenir une autorisation particulière. (Retour au texte)

5 La principale raison à l'origine de cette distinction est qu'au palier fédéral et dans la plupart des provinces, la législation sur les organismes sans but lucratif remonte déjà à plusieurs décennies. Dans le cas des sociétés à but lucratif, la législation a été modernisée un peu partout au Canada dans les années 70 et 80. L'une des principales réformes a été la simplification du processus de constitution en société. Aux termes de cette législation, tout ce que les demandeurs doivent faire pour créer une société à but lucratif est de déposer des " statuts constitutifs ". Par contre, les personnes qui souhaitent constituer une société sans but lucratif doivent habituellement encore demander des " lettres patentes ", qui sont émises à la discrétion de l'organisme gouvernemental reponsable. (Retour au texte)

6 Ce processus d'approbation est limité à certains règlements administratifs et l'approbation n'est pas requise si le règlement traite d'une question interne n'ayant aucune incidence sur le plan de la gouvernance. À titre d'exemple, un règlement établissant des normes pour le matériel ou des critères de conduite professionnelle ne serait pas assujetti à un examen. Les exigences qui s'appliquent aux règlements visant de questions de gouvernance élémentaire figurent au par. 155(2) de la Loi sur les corporations canadiennes. Lorsqu'une modification à un règlement administratif touchant à la gouvernance est proposée mais qu'elle n'a pas encore reçu l'approbation ministérielle, elle ne peut être mise en oeuvre. (Retour au texte)

7 Alors que le pluriel est utilisé pour les employés, il est de pratique courante dans les entités sans but lucratif que le conseil recrute un directeur général qui, par la suite, embauchera les autres membres du personnel. (Retour au texte)

8 L.R.O., ch. C.10. (Retour au texte)

9 Ibidem, par. 1.(2). (Retour au texte)

10 Voir S. Robert et coll. (éd.), Robert's Rules of Order Newly Revised, 10e éd., Perseus, Cambridge (Mass.), 2000, p. 466. (Retour au texte)

11 À titre d'exemple, le droit du directeur général d'assister aux réunions du conseil peut être énoncé dans les règlements administratifs. (Retour au texte)

12 H. Kelly et M. Frederick, Duties and Responsibilities of Directors of Non-Profit Corporations, Société canadienne des directeurs d'associations, Toronto, 1999, p. 32, note 10. (Retour au texte)

13 E. Mina, The Guide to Better Meetings for Directors of Non-Profit Organizations, Société canadienne des directeurs d'associations, Tronto, 2000, p. 29. (Retour au texte)

14 Rapport final de la Table ronde sur la transparence et la bonne gestion dans le secteur bénévole au Canada, Consolider nos acquis : pour une meilleure gestion et transparence dans le secteur bénévole, Ottawa, février 1999 [ci-après la Table ronde Broadbent]. Les tâches sont énoncées à la page 24. (Retour au texte)

15 Le travail de la Table ronde Broadbent portait principalement sur le secteur bénévole. Même si elle a débattu longuement de la nature des organisations qui constituent ce secteur, la Table ronde a spécifiquement identifié les associations commerciales et les sociétés professionnelles comme sortant du cadre de son mandat. Bien que ses recommandations et conclusions puissent s'appliquer à l'ensemble du secteur sans but lucratif, la Table ronde a indiqué qu'elles avaient été élaborées pour les organismes de bienfaisance et de bien public. (Retour au texte)

Chapitre 2

1 Au Québec, ce principe figure à l'art. 309 du Code civil du Québec, qui énonce ce qui suit : " Les personnes morales sont distinctes de leurs membres. Leurs actes n'engagent qu'elles-mêmes, sauf les exceptions prévues par la loi. " (Retour au texte)

2 Dans la cause City Equitable Fire Insurance Company Limited [1925] 1Ch. 407, à la p. 428. Au Québec, l'art. 322 du Code civil du Québec impose expressément une norme subjective de " prudence " aux administrateurs des personnes civiles. (Retour au texte)

3 Ibidem, p. 428. (Retour au texte)

4 Voir D. Waters, Law of Trusts in Canada, 2e éd., Carswell, Toronto, 1984, p. 690. (Retour au texte)

5 En vertu du droit civil du Québec, il n'y a pas d'" abus de confiance " en tant que tel, mais les administrateurs qui ordonnent à la société d'enfreindre les modalités d'un don ou d'un legs qu'elle a reçu peuvent être tenus personnellement responsables du préjudice causé, en vertu des principes de la responsabilité extracontractuelle énoncés à l'art. 1457 du Code civil du Québec. (Retour au texte)

6 Loi sur les fiduciaires, L.R.O., 1990, ch. T.23. (Retour au texte)

7 H. Picarda, The Law and Practice Relating to Charities, 2e éd., Londres, Butterworths, 1995, p. 374. (Retour au texte)

8 Art. 322 du Code civil du Québec. (Retour au texte)

9 Cette règle est expressément énoncée à l'art. 324 du Code civil du Québec, qui oblige l'administrateur à divulguer tout intérêt qu'il a dans une entreprise ou une association qui pourrait le placer en situation de conflit d'intérêts. (Retour au texte)

10 L'art. 325 du Code civil du Québec oblige l'administrateur intéressé à divulguer son intérêt au conseil d'administration et à s'abstenir de participer à la discussion et au vote sur la question, à moins qu'elle ne porte sur sa rémunération ou ses conditions d'emploi. (Retour au texte)

11 Ibidem. (Retour au texte)

12 Au Québec, voir les art. 313 et 321 du Code civil du Québec. (Retour au texte)

13 Barrie v. Royal Colwood Golf Club, (2001) 18 B.L.R. (3d) 21 (B.C.S.C.), par. 71. (Retour au texte)

Chapitre 3

1 Craik c. Aetna Life Insurance Company of Canada, [1995] O.J. no 3286 (Division générale). Au Québec, cet aspect est traité à l'art. 309 du Code civil du Québec. (Retour au texte)

2 ADGA Systems International Ltd. c. Valcom Ltd. et al. (1999), 43 O.R. (3e) 101 (C.A.). Voir aussi ScotiaMcLeod et al. c. Peoples Jewellers Limited et al. (1996), 26 O.R. (3d) 481 (C.A.), p. 491. En vertu du droit civil du Québec, les administrateurs sont responsables des fautes extracontractuelles (délictuelles) qu'ils ont commises envers des tiers, en vertu de l'art. 1457 du Code civil du Québec, peu importe que ces fautes aient été commises dans l'exécution de leurs fonctions. Ils ne sont pas responsables des fautes contractuelles de la société (art. 309, 321 et 2160 du Code civil du Québec) à moins qu'ils n'aient personnellement commis des fautes extracontractuelles envers des tiers contractants. (Retour au texte)

3 39 E.T.R. (2d) 96. (Retour au texte)

4 Pour un examen détaillé des devoirs qu'ont les administrateurs de protéger les avoirs d'un organisme de bienfaisance, voir l'article de T. Carter, " Pro-active Protection of Charitable Assets — A Selective Discussion of Liability Risks and Pro-active Responses ", présenté au Barreau du Haut-Canada, le 20 novembre 2001 (disponible sur le site www.charitylaw.ca). (Retour au texte)

5 Voir Public Trustee c. Toronto Humane Society (1987) 40 D.L.R. (4th) 111 (C.S. Ont.), dans la cause David Feldman Charitable Foundation (1987), 58 O.R. (2d) 626 et la cause Faith Haven Bible Training Centre (1988), 29 E.T.R. 198 (Tribunal successoral de l'Ontario); voir aussi la cause Harold G. Fox Education Fund c. Ontario (Curateur public) (1989), 69 O.R. (2d) 742; pour plus d'information, consultez aussi l'article de T. Carter, " Remuneration of Directors in Ontario " sur le site www.charitylaw.ca. (Retour au texte)

6 Cela ne s'applique toutefois pas au Québec. (Retour au texte)

7 L.R.O., 1990, ch. C.10. (Retour au texte)

8 Pour plus de renseignements sur les dons conditionnels des donateurs, voir l'article de T. Carter, " Donor Restricted Charitable Gifts Revisited: A Practical Overview ", présenté au Troisième Forum annuel sur les successions et les fiducies, du Barreau du Haut-Canada, le 22 novembre 2000; ce texte est disponible sur le site www.charitylaw.ca. (Retour au texte)

9 Pour plus de renseignements concernant les exigences stipulées dans la réglementation en vertu de la Loi sur la comptabilité des oeuvres de bienfaisance (Ontario), voir Charity Law Bletin, no 4, sur le site www.charitylaw.ca. (Retour au texte)

10 L.R.C., 1970, ch. C-32. (Retour au texte)

11 L'article impose une responsabilité personnelle aux administrateurs qui : (Retour au texte)

  1. font usage ou autorisent l'usage d'un sceau paraissant être celui de la société sur lequel le nom de la société n'est pas gravé en caractères lisibles;
  2. émettent ou autorisent l'émission d'un avis, d'une annonce ou d'une autre publication officielle de la société;
  3. signent ou autorisent la signature, au nom de la société, d'une lettre de change, d'un billet à ordre, d'un endossement, d'un chèque, d'un mandat d'argent ou d'une commande de marchandises; ou
  4. émettent ou autorisent l'émission d'un état de compte, d'une facture ou d'une quittance de la société, sans que le nom de la société soit mentionné en caractères lisibles.

12 L.R.C., 1985, ch. W-11. (Retour au texte)

13 L.R.O., 1990, ch. D.2. (Retour au texte)

14 Ibidem, par. 99(2). (Retour au texte)

15 L.R.C., ch. 1 (5e suppl.) [ci-après la LIR]. Un régime semblable existe au Québec en vertu des art. 24.0.1 et suivants de la Loi du mtère du Revenu, L.R.Q., ch. M-31. (Retour au texte)

16 LIR, par. 227.1(1). (Retour au texte)

17 Voir, par exemple, Moose Jaw Kinsmen Flying Fins Inc. c. Ministre du Revenu national, [1988] 2 C.T.C. 2377, et Thunder Bay Symphony Ochestra Ass. Inc. c. Canada (Ministre du Revnu National — M.R.N.), [1998] T.C.J. no 955 (Retour au texte)

18 L.R.C., 1985, ch E-5.6. (Retour au texte)

19 L.R.O., 1990, ch. E.11, tel que modifié. (Retour au texte)

20 L.R.C., 1985, ch. L-2, tel que modifié par L.C. 1993, ch. 42. (Retour au texte)

21 L.R.C., 1985, ch. E-15, tel que modifié. (Retour au texte)

22 Un administrateur ne sera pas responsable du montant de la TPS que la société a omis de verser, à moins : (Retour au texte)

  • qu'un certificat correspondant au montant de l'obligation de la société n'ait été enregistré devant la Cour fédérale et que la dette demeure non acquittée;
  • que le société n'ait entrepris une procédure de liquidation ou de dissolution ou n'ait été dissoute et que la réclamation pour le montant de la dette n'ait été établie dans les six mois suivant la première de ces deux éventualités : la date du début de la procédure et la date de la dissolution; ou
  • que la société n'ait fait une cession ou qu'une ordonnance de séquestre n'ait été émise en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et que le montant de la dette n'ait été établi dans les six mois suivant la date de la cession ou celle de l'ordonnance de séquestre.

23 L.R.C., 1985, ch. 16 (4e suppl.). (Retour au texte)

24 L.R.O., 1990, ch. E.19, art. 194. (Retour au texte)

25 L.R.O., 1990, ch. C.8. (Retour au texte)

26 L.R.O., 1990, ch. R.23. (Retour au texte)

27 R.S.A., 1995, ch. C-45. (Retour au texte)

28 R.S.M., 1993, ch. 41, art. 10. (Retour au texte)

29 R.S.P.E.I., 1994, ch. 28, art. 4. (Retour au texte)

30 L.R.C., 1985, ch. C-34. (Retour au texte)

31 L.R.C., 1985, ch. P-21. (Retour au texte)

32 L.R.O., 1990, ch. I.8. (Retour au texte)

33 L.R.O., 1990, ch. L.25. (Retour au texte)

34 L.R.O., 1990, ch. S.5. (Retour au texte)

35 L.C., 2001, ch. 41. (Retour au texte)

36 L.R.C., 1985, ch. C-46. (Retour au texte)

37 Pour plus d'information sur la Loi antiterroriste (Canada) et son application aux organismes de bienfaisance, voir le Charity Law Bulletin, no 10 et no 11, sur le site www.charitylaw.ca. (Retour au texte)

Chapitre 4

1 L.R.C., 1970, ch. C-32 [ci-après la LCC]. (Retour au texte)

2 Industrie Canada, 22 août 2000. (Retour au texte)

3 Par. 109(1) de la LCC. (Retour au texte)

4 Art. 117 de la LCC. (Retour au texte)

5 L.R.C., 1985, 5e suppl., ch. 1 [ci-après la LIR]. (Retour au texte)

6 Par. 230(3) de la LIR. (Retour au texte)

7 Par. 155(2) de la LCC. (Retour au texte)

8 Art. 112 de la LCC. (Retour au texte)

9 L.R.O., 1990, ch. C.10. (Retour au texte)

10 Par. 149.1(3) et (4) de la LIR. (Retour au texte)

11 Par. 65(2) de la LCC. (Retour au texte)

Chapitre 5

1 Industrie Canada, Direction générale des cporations, Sommaire de la politique relative auxsociétés sans but lucratif, partie F, art. 1 à 4 [ci-après Sommaire de la politique]. (Retour au texte)

2 Bien que l'on puisse soutenir qu'un " comité permanent " doit aussi nécessairement être envisagé dans les règlements administratifs, en pratique il n'y a pas de différence entre un comité spécial temporaire établi par résolution du conseil et un comité régulier dont le mandat est, par exemple, de traiter des questions de vérification, ou de la nomination de candidats au conseil, aux termes d'une résolution. (Retour au texte)

3 Sommaire de la politique, partie G, art. 1 à 7. (Retour au texte)

4 Voir S. Robert et coll. (éd.), Robert's Rules of Order Newly Revised, 10e éd., Perseus, Cambridge (Mass.), 2000, p. 489-491. (Retour au texte)

Chapitre 6

1 Voir J. Carver, Boards That Make a Difference, Jossey-Bass Inc., San Francisco, 1990; voir aussi H. B. Johnson, " Getting on Board: Legal, Ethical, and Practical Considerations for Non-profit Board Members ", Tulsa Law Journal, (ver) 1997. (Retour au texte)

2 Art. 93 de la Loi sur les corporations canadiennes, L.R.C., 1970, ch. C-32 [ci-après la LCC]. (Retour au texte)

3 Le critère de la " négligence volontaire ", énoncé à l'art. 93 de la LCC, n'apparaît pas à l'art. 124 de la Loi sur les sociétés commerciales canadiennes, L.R.C., 1985, ch. C-44. Le règlement administratif sur l'indemnisation devrait être rédigé de manière à refléter cela. (Retour au texte)

4 L.R.O., 1990, ch. C.38, art. 80. (Retour au texte)

5 Art. 90 de la Loi sur les compagnies du Quebec, L.R.Q., ch. C-38. (Retour au texte)

6 Par. 21(3) et par. 157(1) de la LCC. (Retour au texte)

7 Art. 98 de la LCC. (Retour au texte)

Chapitre 7

1 Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C., 1985, ch. 1 (5e suppl.) [ci-après la LIR]. L'exemption de l'impôt sur le revenu pour les organismes de bienfaisance enregistrés figure à l'al. 149(1)(f). Les exemptions des autres impôts en vertu de la Loi — les impôts des parties IV, IV.1, V.1, VI — figurent au par. 227(14). L'exemption de l'impôt de la partie 1.3 figure à l'al. 181.1(3)(c). À l'al. 149(1)(1), une organisation qui, de l'avis du Ministre, n'est pas un organisme de bienfaisance, est exemptée de l'impôt sur le revenu à titre d'organisme sans but lucratif. Aux termes de cette disposition, si, de l'avis du Ministre, une organisation est un organisme de bienfaisance, elle doit s'enregistrer comme organisme de bienfaisance au risque de perdre son exemption. (Retour au texte)

2 Le crédit pour les particuliers figure à l'art. 118.1, tandis que la déduction pour les sociétés figure à l'art. 110.1. (Retour au texte)

3 Voir le Bulletin d'interprétation IT-496R, Organisations à but non lucratif, art. 13. (Retour au texte)

4 Ibidem, art. 8. Les administrateurs des sociétés sans but lucratif devraient être conscients de la distinction à faire entre un excédent et un bénéfice et comprendre que le statut d'organisme sans but lucratif de l'entité ne sera pas menacé du simple fait que ses recettes dépassent ses dépenses. On ne peut dire avec certitude ce qui constitue un excédent excessif, parce cette notion peut varier d'une situation à l'autre. Si un excédent important est attendu, ou qu'il est caractéristique des activités de la société, le conseil d'administration pourra vouloir envisager l'adoption d'une politique sur le moment et la façon d'utiliser cet excédent. (Retour au texte)

5 L'expression " donataire reconnu " est définie au par. 149.1(1) de la LIR. (Retour au texte)

6 Par. 248(1), " organisme de bienfaisance enregistré ". (Retour au texte)

7 Par. 149.1(1). (Retour au texte)

8 (1601), 43 Eliz. 1, ch. 4 (R.-U.). (Retour au texte)

9 [1891] AC 531 (HL) [ci-après Pemsel]. (Retour au texte)

10 [1882] ch. 321. (Retour au texte)

11 Ibidem, p. 332. (Retour au texte)

12 Pemsel, supra, note 9, p. 583. (Retour au texte)

13 Par. 149.1(6). (Retour au texte)

14 Par. 149.1(1) " fins de bienfaisance ". (Retour au texte)

15 Par. 149.1(1) " fondation de bienfaisance ". (Retour au texte)

16 Par. 149.1(1) " fondation de bienfaisance ". (Retour au texte)

17 Par. 149.1(1) " organisme de bienfaisance " et " fondation publique ". (Retour au texte)

18 Par. 149.1(1) " organisme de bienfaisance " et " fondation publique ". (Retour au texte)

19 Par. 168(1). (Retour au texte)

20 Par. 172(3). (Retour au texte)

21 Art. 189. (Retour au texte)

22 Al. 149.1(4)(a). Un placement dans une société en commandite équivaut à l'exploitation d'une entreprise. Voir le document 2000-60005475, du 10 mai 2000. (Retour au texte)

23 La circulaire d'information IC87-1, Organismes de charité enregistrés — Activités politiques accessoires, du 25 février 1987, énonce plus en détail l'opinion de l'Agence des douanes et du revenu du Canada sur les activités politiques admissibles d'un organisme de bienfaisance. La circulaire ne définit pas " activité politique ". Elle renferme toutefois des exemples. (Retour au texte)

24 Par. 149.1(1.1). (Retour au texte)

25 89 DTC 5115; [1989] 1 CTC 274 (Cour fédérale, Section de première instance), modifié par 92 DTC 6031; [1992] 1 CTC 1, (CAF) [ci-après Friedberg]. (Retour au texte)

26 Ibidem, p. 6033, citant la cause M.R.N. c. Zandstra, 74 DTC 6416; [1974] CTC 503, selon le juge Heald, p. 6419. (Retour au texte)

27 Bulletin d'interprétation IT 110-R3, Dons et reçus officiels de dons, 20 juin 1997. (Retour au texte)

28 Ibidem, par. 3. (Retour au texte)

29 Slobodrian c. M.R.N., [1998] 3 CTC 2654 (CCI). (Retour au texte)

30 Document 9800525, du 15 avril 1998. (Retour au texte)

31 [1999]. 99 DTC 5722; [2000] 1 CTC 35 (CAF). (Retour au texte)

32 Par. 118.1(1) " total des dons de bienfaisance ". (Retour au texte)

33 Par. 118.1(1) " total des dons ". (Retour au texte)

34 Les gains en capital résultant des dispositions de biens reçus en donation sont, de l'avis de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, des biens substitués. Ces biens doivent être inclus dans le régime de contingent de l'année durant laquelle ils sont vraiment dépensés (par. 149.1(1) " contingent des versements ", clause A.1). (Retour au texte)

35 Par. 149.1(1) " contingent des versements ", clause A(c). Le par. 149.1(4.1) interdit le recours à cette exception pour retarder indûment le déboursé de montants dans le cadre des activités de bienfaisance d'un organisme de bienfaisance. Lorsqu'un paiement a été fait dans ce but, le Ministre peut retirer à l'organisme de bienfaisance son enregistrement. Ainsi, un organisme de bienfaisance ne peut accorder une subvention à un autre organisme de bienfaisance en comptabilisant le montant de la subvention dans son contingent, puis l'organisme de bienfaisance qui a reçu la subvention verse, au cours de la seconde année, une subvention au premier donateur, en comptant elle-même cette subvention dans son contingent, et ainsi de suite. (Retour au texte)

36 Cette disposition pourra être invoquée lorsqu'un organisme de bienfaisance a engagé des coûts de démarrage élevés ou a mené une campagne de levée de fonds coûteuse mais infructueuse et n'a pas, en raison des conditions du marché, touché le taux de rendement attendu sur ses placements. (Retour au texte)

37 Par. 149.1(20). (Retour au texte)

38 Le calcul du contingent des versements permet une certaine souplesse. Le règlement 3701 stipule que le montant prescrit auquel s'applique la tranche de 4,5 p. 100 est déterminé de la façon suivante : (Retour au texte)

  1. choisir un nombre non inférieur à deux et non supérieur à huit de périodes égales et consécutives totalisant 24 mois et se terminant immédiatement avant le début de l'année;
  2. agréger, pour chacune des périodes choisie au par. a), tous les montants, dont chacun représente la valeur (déterminée conformément à l'art. 3702) du bien détenu par la fondation et n'ayant pas été utilisé directement dans le cadre de ses activités de bienfaisance ou d'administration au dernier jour de la période;
  3. agréger tous les montants, dont chacun est l'agrégat des valeurs déterminées pour chacune des périodes aux termes du par. b);
  4. diviser le montant agrégé déterminé au par. c) par le nombre de périodes choisi au par. a). Le règlement 3702 énonce une série de règles servant à déterminer la valeur des biens détenus par la fondation. Le par. 3701(3) précise que le nombre de périodes choisi par la fondation ne peut être modifié sans l'autorisation du Ministre. La décision relative au nombre de périodes qu'une fondation a choisi peut faire une différence marquée aux fins de son contingent des versements.

39 Par. 149.1(6.3), (13). (Retour au texte)

Chapitre 8

1 Cette description porte principalement sur le manuel du conseil d'administration dans sa forme traditionnelle. À notre avis, le manuel sur la gouvernance des politiques, préconisé par les partisans du modèle de gouvernance des politiques, n'élimine pas le besoin de disposer des documents que l'on retrouve dans un manuel du conseil d'administration de forme traditionnelle. Leurs objets sont très différents. (Retour au texte)